Frédéric Bongo, le come back d’un prince banni

 L’annonce de son retour à Libreville a semé une peur panique au cœur du pouvoir gabonais qui pensait l’avoir définitivement écarté en l’envoyant dans les limbes d’une ambassade en Afrique du Sud. Mais qui est Frédéric Bongo et pourquoi fait-il peur ? Portrait d’un « Prince Africain » sur le retour.

 

Frédéric Bongo est né à Paris dans le 16ème arrondissement parisien le 26 août 1979. Son père est le président de la République du Gabon Omar Bongo et sa mère est Jacqueline Coq de nationalité française, originaire des Antilles françaises. Frédéric Bongo suit une scolarité normale à Paris. Adepte des sports de combat, féru de football, Frédéric Bongo est un fervent supporter du Paris Saint Germain dont il ne manque aucun match. Après une maîtrise de sociologie, il intègre sur concours en tant que français l’Ecole Spéciale Militaire de Saint Cyr Coëtquidan où il est très bien noté, à sa sortie il choisit de devenir gendarme et pour parfaire sa formation il intègre le 1er groupement d’instruction de l’Ecole des Officiers de la Gendarmerie Nationale Française à Melun. Mais il ne fait pas carrière dans la gendarmerie française, son père Omar Bongo envoie Ali Bongo son frère aîné et ministre de la Défense du Gabon assister à sa remise de diplôme et le chercher.

Carrière fulgurante

Au Gabon, Frédéric Bongo intègre la Gendarmerie plus précisément la Direction Générale des Recherches qui est à la fois un bureau d’investigations et une agence de renseignements placée sous l’autorité directe du Président du Gabon, son père. Officier de terrain, il enquête et prend part aux interventions. Dans un pays où les forces de l’ordre sont d’une très grande brutalité et où les interrogatoires sont souvent très violents, il finit par lui aussi s’adonner aux mêmes pratiques que ses collègues.

A 27 ans, il est nommé à la tête de la Direction générale des Recherches, peu après il se rapproche un peu plus de son père en intègre la Garde Républicaine du Gabon. Content de son fils, Omar Bongo le nomme à la tête du plus puissant service de renseignement du Gabon : La Direction générale des services spéciaux (DGSS- Garde Républicaine).  A ce poste il a directement la charge de la protection de son père et travaille en tandem avec son frère Ali Bongo inamovible au ministère de la Défense.

Ali Bongo, en pleine possession de ses moyens avant l’accident cérébral dont il a été victime

L’allié d’Ali Bongo

Après la mort de son père en juin 2009 en Espagne, Frédéric Bongo veille sur la sécurité de son frère, de sa famille et du clan Bongo. Pendant les élections présidentielles anticipées de 2009, il fait feu de tout bois pour que son frère Ali Bongo accède au fauteuil présidentiel. Après l’arrivée au pouvoir d’Ali Bongo, il est confirmé par son frère à son poste et continue de veiller sur lui. Pièce maîtresse du pouvoir de son frère, comme de son père jadis, Frédéric Bongo finit peu à peu par passer de l’ombre à la lumière tant par sa réputation que par ses méthodes brutales. Au Gabon il est haï et il est craint.

Guerre de clans

Lorsqu’en octobre 2018 Ali Bongo est victime d’un accident vasculaire cérébral, Le Lieutenant-Colonel Frédéric Bongo prend les choses en main. Il verrouille l’information et le pays, débarque à Ryad et organise la convalescence de son frère au Maroc s’opposant ainsi à l’épouse d’Ali Bongo qui avait souhaité que ce soit à Londres. Il s’oppose également à Brice Laccruche Alihanga, le très puissant directeur de cabinet d’Ali Bongo, à qui il interdit même de quitter le territoire. Au Maroc, il s’occupe de tout, au Gabon il surveille tout.

Après la tentative de coup d’Etat du 07 janvier 2019 du Lieutenant Kelly Ondo Obiang officier de la Garde Républicaine, Frédéric Bongo voit son étoile pâlir mais il résiste. Frédéric Bongo échappe à la première purge qui voit la mise à l’écart par Sylvia Bongo de 18 collaborateurs très proches d’Ali Bongo dont son garde du corps le plus ancien, le Coréen Park Sang Chul dit Monsieur Park. S’imposant de plus en plus comme la régente du Gabon, Sylvia Bongo réussit quand même à lui interdire l’accès à la résidence privée d’Ali Bongo. Ses adversaires le présentent soit comme l’artisan de la tentative du coup d’Etat qui a voulu renverser son frère, soit comme un incompétent n’ayant pas pu l’empêcher.

En avril 2019, il supervise le retour de son frère et lors de la grande parade militaire célébrant l’indépendance du Gabon, Frédéric Bongo, athlétique, impeccable dans son uniforme rouge et noir bardé de décorations, est assis à deux pas d’Ali Bongo, son frère dont il reste le premier garde du corps.

Le bannissement

Pourtant le 15 Octobre 2019, une décision est lue lors du communiqué final du conseil des ministres Présidé par Ali Bongo Ondimba en personne : « Ministère des affaires étrangères- Ambassade du Gabon en Afrique du Sud – Attaché militaire : Lieutenant-Colonel : Frédéric bongo Ondimba ». Selon une source bien introduite : « Seul Ali pouvait débarquer Frédéric, d’abord parce que c’est son grand frère, ensuite parce que c’est le seul qui pouvait éviter que Frédéric et ses éléments tentent quelque chose, n’oubliez pas que l’armée obéit à Ali ! Mais je pense qu’il n’a jamais pensé que son frère puisse le démettre de ses fonctions vu tout ce qu’il a fait pour lui ».

Frédéric Bongo  accepte le poste. Mais très vite, il finit par obtenir un stage de perfectionnement en France où il se trouve actuellement.

 Curieusement, l’annonce de son retour au Gabon a plongé le pouvoir gabonais dans la crainte.

Un retour redouté

Mais pourquoi l’annonce de son retour provoque-t-il ce branle-bas de combat au Palais Rénovation, la Présidence au Gabon ? Ancien patron du plus puissant service de renseignement du Gabon, Frédéric Bongo a été une pièce maîtresse du pouvoir gabonais tant sous son père que sous son frère. Possédant forcément des dossiers, l’idée de le voir revenir à Libreville n’enchante pas le pouvoir qui ressemble de plus en plus avec un Ali Bongo diminué à une régence qui ne dit pas son nom.

Apprécié par ses hommes, il est resté populaire au sein des militaires notamment dans la gendarmerie où il a laissé le souvenir d’un chef qui n’hésite pas – arme au poing – à monter au feu avec ses hommes et dans la Garde Républicaine où il a laissé le souvenir d’un officier compétent et très efficace.

Fils bien aimé d’Omar Bongo, désigné par lui comme « protecteur du royaume », il a montré au « clan Bongo » qu’il pouvait loyalement veiller sur son père et sur son frère ; et au Gabon, pays bantou, cela compte énormément.

Si personne ne peut prévoir ce qui arrivera au Gabon dans les prochains mois, on peut affirmer sans grand risque de se tromper que Frédéric Bongo aura un rôle à jouer, reste à savoir lequel…

Frédéric Bongo (volet 2), le bannissement du chaouch

Frederic Bongo (volet 1), la grandeur d’un tortionnaire

1 COMMENTAIRE

  1. Vos articles sur le Gabon sont toujours très fouillés et parfois à contre pied de tout ce qui se dit…Bravo

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