Côte d’Ivoire, Laurent Gbagbo croit toujours en son étoile

L’ancien président ivoirien qui a été désigné candidat de son Parti pour les élections présidentielles à venir a pris dix engagements qui devraient, selon lui, résoudre les problèmes de survie dont souffrent la majorité de ses compatriotes.

Correspondance à Abidjan, Bati Abouè

Tout a été mis en œuvre, ce 10 mai 2024, dans le luxueux cadre de l’hôtel Ivoire d’Abidjan, pour assurer à l’ancien président le triomphe qu’il était en droit d’attendre de ses ouailles. La veille, son seul rival possible, Ahoua Don Mello, l’avait en effet adoubé comme le candidat naturel du parti et avait appelé les militants du Parti des peuples Africains (PPA-CI) à se battre pour que son nom soit à nouveau inscrit sur la liste électorale au nom de « la dignité de l’Afrique », avait-il martelé.

Mais Laurent Gbagbo va devoir obliger le président Alassane Ouattara à prendre une mesure d’amnistie pour effacer les effets de sa condamnation à 20 années de prison, dans ce qui est convenu d’appeler le casse de la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Bceao). D’autant que nul n’est dupe que cette décision par contumace tient plus d’un règlement de compte politique que d’une mesure de rétorsion contre la criminalité économique. Pour y arriver, l’ancien président devra compter sur son extraordinaire capacité à mobiliser ses compatriotes autour de sa cause. Mais les manifestations de rue semblent, pour l’heure, écartées, a prévenu une source au sein du PPA-CI. « Le Parti ne projette pas des marches et la chienlit, de manière générale, pour arriver à ses fins », assure-t-elle.

L’offre de Gbagbo à Ouattara

Depuis le 15 mars 2024, le PPA-CI a adressé un courrier au gouvernement pour lui proposer d’ouvrir des négociations politiques sur la réinscription de l’ancien président sur les listes électorales. Mais le PPA-CI s’inquiète également de la porosité du fichier électoral sur lequel son organe anti-fraude avait décelé, en septembre dernier, un peu plus de 2 millions de cas de fraude. Quant à la Commission électorale indépendante (CEI) elle continue de cristalliser les tensions puisque son président, Ibrahime Koulibaly-Kuibiert qui ne cache guère son penchant pour le parti au pouvoir vient de lancer l’opération d’actualisation des registres électoraux que l’opposition lui reproche, chose que l’opposition lui reproche.

Laurent Gbagbo est convaincu qu’un simple acte administratif peut régler son problème. L’opposition plaide d’ailleurs la même ouverture. C’est le cas de Simone Gbagbo, l’ex-épouse de Laurent Gbagbo qui pense qu’il suffirait d’une amnistie générale pour solder tous les problèmes de ce type dont celui de Charles Blé Goudé. Même Pascal Affi N’guessan qui a des raisons d’encourager une mesure qui éliminerait son ancien mentor a également expliqué que l’on ne peut pas faire comme si Gbagbo n’avait pas été jugé et blanchi par la Cour pénale internationale.

Pas de plan B

Malgré tout, l’ancien président n’a plus son destin entre les mains. Car il suffirait que Ouattara ne lève pas le coude sur son dossier pour que les espoirs nés de cette convention soient ruinés.

Il n’empêche qu’un plan B est toujours exclu. « Nous ne devons pas douter que nous n’obtiendrons pas gain de cause », estime-t-on au niveau interne. Mais si des proches de Gbagbo n’hésitent pas à annoncer le retour de celui-ci au pouvoir, des militants nombreux plaident pour un candidat de substitution. Mais seule une convention devrait défaire ce qui a été fait le 10 mai dernier.

Pour regagner le pouvoir, Laurent Gbagbo qui a toujours cru en son étoile, ce qui a été sa force, a pris certains engagements: la mise en place d’un organe électoral indépendant, la lutte contre la vie chère par l’instauration d’un juste prix des produits agricoles et la baisse du coût de la vie. L’ancien président veut également désendetter la Côte d’Ivoire dont l’encours de la dette est actuellement de plus d’environ 30.000 milliards sans dire comment, mettre en place une justice indépendante, réconcilier les Ivoiriens et transférer la capitale du pays à Yamoussoukro.

Le programme est solide, la mise en oeuvre l’est moins.