Présidentielle algérienne, l’alliance entre Chengriha et Tebboune en ordre de marche

Alors que les différents clans qui se partagent le pouvoir négocient la marge de manoeuvre du futur président algérien qui devrait être élu en septembre prochain, une violente campagne se déchaine sur les réseaux sociaux contre le chef d’état major de l’armée algérienne, le général Chengriha, et contre le président Tebboune qui souhaite briguer un deuxième mandat. Or ces deux personnalités qui, à la tète de l’État, ont cohabité en bonne intelligence ces dernières années, s’allient désormais pour neutraliser leurs adversaires.

L’ancien patron de la police, Farid Zinedine Bencheikh, dont on connait la proximité avec la Présidence, était démis de ses fonctions en janvier et arrêté, le 25 avril, par les hommes de la DCSA (renseignement militaire). Or ce haut gradé vient d’être libéré et pourrait reprendre du service..

La riposte n’a pas tardé. La tentative du Président Tebboune d’accélérer le cours de l’histoire à l’approche de la Présidentielle n’a pas tardé à provoquer une violente contre offensive de ses adversaires.

Selon la constitution, l’élection présidentielle devrait avoir lieu le 19 décembre 2024, date officielle de la fin du mandat du président Tebboune. Or en usant de ses prérogatives constitutionnelles, ce dernier a convoqué le corps électoral avant la fin de son mandat. Lors d’une réunion tenue à la Présidence le 21 mars, en l’absence très remarquée de tous les chefs des services de sécurité (contre espionnage, renseignement militaire), si prompts à marquer leur présence à chaque événement médiatisé, l’annonce de la date de l’élection anticipée en septembre est officialisée.

La stratégie du chef de l’état, encouragé par Paris et Washington, était de se retrouver seul en piste, ou presque, pour multiplier les promesses et distribuer des aides à ses futurs électeurs. Mais cette course de vitesse n’était pas et n’est toujours pas gagnée d’avance. 

Revenus en force ces dernières années, des hauts gradés formés durant la sale guerre contre les forces islamistes entre 1992 et 1998 par le général Mohamed Mediène, dit « Toufik », veulent accaparer désormais tous les leviers du pouvoir. Plusieurs personnalités politiques dont on connait la proximité avec ces réseaux ont annoncé leur candidature pour la Présidentielle de Septembre. Histoire de polluer la « blitskrieg » du président Tebboune, cette guerre éclair qui a pris tout le monde de vitesse. 

La guerre des réseaux sociaux

L’offensive médiatique s’est amplifiée sur les réseaux sociaux contre le Président algérien, mais aussi contre le chef d’état major, le général Chengriha, que les amis du général Toufik considèrent comme un gêneur. À les écouter, la sale guerre gagnée contre les islamistes durant la décennie noire et la capacité qu’ils ont toujours eu à instrumentaliser les politiques et les médias leur auraient donné, et à eux seuls, la légitimité et l’expérience du pouvoir. Du coup, on a vu quelques journalistes et autres youtubers à la solde de ces réseaux, déverser depuis l’Europe, des torrents de boue sur Tebboune et Chengriha.

Pour preuve, un pseudo réfugié politique, Said Bendira a été interpellé, le 27 avril, par la police française pour vol de voiture avant d’être identifié comme un youtuber résidant à Londres. Son téléphone a été saisi et lui même placé sous contrôle judiciaire. Les policiers français ont découvert depuis depuis que les donneurs d’ordre dont les noms apparaissaient sur son portable appartiennent effectivement tous à la DDSE algérienne (services extérieurs), qui est entre les mains d’anciens hauts cadres du renseignement militaire. Les méthodes de neutralisation des opposants que ces derniers cherchent à imposer, héritées des sombres années 1992-1998, ne font pas dans la finesse et ne sont guère couronnées de succès.

Said Bensdira, un « réfugié » à la solde des clans algériens, arrêté à Paris

Ainsi voici trois semaines, une bande de nervis recrutés par les services algériens s’en est prise violemment, lors d’un rassemblement place de la République à Paris, à un opposant présent. Pas de chance, il s’agissait d’un flic français en civil. Les agresseurs vont être traduits devant les tribunaux et renvoyés en Algérie. Ambiance. 

Des nominations contestées

Ces deux dernières semaines, la tension est montée d’un cran. Le patron de la police, Farid Zinedine Bencheikh, qui avait été écarté en janvier dernier, a été arrêté, le 25 avril et placé en détention. Dans la foulée, la lettre confidentielle éditée à Paris, « Africa Intelligence », fort bien informée, annonçait comme imminente la nomination à la tète du contre espionnage algérien (DGSI) d’un compagnon de route du général Toufik depuis la décennie noire (1992-1998). « Pour les anciens cadres opérationnels de la décennie noire,lisait-on, l’heure est venue d’occuper le devant de la scène. L’un d’entre eux, Abdelkader Haddad, dit « Nacer El Djinn », devrait prochainement devenir patron de la DGS ». Ce général à la réputation sulfureuse dirigeait jusqu’alors le « Centre Principal militaire d’investigation » (CPMI), chargé d’interroger sans ménagement les suspects soupçonnés d' »activité subversive ». À ce stade, le rapport de force semblait peser en faveur des adversaires de la Présidence.

Or ces tentatives pour s’emparer des leviers de l’appareil sécuritaire, première étape vers la conquête du pouvoir tout entier, ont lpour l’instant largement échoué. D’une part, Farid Zinedine Bencheikh vient d’être libéré. « Ce haut gradé qui n’a pas démérité, constat un de ses proches, pourrait reprendre du service ». D’autre part, le général Haddad, selon nos sources, ne devrait pas être nommé à la tête de la DGSI.

L’alliance objective nouée entre la Présidence et l’État Major, malgré des divergences sur la politique étrangère de l’Algérie, Tebboune penchant pour Paris et Chengriha pour Moscou, a neutralisé les ennemis qu’ils avaient en commun au sein des services secrets. Le jeu politique algérien reste dominé par les retournements d’alliance entre les trois pôles du pouvoir que sont le chef de l’état, l’institution militaire et les services secrets.

     

L’incroyable arrestation de Farid Zinedine Bencheikh, l’ex patron algérien de la police