Une exposition à Lyon sur les épidémies depuis le Néolithique

Jusqu’au 16 février 2025, le musée des Confluences à Lyon accueille l’exposition « Épidémies, prendre soin du vivant », et revient sur toutes les grandes épidémies de notre histoire. Peste, variole, choléra, grippe de 1918, sida et très récemment Covid-19…« Les épidémies disent beaucoup de nos sociétés et de notre relation aux autres espèces animales » pour Hélène Lafont-Couturier, Directrice générale du musée des Confluences à Lyon.

L’exposition Épidémies, prendre soin du vivant [1]qui s’y tient, s’inspire de celle réalisée aux États Unis, Outbreak, Epidemics in a connected world National Museum of Natural History de Washington DC.

Une chronique de Caroline Chaine

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Au Néolithique (9000 à 6000 avt JC), l’homme se sédentarise. La plus grande promiscuité humaine et la domestication des animaux sauvages favorisent la circulation des virus et des bactéries. Dans les Empires romain et byzantin urbanisés, les épidémies se succèdent,  arrivant d’Asie par les routes commerciales de la soie.

Au IIe siècle, la « peste » antonine, qui serait en fait due à la variole, touche tout le bassin méditerranéen. La cause présumée, un air chargé de miasmes, à laquelle le médecin grec Galien (129-201) ajoute la théorie des humeurs, un déséquilibre entre les fluides corporels.

Au VIe siècle, nouvelle épidémie de vraie peste cette fois, la « justinienne ». Elle se propage d’Egypte par les rats et leurs puces embarqués dans les bateaux qui transportent les céréales dans l’empire. L’épidémie par vagues dure 200 ans. On s’en protège avec des amulettes et on honore Apollon, le dieu purificateur et guérisseur.

Du XIV au XVIII eme siècle, une nouvelle souche, la « peste noire », arrive d’Asie Mineure par vagues. Elle fera 52 millions de victimes. Les mesures préventives se précisent avec l’aide des médecins, quarantaines pour les personnes et les marchandises, isolement des pestiférés, enlèvement des cadavres, comités de surveillance, bouclage de la ville de Marseille en 1720, …

La peste depuis le Kirghizistan en Asie centrale

Considérée comme un châtiment divin,  on invoque les saints  pour s’en protéger. Des enquêtes récentes d’archéogénétique retracent le parcours de la peste depuis le Kirghizistan en Asie centrale. Dans l’ancienne cité d’Ifé au Nigeria, on retrouve la bactérie dans des sépultures Les résultats de fouilles suggèrent un départ précipité de la population sous l’effet d’une épidémie. Ce pourrait être un indice de la peste en Afrique de l’Ouest. Mais on ne sait pas jusqu’où la pandémie s’est  propagée sur le continent.

La variole  arrive en Amérique au XV eme siècle avec Christophe Colomb et Hermán Cortés. La population amérindienne passe en un siècle et demi de 55 millions à 6 millions.

La grippe « espagnole » en pleine guerre mondiale se propage en 1918 sur les 5 continents infectant le tiers de l’humanité. Elle fera 50 millions de morts.

Des premières variolisations à la vaccination

Au 18 éme siècle, premières immunisations contre la variole. Du pus prélevé sur un malade et inoculé à une personne saine la protège de la maladie et limite les formes graves. Même constatation en Turquie rapportée en Europe grâce à Mary Montagu, la femme de l’ambassadeur du Royaume-Uni et au Bénin, peut-être en lien avec des cultes vaudous. L’anglais Edward Jenner utilise le pus de vaccine, une maladie bénigne chez les vaches, cousine de la variole, pour réaliser la première vaccination chez l’homme.

Au XIXeme siècle, les découvertes s’enchainent. Les hygiénistes font une corrélation entre les quartiers insalubres, le nombre de morts du cholera et la consommation d’eau à la pompe publique. C’est la naissance de l’épidémiologie. Robert Koch identifie en 1883 avec son microscope, son agent Le Vibrio cholerae. Désormais pour chaque épidémie, on recherchera un microbe et une voie précise de transmission.

Louis Pasteur dans les années 1870 avant de mettre au point le vaccin contre la rage, s’intéresse aux épidémies des animaux. Il met au point un vaccin contre le charbon du mouton et son disciple, Alexandre Yersin,  dépêché à Hong Kong isole la bactérie de la peste sur le mouton. La peste bovine est à l’origine de famine en Inde et en Afrique.

Le tournant des années 1970

Au XX eme siècle, on connaissait les maladies, on avait isolé les responsables et mis au point de nombreux de vaccins. « 1976, comme le rappelle Frederic Keck, anthropologue et Directeur de recherche au CNRS,  marque la fin de la grande campagne d’éradication de la variole par l’OMS et l’annonce prématurée de la fin des maladies infectieuses. » Et apparaît entre autres, le virus Ebola, sur une rivière du Zaïre, extrêmement pathogène avec un taux de létalité de 95%>Ebola, le SIDA qui a fait 40 millions de mort à ce jour et le Covid.

L’épidémie du Sida est un point de bascule par rapport aux épidémies précédentes.  Un temps record pour l’identification du virus à l’Institut Pasteur en 1983, la mise au point d’un test diagnostic, de traitements  et de son origine, le singe.. Et devant la stigmatisation des malades, homosexuels, toxicomanes, des associations deviennent des « experts de la maladie et des acteurs de la santé publique », comme Act Up.  C’est une nouvelle étape dans l’histoire des épidémies.

Aujourd’hui, 60% des nouveaux pathogènes sont d’origine animale mais ils ne se transmettent que dans certaines conditions. « Appréhender ensemble la santé humaine, animale et environnementale et analyser l’impact des activités humaines sur les écosystèmes permettra de mieux anticiper et éviter les épidémies ». C’est l’approche « One Health ».

[1] Jusqu’au 16 février 2025