Présidentielle libanaise, les alliés chrétiens du Hezhollah se disputent son soutien

Les deux frères ennemis du camp chrétien et candidats à la succession de Michel Aoun (voir l’image ci dessus), Gebran Bassil, chef du Courant patriotique libre (CPL), et Sleiman Frangié, chef du courant des Marada, se livrent une guerre fratricide.

Depuis 2016 et l’élection de Michel Aoun, Gebran Bassil et Sleiman Frangié ont vu leurs relations se dégrader, anotamment au lendemain du soulèvement populaire d’octobre 2019. Conspué par la rue, le chef du CPL a combattu toutes les forces politiques du pays, attaquant notamment Sleiman Frangié par le biais de la magistrate Ghada Aoun, qui a poursuivi des fonctionnaires proches du zaïm du Liban-Nord.

Gebran. Bassil avait pour objectif sa propre carrière politique. Les dernières législatives ont bien montré son affaiblissement, mais aussi celui des Frangié qui ont perdu dans leur fief maronite  face à Michel Moawad, le fils de l’ancien Président qui est désormais le candidat du camp souverainiste à la Présidence de la République. Le CPL et le courant des Marada n’arrivent à garder la tête au-dessus de l’eau que grâce au soutien du Hezbollah et de l’axe de la Moumanaa.

Du fait de leurs divergences grandissantes, c’est tout le camp dit « du 8 Mars » qui se retrouve sous perfusion, assurée par la formation pro-iranienne dans la limite de ses capacités. L’absence de majorité claire rend plus difficile la tâche de Hassan Nasrallah , chef du Hezbollah, visant à faire élire un président maronite qu aurait eu son onction.

Gibran Bassil le rancunier

Mais le Hezbollah ne veut pas trancher, du moins publiquement, le différend présidentiel entre ses deux alliés. Avant même le scrutin législatif, le secrétaire général du Hezbollah avait réuni les deux présidentiables pour essayer de réchauffer la relation, pour le moins glaciale, entre les deux hommes. Le parti chiite avait besoin de limiter la casse pour tenter de garder la majorité parlementaire et de resserrer les rangs afin de faire face aux quatre prochaines années. Pourtant, la relation entre le CPL et le Hezbollah, alliés depuis la signature en février 2006 de l’entente de Mar Mikhaël par Michel Aoun et Hassan Nasrallah – une entente négociée par Gebran Bassil – semble s’être fragilisée avec le temps, notamment ces six dernières années.

Le camp de Michel Aoun reproche à son allié de ne pas l’avoir assez soutenu, surtout après le soulèvement d’octobre 2019, ainsi que dans « la lutte contre la corruption » qui n’était rien d’autre qu’une cabale lancée contre les adversaires de Gebran Bassil, notamment Nabih Berry, Sleiman Frangié, Najib Mikati, ou même Riad Salamé.

Par ailleurs, Gebran Bassil, convaincu qu’il peut redorer son blason au Liban et à l’étranger pour accéder à la magistrature suprême – même s’il réfute publiquement toute candidature – semble faire cavalier seul, allant de Doha à Paris, multipliant les interventions médiatiques où il attaque son meilleur ennemi actuel, Sleiman Frangié, mais également le tandem Hezbollah-Amal. Des critiques qui ne datent pas d’hier: le chef du CPL a plusieurs fois attaqué publiquement ou implicitement le parti pro-iranien dans ses allocutions, parlant de « deux armées » ou mentionnant la nécessité de réviser l’accord de Mar Mikhaël. Cette alliance serait-elle à l’agonie? Elle a d’ores et déjà atteint ses objectifs réels, c’est-à-dire faire élire Michel Aoun à la présidence de la République, en contrepartie d’une légitimation et d’une mainmise sur l’État de l’appareil militaire pro-iranien