Angola, le fantôme de Dos Santos plane sur les élections du 24 aout !

Au moins un homme en Angola prétend connaître le résultat des prochaines élections du 24 aout: il s’agit du chef de la maison militaire de l’actuel Président de la République et candidat à sa succession, Joao Lourenco : « Le MPLA sera déclaré vainqueur des prochaines élections ». Voici un bel-l aveu que les élections seront truquées, forcément truquées ! 

Une chronique d’Yves Loizeau

Le grand risque des futures élections en Angola, c’est la fraude…. gouvernementale ! C’est plus qu’un risque, c’est une certitude. Pourtant les derniers sondages laissent entendre que pour la première fois depuis l’indépendance de l’Angola en 1975, un autre parti que le MPLA pourrait, aux ommandes depuis un demi siècle, arriver au pouvoir. Mais le pays qui a du mal à devenir autre chose qu’une dictature. Les précédentes élections ont toutes donné lieu à contestation.

Vingts points d’écart de voix

En juin dernier, il y a un peu plus d’un mois, une étude réalisée par une société privée donnait 54 % à la coalition UNITA pour l’opposition et 33,8 % seulement pour le MPLA. Ces vingt  points d’écart témoignent tsunami d’un désir de changement évident. D’autres sondages, ou du moins présentés comme tels, donnent des chiffres sensiblement différents : 38 % pour les sortants, 32 % pour l’UNITA et 26 % pour CASA-CE. 

 Il suffisait de voir les manifestations de rue suscitées par la venue du principal candidat de l’opposition dans de nombreuses villes pour illustrer de désir de changement. L

Le décès d’Eduardo dos Santos à Barcelone en Espagne pourrait redistribuer les cartes. On assiste à une véritable tragi-comédie entre la famille proche de l’ex Président, peu recommandable, et le gouvernement du Président actuel, Joao Lourenço, son successeur qui se présente en champion de la lutte anti corruption. On s’arrache pratiquement l’illustre dépouille. Des plaintes ont été déposées, une enquête est en cours à Barcelone, le tout dans une atmosphère rocambolesque d’une lutte improbable pour s’approprier le cadavre de l’ancien leader angolais  

Reste qu’une majorité des huit enfants du défunt se s’est toujours pas prononcée pour des obsèques en Espagne. Joao Lourenco le président candidat, ne sera pas en mesure d’organiser les cérémonies en Angola qui aurait pu lui donner plus de visibilité.

Est-ce qu’après les élections le corps de l’ancien chef d’État sera rapatrié en Angola pour des obsèques? La volonté du parti au pouvoir dd’organiser des obsèques nationales et majestueuses serra-t-elle exaucée? Les observateurs doutent d’un tel scénario. Les attaques contre l’actuel président viennent de son propre camp. La plus médiatique des filles de dos Santos appelle à voter pour le leader de l(opposition. Les conséquences sur l’électorat du MPLA n’ont pas été clairement établies.

« En Angola, les morts ne sont jamais morts ! »

Autre ombre au tableau, 2,5 millions de morts figureraient toujours sur les listes électorales… Plusieurs témoignages de parents de décédés ont révélé cette situation qui serait tout à fait inédite. Il va sans dire que le chiffre en question, non démenti par les instances électorales qu’elles qualifient de « sans importance » fait jaser. Une pétition a été lancée pour que les listes soient purgées. Cela fait désordre même si pour le responsable des élections, nommé par le MPLA ,« tout cela ne pose aucun problème ! ». Il paraît le seul à y croire.

Les partis d’opposition et les représentants de la société civile entendaient assurer dans les 26000 bureaux de vote un comptage parallèle des voix. « Puisque la loi ne le prévoit pas, c’est illégal ! » a précisé encoreune des membres de la Commission nationale électorale angolaise….

Le gouvernement joue sur du velours.

Le rôle des observateurs accrédités par la Commission telle qu’elle les définit reste inexistant. La mission minimum de l’Union Européenne tient à la présence de deux experts présentées par l’ambassadrice de l’UE. Les précédentes élections avaient vu le gouvernement angolais dresser tellement d’obstacles que l’Union Européenne avait fini par renoncer.

