Les limites du bouclier militaire anti iranien au Moyen Orient

L’échec à enrôler les Iraniens dans un nouvel accord nucléaire, la vente de drones et de missiles iraniens à la Russie sont des actes iraniens hostiles qui qui laissent les Etats Unis à peu près sans réaction.

Une chronique de Caroline Bright

Tous les outils diplomatiques, économiques et militaires que les Etats Unis ont mis à la disposition de l’Ukraine pour se défendre contre la Russie demeurent inertes quand il s’agit de l’Iran.Ce double standard est incompréhensible.

Le général Kenneth F. McKenzie, qui a pris sa retraite en avril en tant que chef du Commandement central américain pour le Moyen-Orient a récemment mis en garde contre les progrès de l’Iran en matière de missiles balistiques, de missiles de croisière et de drones. « Au cours des cinq à sept dernières années, les capacités iraniennes. . . ont augmenté à un degré tel qu’ils créent aujourd’hui un « déséquilibre » (overmatch) efficace », a-t-il déclaré le 6 octobre à Policy Exchange, un groupe de réflexion londonien. « Déséquilibre », a-t-il poursuivi, « est un terme militaire qui signifie que vous avez la capacité d’attaquer sans que le défenseur puisse monter une défense efficace. »

Ce déséquilibre est d’abord économique : les Etats Unis, les Etats du Golfe et Israël dépensent plus – des dizaines ou des centaines de fois plus – pour intercepter les missiles et les drones iraniens qu’il n’en coûte à l’Iran pour les construire et les lancer.

La défense contre les missiles iraniens insuffisante

Plus important encore, ces missiles et ces drones iraniens sont conçus pour désorienter tous les systèmes antimissiles, à commencer par le bouclier défensif américain qui protège les Etats du Golfe et les bases militaires américaines au Moyen-Orient. Les Gardiens de la Révolution iraniens ont conçu leurs drones, leurs missiles de croisière et leurs missiles balistiques avec des caractéristiques de vol, des signatures radar et des angles de ralliement qui, lorsqu’ils sont lancés simultanément, déconcertent les capteurs des systèmes de défense antimissile. 

En temps ordinaire, un pays dont la défense antimissile intercepte 90 % des projectiles lancés contre lui réalise une prouesse technique. En janvier, quand les rebelles Houthis à la solde de l’Iran, ont attaqué les Émirats arabes unis, les défenses antimissiles émiraties, basées sur la technologie américaine, ont fonctionné avec succès. Néanmoins, trois personnes été tuées.  Imaginez qu’un des missiles iraniens au moins ait réussi à frapper Burj Khalifa, le plus haut gratte-ciel du monde… Cette défense réussie serait alors considérée comme un échec catastrophique.

Dans le domaine militaire a expliqué le général McKenzie, les seules armes défensives sont insuffisantes. Un bouclier ne protège pas d’une épée effilée. Un bouclier n’est efficace que lorsqu’il est utilisé AVEC une épée. Or aujourd’hui, le guide suprême iranien Ali Khamenei n’est pas persuadé que ses actes d’agression déclencheront une riposte proportionnée et donc dissuasive.

La puissance de feu iranienne

Aucun des alliés de l’Amérique dans le Golfe n’est en mesure de riposter contre l’Iran qui possède des arsenaux de missiles vastes et diversifiés dont la puissance de feu peut réduire en cendres les principales villes d’Arabie saoudite et des Émirats arabes unis. Sans parler du minuscule Israël.

Seuls les États-Unis ont le pouvoir de dissuader M. Khamenei. Or, les Etats Unis laissent la capacité meurtrière de l’Iran croître et se développer. Les frappes Houthis de janvier contre les Émirats arabes unis comprenaient des missiles balistiques qui ciblaient la base aérienne d’Al Dhafra, qui abrite la 380e escadre expéditionnaire aérienne de l’US Air Force. Peu de gens savent que l’Iran, par l’intermédiaire de son mandataire, a lancé cette année une attaque au missile balistique contre quelque 2 000 soldats Américains.

Fidèle à sa logique d’apaisement envers l’Iran, l’administration Biden n’a pas répondu à cette provocation. Désireuse de parvenir à un accord sur le nucléaire iranien, l’administration Biden a détourné le regard. Elle a fait comme si elle n’avait pas reçu une gifle. Le conseiller à la sécurité nationale, Jake Sullivan, a publié un communiqué affirmant que le raid était une attaque terroriste Houthi contre des civils, effaçant l’Iran et sa cible américaine.

Les conséquences de ce deux poids – deux mesures (tout contre la Russie, rien contre l’Iran) sont dévastatrices. Si les Américains ne veulent pas se défendre contre les attaques iraniennes, pourquoi les ayatollahs se laisseraient-ils ligoter par des accords – qui plus est imparfaits – sur le nucléaire ? Comment s’étonner ensuite que leurs alliés se replient sur la Chine et la Russie ?

Les protestations dans les rues de l’Iran démontrent la faiblesse et la vulnérabilité du régime iranien. Mais là encore, les États-Unis n’aident pas l’insurrection. Comme s’ils attendaient que le régime se rétablisse en interne pour continuer de négocier avec lui.

Mais négocier quoi ?