« Vivre l’islam » en France sans interférence avec les clans algériens

Voici la lettre ouverte adressée par Chérif Lounès à Hafiz Chams Eddine, président de l'Association "Vivre l'Islam", l'émission "du dimanche matin diffusée sur la chaîne publique France2

Les terribles moments que nous vivons avec de nouveau la mort qui sème la désolation cette fois-ci à Nice après Paris rend bien tristes les français très en colère en cette période estivale. La folie meurtrière de ce suicidaire psychopathe « maghrébin », établi récemment en France, qui a frappé lors de ce 14 juillet est inqualifiable. Tout comme les précédents attentats en France, elle jette l’opprobre sur les citoyens musulmans et l’islam désignés fort injustement sur les réseaux sociaux comme responsables de ces dérives.
Et que fait l’émission « Islam » diffusée sur France 2 et dont vous êtes à la tête depuis près de 15 ans? Rien !
Effectivement, en ce dimanche qui suit ce terrible événement dû à un tueur qualifié de « radicalisé très rapidement », il aurait été opportun d’ouvrir exceptionnellement l’émission sur un éclaircissement, un débat explicatif et une marque réelle de solidarité avec les victimes,…etc. Mais n’étant ni inspiré ni à la hauteur, vous avez préféré maintenir la diffusion programmée d’un entretien sur la vie d’un musulman enseignant aux USA. Ceci prouve votre déconnexion de la réalité de ce qui se passe sur le terrain.
Si l’enregistrement diffusé sur un intellectuel musulman au parcours remarquable est louable, rien n’empêchait de le déprogrammer pour coller à l’actualité et consacrer l’émission de ce dimanche à expliquer que le culte religieux de l’islam n’a rien à voir ni de près ni de loin avec ces actes assassins tintés de revendications prétendument religieuses mais qui ne sont que le jeu d’extrémistes basés à l’étranger.
Une émission sous influence
Il semble pourtant que vous aviez déjà déprogrammé une émission enregistrée le dimanche 15 mai 2016 au profit d’un reportage de votre ami Djelloul Beghoura réalisé à Alger et qui donnait la parole à d’anciens responsables des services secrets algériens dans la lutte interne des clans et du renseignement qui se déroule ces derniers temps en Algérie. On a l’impression que ce sujet vous préoccupe et il est à espérer que l’émission n’est pas sous l’influence de ces officines.
De plus, non seulement ces questions autour du pouvoir algérien n’intéressent absolument pas les téléspectateurs musulmans et n’ont rien à voir avec le culte religieux que vous êtes sensé diffuser mais, bien pire, elles portent atteinte à la laïcité et au cahier des charges de la chaîne publique qui ne sont pas respectés dans ce cas. Peut être que la direction de France Télévision et le CSA n’ont pas encore vu ce reportage.
Il est un fait que depuis votre nomination en 2002 à la tête de l’association « vivre l’islam » et alors qu’en France l’opinion publique est de plus en plus déconcertée et désemparée suite à une profonde méconnaissance de l’islam colportée dans certains medias et réseaux sociaux et dont elle a peur, l’émission « islam » sur la chaîne publique France 2 continue à diffuser des conciliabules déconnectés et rarement en lien avec le champ religieux qui l’interroge.
Cette émission dominicale que vous présidez sans partage et sans discontinuité depuis de trop longues années ne peut se poursuivre dans l’axe que vous lui avez fixé, coupé de la réalité du quotidien et des pratiques religieuses des musulmans auxquels elle est sensée s’adresser bien qu’elle soit aussi orientée vers tout public quelle que soit sa croyance, religieuse ou non.
D’autre part, les spectateurs musulmans concernés, car ce créneau horaire leur est réservé, n’ont aucune connaissance du fonctionnement de l’association de statuts Loi 1901 que vous dirigez sans concertation et sans élections.
Aucun rapport moral d’activité de cette émission n’est porté à la connaissance de ce public spécifique ni aucun bilan comptable alors que vous percevez une contribution financière de la part de l’Etat qui vous alloue un budget proportionnellement au nombre des musulmans de France.  
Non seulement les statuts de la Loi de 1901 exigent la transparence et la consultation mais le Coran en fait une obligation:«ceux qui délibèrent entre eux au sujet de leurs affaires » (chapitre 42 verset 38)*.
Un manque de transparence
Il fut un temps, au moins 10 ans avant votre arrivée à la tête de cette émission mission, où on avait des informations sur le fonctionnement de cette association chargée de l’émission islamique du dimanche matin avant qu’elle ne change de nom.