Après de fermes recommandations effectuées publiquement par le Président américain, Joe Biden, avant les élections au Kenya et en Angola, ce sont maintenant 3 sénateurs démocrates qui rappellent que l’Angola est considéré comme un pays où l’État abuse des institutions, contrôle les médias, intimide les journalistes et s’ingère dans la vie des partis politiques : ils souhaitent que le gouvernement de Luanda  autorise « la participation sans restriction d’observateurs électoraux indépendants ». Ce texte doit encore être adopté par l’ensemble du Sénat.

L’ambassadeur des USA à Luanda ne semble pas tout à fait sur la même longueur d’onde en appréciant, quant à lui, des réformes démocratique qui auraient été faites par l’actuel Président. Ce n’est pas la 1ere fois que les Etats-Unis jouent le double jeu : ce sont bien les pétroliers américains installés à Cabinda qui ont payé le corps expéditionnaire cubain durant la guerre civile pendant que Washington soutenait l’UNITA.

Dans ce contexte, on est donc surpris de noter que le gouvernement angolais affirme avoir accrédité 1700 observateurs, nationaux ou étrangers i Qui sont ils ?

Les élections sot tout sauf démocratiques. Et pourtant le moment du changement semble venu. Joao Lourenco sort fatigué de la lutte qu’il a engagée à juste titre contre les oligarques qu’étaient devenu la famille de l’ancien président et un certain nombre de dignitaires qui l’entouraient. Même si le Parti MPLA reste tout puissant puisqu’il a le contrôle sur tout : le Parlement où il est outrageusement majoritaire, tout l’appareil judiciaire, la grosse majorité des médias, l’armée et la police, le budget et l’organisation des élections elles même… et j’en oublie ! Quoiqu’il arrive c’est donc plus le Parti dominant -trois millions de membres- qui est engagé dans la bataille plutôt que le Président lui même et c’est la raison pour laquelle les divisions internes n’apparaissent pas au grand jour : il lui faut gagner pour que le système dont il se nourrit subsiste…

Joao Lourenco plonge son histoire personnelle dans ce qui reste de la guerre civile : un parti unique, ex communiste et qui a gardé les structures et l’arrogance d’un parti léniniste. Même s’il est exact que l’ancien ministre de la Défense qui a couvert les massacres de la Toussaint a donné des gages à la démocratisation du régime il n’en reste pas moins qu’il traine derrière lui les abus de la dictature que fut le régime précédent et dont il a été lui aussi un des rares bénéficiaires.

A l’inverse, l’opposition, essentiellement représentée par l’UNITA, a su quitter l’image qu’elle s’était forgée pendant la guerre civile. Ceux qui s’inscrivait dans l’histoire des maquis ont fait savoir quelques semaines avant le début de la campagne qu’il ne se représenterait pas. Ils ont laissé la place à un métis de 60 ans qui a du renoncer à sa nationalité portugaise pour prendre la tête du parti. Adalberto Costa Junior, ACJ pour ses partisans, s’est révélé être un personnage charismatique drainant  dans tout le pays une foule d’opposants qui dépasse très largement les régions traditionnellement acquises à l’UNITA et surtout un groupe remarquable de jeunes qui n’ont pas connu directement la guerre civile mais en ont éprouvé les effets.

Comme on l’a vu la partie n’est pourtant pas jouée compte tenu de l’avantage colossal du parti au pouvoir qui capte à son unique profit les avantages auxquels il n’a en aucun cas envie de renoncer : emprisonnement de militants de l’opposition, utilisation de la police, intimidation des journalistes.

On assiste à une forte mobilisation de la société civile représentée essentiellement par les ONG et les rappeurs.

L’une des personnalités emblématiques chez les jeunes, la rappeur Luaty  Beirao est monté au créneau. Arrêté à plusieurs reprises ces années précédentes pour l’organisation de manifestations de rue à Luanda il avait opté officiellement pour le silence pour laisser un peu de temps au nouveau Président. Le même critique désormais la « manipulation du cerveau des Angolais  par la presse publique financée par l’État, pat le seul quotidien du pays, par le réseau de radio le plus étendu et par le monopole de la télévision ! ».

« Le cloisonnement de l’État, l’absence de pluralisme, la répartition inégale des richesse, continue à caractériser notre société. » « J’espère que nous avons atteint le moment du renouveau. Il serai bon que le MPLA fasse l’expérience de l’opposition, cela pourrait être bon pour le pays. »

Le MPLA, près de cinquante ans après son accession au pouvoirn n’est pas vraiment convaincu, hélas, que l’heure est venue de l’alternance