Ces Centrafricains qui ont tenté de renverser le président Obiang

Mondafrique revient sur la tentative de coup d’état qui a gelé les relations entre la Guinée Equatoriale et la République Centrafricaine voici cinq ans. Pour rappel, les autorités équato-guinéennes ont fermé de façon unilatérale leur frontière avec le Cameroun le 28 décembre 2017 après l’arrestation par les forces armées camerounaises d’un commando d’une quarantaine d’éléments lourdement armés qui allait passer la frontière à Kyé-Ossi, pour soutenir un putsch contre le régime de Teodoro Obiang Nguema Mbasogo.

Quand Obiang Nguema apprend que se trouvent parmi l’équipe de putschistes Ahmed « Dada » Yalo, le petit frère du plus proche conseiller du président centrafricain Sani Yalo, il somme Touadéra de venir s’expliquer à Malabo. Touadéra ne comprend pas tout de suite la gravité de la situation et veut initialement envoyer son ministre des Affaires étrangères Charles-Armel Doubane mais Obiang exige qu’il se déplace personnellement. 

La RCA bénéficie alors d’un fort soutien de la Guinée à plusieurs niveaux avec notamment la formation à Malabo d’officiers affectés à la garde présidentielle centrafricaine. Le Président Touadéra fait le déplacement malgré lui dans un avion affrété par la Guinée-Equatoriale le 9 janvier 2018 et l’accueil à Malabo est glacial. Obiang indique alors clairement à son homologue centrafricain qu’il veut que la lumière soit faite sur cette affaire et que des têtes tombent si certains à Bangui sont impliqués dans ce dossier. Touadéra qui assure ne rien savoir de cette histoire se garde alors bien d’évoquer avec Obiang le fait que putschiste Ahmed « Dada » Yalo faisait partie de son équipe de sécurité rapprochée lors de son déplacement à Paris en mai 2016, ce que l’on peut clairement constater dans cette vidéo de la communication officielle de la Présidence Centrafricaine. https://www.youtube.com/watch?v=QmHqElN8cSg&t=48s

Le 12 janvier 2018, le ministre de la Sécurité nationale équato-guinéen, Nicolas Obama Nchama est dépêché à Bangui pour complément d’enquête dans cet épineux dossier.

Les dénégations du président centrafricain

Lors d’une interview donnée à RFI le 17 Janvier 2018,  Obiang Nguema Mbasogo indique « certains agents commençaient à recruter les mercenaires depuis le Tchad, la Centrafrique. J’ai même prévenu le président Touadéra. Il m’a répondu qu’il n’a pas la possibilité de contrôler le territoire ». 

Sani Yalo, grand frère du putschiste Ahmed Dada Yalo, affirme dans une interview parue dans le journal « :Jeune Afrique » le 24 janvier 2018 avoir lui-même participé à la dénonciation de son frère. « Nous avons été informés que des Centrafricains étaient impliqués dans une tentative de déstabilisation. Nous avons donc prévenu les autorités des pays concernés, le Cameroun et la Guinée équatoriale. Si mon frère est un terroriste, il faut le traiter comme tel. Je n’ai pas d’états d’âme ».

La version de Sani Yalo qui n’est alors pas en mesure de préciser qui précisément et par quel canal il a soi-disant prévenu de le Cameroun et la Guinée-Equatoriale l’implication de son petit frère ne convainc pas vraiment les autorités Equato-guinéennes.

En avril 2018, convoqué par la commission spéciale d’enquête mise en place dans ce dossier, le comptable du BARC Igor Rugin Benguéré (aujourd’hui réfugié à Malabo) mettra en lumière que les fonds pour recruter les mercenaires recrutés en Centrafrique ont transité sur les comptes bancaires du Bureau d’affrètement Routier Centrafricain (BARC) à la Commercial Bank Cameroun (CBC) et Ecobank à Douala au Cameroun. Or, Sani Yalo est signataire en tant que Président du Conseil d’Administration après avoir obtenu pouvoir de signature de la part du contrôleur général des entreprises et offices publics de Arthur Piri, neveu du président Touadéra…

Malgré l’émission de ce mandat d’arrêt en mai 2018 désignant clairement Sani Yalo, le Président Touadéra ne livrera pas son proche conseiller à la justice Équato-Guinéenne stoppant net les relations alors au beau fixe entre Bangui et Malabo.

Près de cinq ans après les faits, Mondafrique rend public un document exclusif : un mandat d’arrêt du tribunal d’instruction de Bata en Guinée Equatoriale daté du 18 mai 2018 désignant les coupables du « coup d’Etat » manqué de décembre 2017