Voici ci-dessous une convocation à l’Assemblée Générale du 27/01/1992 signée par feu M.Bentabed, paix à son âme.
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Mais à l’époque vous n’étiez installé que depuis peu en France, et il semble que vous ne vous intéressiez guère aux choses de l’islam.
Du moins pas à cette émission qui existe depuis 1983 grâce à de hautes personnalités aujourd’hui disparues.
La proximité avec le pouvoir algérien
A cette date vous exerciez en Algérie en proximité du pouvoir en place que vous servez toujours d’ailleurs.
En effet, on a appris que vous seriez « conseil juridique » de l’ambassade d’Algerie à Paris et que vous traiteriez des affaires de ce pays.
Pire, selon des informations publiées dans la presse, vous seriez en lien avec les services spéciaux algériens, l’ex DRS, et que vous auriez soutenu la quatrième candidature de M.Bouteflika gravement malade.
Voici un extrait d’un article en lien ci-dessus :
« ..maitre Chemseddine Hafiz qui venait de participer à une émission sur LCP en tant que «coordonnateur des comités de soutien à Boutéflika en France». 
Rien que vos engagements politiques spécifiques liés à un pays étranger vous disqualifient pour occuper un
quelconque poste de « représentant » de la communauté musulmane française dans son ensemble et dans sa diversité.
Excusez du peu!
Nonobstant et alors que la responsabilité de cette émission « islam » sur France2 demande une disponibilité à plein temps, vous vous permettez de cumuler et d’exercer abusivement des fonctions représentatives des musulmans en France comme celui du poste de vice président du Cfcm, dont vous êtes membre depuis de trop nombreuses années, sans oublier un rôle joué à la Mosquee de Paris et à toutes ces activités s’ajoutent votre profession d’avocat et vos liens d’affaires avec l’ambassade d’Algérie tout en animant la Commission Internationale du Barreau de Paris « Paris-Alger », on dit que vous êtes aussi « Expert/Arbitre » à la Chambre de commerce franco-arabe, membre fondateur et Président d’honneur de l’Association Euro-Maghreb des avocats de droit des affaires,…etc.
Sans parler de vos nombreux déplacements à l’étranger dans le cadre de vos affaires ce qui vous rend peu disponible.
Or, indéniablement, en plus d’une situation sociale troublée en France, il est exigé une présence permanente au service de la représentativité musulmane que ce soit à l’émission « islam » ou au Cfcm.
Et comme si toutes ces fonctions ne vous suffisaient pas vous avez eu le temps et le loisir de créer récemment avec d’autres avocats dits « descendants d’Abraham » une association « Fraternité du Barreau de Paris » dont bien sûr vous en avez été nommé « président ». Apparement, ce titre vous obnubile là où vous passer.
Par contre, au Cfcm, qui va d’échec en échec, vous n’avez pas pu être le « président » suite à l’opposition de membres marocains qui vous reprocheraient, avec justesse, votre implication en tant qu’avocat du Polisario dans le conflit du Sahara Occidental. Voici ce qu’écrivait sur ce différent en juin 2013 un site d’information:
« Or, sa candidature est contestée par le Rassemblement des musulmans de France (RMF), proche du Maroc, parce que Me Hafiz est l’avocat du Front Polisario, qui lutte pour l’indépendance du Sahara occidental, annexé par Rabat en 1975. »
Pour toutes les raisons évoquées ci-dessus, il ne serait pas anormal que l’on s’interroge si dans les nombreuses fonctions que vous occupez il n y aurait pas parfois confusion d’intérêts.
Votre statut professionnel lié à votre pays l’Algérie, vos activités politiques algériennes et vos liens supposés avec les services de renseignements algériens ainsi que votre soutien affiché publiquement en faveur de l’élection de M.Bouteflika pour un quatrième mandat vous mettent en opposition totale avec la volonté des autorités françaises d’un « islam de France » indépendant de toute influence étrangère.
 Et ce, juste au moment où les musulmans de France déploient des efforts considérables pour assurer et rassurer les autres concitoyens en affirmant qu’ils partagent avec eux la même appartenance exclusive aux seules valeurs de la Nation française.
 Finalement, vous n’êtes pas un « représentant du culte » mais celui d’un pays étranger dont vous épousez la politique du pouvoir étant un fervent défenseur du président actuel M.Bouteflika dont vous avez contribué à sa réélection.
Il est, par conséquent, important de s’interroger sur votre légitimité à « représenter le culte musulman » car vos engagements politiques de surcroît avec un pays étranger ne  respectent pas les dispositions de la loi du 30 septembre 1986 sur l’audiovisuel qui stipule que « les émissions religieuses sont réalisées sous la responsabilité des représentants de ces cultes ». 
