Le ministre centrafricain de la justice accusé de barbarie, mais au mieux avec la CPI

Le nouveau Ministre centrafricain de la justice, Djoubaye Abazène, qui a été mis en cause dans des rapports d’ONG pour sa possible participation à des crimes de guerre pose sans aucun souci face aux photographes avec le représentant de la CPI en Centrafrique, Mike Cole.
 
Étrange pays que la Centrafrique où les réseaux virevoltent dans une grande confusion des fonctions et un total mépris des codes étatiques les plus reconnus . Depuis Juin 2021, Arnaud Djoubaye Abazène, Ministre d’Etat chargé de la Justice, de la promotion des droits humains et de la bonne gouvernance, garde des sceaux, fait l’objet de graves accusations. Et bien cela n’empêhe pas Mike Cole, représentant de la CPI en Centrafique,  à poser tout sourire avec ce ministre, un cliché relayé par la CPI sur son compte Twitter
 
Originaire de la localité de Gordil aux confins de la préfecture de la Vakaga au nord-est de la République Centrafricaine, Arnauld Djoubaye Abazène est directement parenté à l’ancien chef rebelle Seleka et ex-Président Michel Djotodia Am-Nondroko. Ce magistrat de profession est titulaire d’un diplôme de troisième cycle obtenu à l’école nationale d’administration et de magistrature de Bangui. Procureur à Bouar, Arnauld Djoubaye Abazène devient premier substitut du procureur puis premier vice-président du Tribunal de Grande instance de Bangui sous Bozizé. 
 

« Chef de race »

 
Ce cadre de la rébellion Seleka fait ensuite son entrée au gouvernement le 31 mars 2013 en qualité de Ministre des transports grâce à son parent le Président putschiste Michel Djotodia. Il sera ensuite reconduit au même poste sous tous les gouvernements de la transition de Catherine Samba-Panza. Une fois Faustin-Archange Touadéra élu Président, il lui faudra attendre le gouvernement Ngrébada en mars 2019 au lendemain de la signature de l’accord de Khartoum, pour que Djoubaye Abazène retrouve le Ministère des transports et soit élevé dans la foulée adjoint du « chef de race » de l’ethnie Goula par son chef, le cheik Tidjani Dahiya. 
 
Dans son rapport d’Octobre 2020 (1), l’ONG « The Sentry » a prouvé que Arnaud Djoubaye Abazène, par ailleurs Ministre résident de la préfecture de la Vakaga a reçu un appui politique, militaire et financier du gouvernement centrafricain et du groupe Wagner pour appuyer la coalition de groupes armés pro-gouvernementaux RPRC, MLCJ et PRNC qui ont lancé en septembre 2019 des attaques meurtrières à Birao. Des dizaines de civils sont morts et des dizaines de milliers de personnes ont été déplacées suite à ces attaques qui ont ciblé la communauté rounga affiliée au FPRC, groupe armé opposé au président Touadéra.
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La Cour Pénale Spéciale centrafricaine, dont les juges nationaux et internationaux peuvent juger des crimes de guerre et autres délits majeurs, avait alors dénoncé des « actes inhumains et relevant de la pire barbarie » et rappelé que « ces actes sont des crimes relevant de la compétence de la Cour Pénale Spéciale à savoir les crimes de guerre, les crimes contre l’humanité et le crime de génocide. » (2)
 
Ces groupes armés pro-gouvernementaux ont été renforcés en février 2020 par des mercenaires soudanais aux ordres d’Ali Muhammad Ali Abd-al-Rahman alias Ali Kushayb qui sera arrêté en Juin 2020 et transféré à la Cour pénale internationale pour avoir formé et dirigé en 2002 et en 2003 une milice janjawid accusée de génocide du Darfour. 
 
 
 
Sources : 
 
1. Rapport The Sentry « La RCA otage des proxys et des profiteurs de guerre. »
 
2. Communiqué De Presse Du Bureau Du Procureur Spécial Près La Cour Pénale Spéciale. 8 Mai 2020
 
3. Lettre du 25 juin 2021, adressée au Président du Conseil de sécurité par le Groupe d’experts sur la République centrafricaine 
 
4. Tweet de la CPI montrant Arnaud Djoubaye Abazène & Mike Cole, représentant de la CPI en RCA.