Cameroun, neuf civils tués par l’armée


Une enquête indépendante, estime Human Rights Watch, doit être ouverte sur les meurtres de villageois à Mautu, dans la région du Sud-Ouest

(Nairobi, le 4 février 2021) – Des soldats de l’armée camerounaise ont tué au moins neuf civils dans la région anglophone du Sud-Ouest le 10 janvier 2021, a déclaré aujourd’hui Human Rights Watch. Parmi les victimes figuraient une femme et un enfant, et quatre autres personnes ont été blessées. Les soldats en cause ont également pillé des dizaines de foyers et menacé les habitants.

Le porte-parole de l’armée camerounaise a admis que des soldats du 21e Bataillon d’infanterie motorisée (BIM) avaient conduit une opération dans le village, tout en niant que les troupes aient tué et blessé des civils.

« Tuer des civils et piller leurs maisons au nom de la sécurité sont de graves violations des droits humains qui alimentent les cycles croissants de violence et d’abus dans les régions anglophones du Cameroun », a déclaré Ida Sawyer, directrice adjointe de la division Afrique chez Human Rights Watch. « Les autorités camerounaises devraient contrôler les unités responsables d’abus et, avec l’aide de l’Union africaine et de l’ONU, ouvrir une enquête crédible et impartiale sur les meurtres commis à Mautu et poursuivre en justice ses auteurs.»

Human Rights Watch s’est entretenu par téléphone avec 17 témoins, dont cinq proches des victimes, au sujet de l’attaque. La violence entre forces gouvernementales et groupes armés séparatistes secoue les régions anglophones du Nord-Ouest et du Sud-Ouest du Cameroun depuis fin 2016. Des groupes séparatistes opèrent dans la zone située autour de Mautu, où ils viennent parfois s’approvisionner en vivres et récupérer de l’eau, selon des habitants.

Médecins sans frontières (MSF) a soigné quatre personnes blessées par balle, dont un enfant. Human Rights Watch a obtenu les listes des neuf personnes tuées auprès de quatre sources distinctes, et s’est entretenu avec des proches et des résidents qui ont assisté aux enterrements ou transporté les corps des victimes à la morgue de l’hôpital de Muyaka. Les détails fournis par ces individus correspondent aux informations que Human Rights Watch a obtenues indépendamment d’autres témoins.

Human Rights Watch a transmis ses conclusions au Capitaine de frégate Cyrille Serge Atonfack Guemo, le porte-parole de l’armée camerounaise, dans un courriel daté du 22 janvier et dans lequel des questions spécifiques lui ont été posées. Atonfack Guemo a répondu le 26 janvier, mais sans aborder directement les questions posées par Human Rights Watch. Il a rejeté les preuves d’homicides illégaux en alléguant qu’elles étaient fabriquées, sans toutefois corroborer cette affirmation.