Dans ces conditions, sauf à les démentir avec preuves à l’appui, vous êtes incontestablement un acteur politique algérien compromis ce qui ne vous permet absolument pas d’être un « représentant du culte ».
Enfin, bien que vous ayez vécu longtemps en Algérie et que vous êtes issu d’une famille de combattants révolutionnaires partisans de l’indépendance, on a appris que non seulement vous avez très rapidement « réintégré » la nationalité française mais que vous avez reçu des décorations. Ces mêmes décorations pour lesquelles nombre de français musulmans algériens fidèles à la France le payèrent de leur vie de 1954 à 1962.
Il a été écrit à ce sujet dans un article qui vous a été consacré:
« En 1995, il obtient sa réintégration dans la nationalité française. Lorsque Nicolas Sarkozy le fait chevalier de l’ordre national du Mérite, il évoque son frère mort pour l’indépendance : « S’il avait été en vie, mon frère serait à mes côtés. Il aurait compris le cheminement intellectuel qui fait que je suis à la fois algérien et français.»
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Vous arborez aussi la Légion d’honneur, dont on ne sait pas à quel titre on vous l’a attribuée, alors qu’encore aujourd’hui beaucoup d’anciens harkis rescapés des massacres de 1962 et qui ont servi la France sous l’uniforme n’ont toujours pas obtenu ces décorations.
Si ces différentes distinctions vous ont été octroyées en raison de vos implications dans les associations qu’on voudrait représentatives du culte musulman, il ne semble pas acceptable d’utiliser la religion à cette fin.
Au vu de ce qui précède concernant vos engagements politiques et votre action en faveur de la 4ème élection du président algérien Bouteflika, il est clair que vous usurpez le poste de président de l’émission publique « islam » sur France 2 en étant à la tête de l’association « vivre l’islam ».
Il est temps d’en DEMISSIONNER et de permettre une alternance visible et de laisser cette responsabilité à d’autres compétences assumées par des personnes représentantes du culte musulman respectueuses de la laïcité qui seraient non affilées à un pouvoir étranger.
Votre remplacement donnerait une impulsion dynamique pour l’élaboration d’un programme religieux islamique de grande qualité spirituelle tant attendu.
Dans cette nouvelle perspective, il pourrait être fait appel dans un premier temps, par exemple, pour siéger au sein d’un nouveau conseil d’administration aux représentants des différents medias musulmans français qui y œuvreraient ensemble dans la transparence à la gestion démocratique et créative de cette émission musulmane. Cette dernière jouerait alors un rôle de référence religieuse indiscutable ce qui éviterait à certains jeunes, qu’on dit radicalisés, d’errer sur des sites internet douteux.
La nouvelle équipe de diffusion, qui accepterait le principe de l’alternance et celui d’un mandat limité des responsables, se rapprocherait des pratiquants sur le terrain ce qui ne peut que contribuer à éviter les discours extrémistes qu’on entend ici ou là colportés par des hurluberlus incultes à l’accoutrement parfois inadapté et propageant souvent des interprétations farfelues.
Ce changement serait dans l’intérêt de la communauté musulmane, de la société et de la France.
Nous sommes, en effet, dans une phase cruciale et dernièrement le patron de la DGSI entendu au mois de mai 2016 par la commission parlementaire sur les attentats de 2015, a dit:

«Je suis en revanche beaucoup plus inquiet de la radicalisation de la société et du mouvement de fond qui l’entraîne, poursuit-il.(…) Encore un ou deux attentats et cette confrontation adviendra. Il nous appartient donc d’anticiper et de bloquer tous ces groupes qui voudraient, à un moment ou à un autre, déclencher des affrontements intercommunautaires.»

M.Patrick Calvar a aussi évoqué: «une confrontation entre l’ultra droite et le monde musulman – pas les islamistes mais bien le monde musulman ». 

Tout ceci paraît bien inquiétant et le renouvellement par du sang neuf de l’ensemble des acteurs très anciens au sein de cette émission « islam » serait salutaire et urgent!

Comme l’enseigne le Coran: « Dieu ne modifie rien en un peuple, avant que celui-ci ne change ce qui est en lui » (chapitre 13 verset 11)*.

M. Chérif Lounès, le 17/7/2016
Ancien membre du CA de l’association « Connaître l’Islam » qui a été remplacée sans concertation ni convocation de ses adhérents par l’Association « Vivre l’Islam ».
*Coran, traduction Denise Masson Édition folio 1967