Gabon, Ali Bongo conscient, mais privé de parole

Le président Ali Bongo, qui a été victime, le 24 octobre, d’un très sévère AVC en Arabie Saoudite, est sorti de son coma, certes conscient mais toujours privé de parole, indique-t-on à Mondafrique de très bonne source.

D’après une source bien informée de Mondafrique, l’état de santé du président gabonais, Ali Bongo, hospitalisé en Arabie Saoudite depuis son AVC, s’est amélioré, même si sa capacité à retrouver la parole et de la mobilité reste incertaine.  » S’il avait eu cet accident de santé au Gabon, il ne serait plus de ce monde aujourd’hui. Sa chance, si on peut dire, a été d’avoir été pris en charge très vite par un très bon hôpital américain à Riyad. Il a été drainé dans de bonnes conditions et plongé dans un coma artificiel dont il vient de sortir. Aujourd’hui, il donne des signes qu’il reconnait ses proches et des musiques qu’il aime. Mais il ne parle ni ne se déplace. On ignore, à ce stade, ses capacités de récupération ».

Le souverain marocain Mohamed VI, très proche d’Ali Bongo, a proposé au président gabonais de venir dans les semaines à venir  se reposer au Maroc. Plusieurs membres de la garde rapproché du Roi ont gagné l’Arabie saoudite pour sécuriser le chef d’état gabonais en ces périodes troublées que connait la région du Golfe

Le contournement du Sénat

Sous le règne d’Ali Bongo, la moindre décision passe par la Présidence. En l’absence du chef incontesté, le pays est paralysé. Même les députés élus au mois d’octobre dernier n’ont pas vu acter leur élection dans le délai prévu et le gouvernement n’a toujours pas démissionné, comme il aurait du le faire. Le Gabon institutionnel se trouve en état d’apesanteur.

Pour l’instant, la vacance du pouvoir n’est pas déclarée. Le clan présidentiel cherche à éviter le scénario de 2009, lorsque, lors du décès d’Omar Bongo, l’intérim avait été assuré par la présidente du Sénat, Rose Francine Rogombe, décédée depuis. Cette dernière avait tenu la barque gouvernementale d’une main ferme, préparé les nouvelles élections de façon relativement neutre et obligé Ali à démissionner de ses fonctions de ministre de la Défense avant de se présenter comme candidat. .

Aujourd’hui, le clan Bongo ne veut pas reproduire le même scénario. D’autant que le Sénat est aujourd’hui présidé par une femme aux ramifications jugées menaçantes. Laquelle dispose en effet de relations familiales, via son fils, avec Jean Ping, le principal opposant. De plus, la fille de cette personnalité gabonaise est mariée au fils du président congolais Sassou, fâché avec le clan Bongo et prêt à déstabiliser le régime.

Le but des amis d’Ali Bongo serait de faire démissionner la présidente du Sénat pour qu’elle soit remplacée par le vice président, un certain Anzanbe, allié plus sûr.

Gagner du temps

Du coup, la présidente du Conseil Constitutionnelle et ancienne maitresse d’Omar Bongo dont elle a eu deux enfants, Marie Madeleine Mborantsuo, a modifié unilatéralement le texte fondateur, alors que seule une majorité des deux chambres pouvait le faire. Ainsi le vice président gabonais, Pierre Claver Maganga Moussavou, sorti de sa naphtaline par les événements dramatiques de ces derniers jours, peut désormais convoquer le conseil des ministres. Les fonctions de vice président existaient dans les textes, mais sans titulaire pendant le premier septennat d’Ali Bongo. Le vice président avait été nommé ensuite dans le seul but de trouver une sinécure pour l’opposant rallié qu’est Pierre Claver Magana Moussavou.

Pour autant, les nouveaux dirigeants n’avaient pas jugé utile d’envoyer le « vide » président lors de la commémoration du 11 novembre à Paris pour représenter le Gabon. La décision de l’introniser a été prise, en catastrophe, dans la nuit du 14 au 15 novembre. Et dans le seul but de gagner du temps sur la reconnaissance inévitable d’une vacance des institutions.

La stratégie du pourrissement

Le principal opposant, Jean Ping, se garde bien d’intervenir.Pour l’instant, il ne bouge pas, attend, comme il le fait depuis la dernière élection présidentielle dont seule la fraude l’a empêché de sortir vainqueur  « Il attend son heure, explique un proche, il avait la certitude  qu’Ali, malade, ne suivait aucun traitement et aurait un jour ou l’autre un grave problème de santé ».

Toutes sortes de rumeurs circulent au Gabon, où les communications téléphoniques passent à nouveau très mal. Le système de brouillage qui a été vendu à l’Egypte de Sissi et à la Libye de Kadhafi par une société française, ancienne filiale de Bull, sévit également au Gabon.

Le Jeudi 15 novembre dans la soirée, cent cinquante militaires français sont arrivés à Libreville. Ne serait ce que pour protéger les installations de Total à Port-Gentil. Mais sans autre appréciation, pour l’instant, des autorités françaises.

La stratégie du pourrissement est à l’oeuvre à Paris comme à Libreville. Pour combien de temps?

 

 

 

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Nicolas Beau
Ancien du Monde, de Libération et du Canard Enchainé, Nicolas Beau a été directeur de la rédaction de Bakchich. Il est professeur associé à l'Institut Maghreb (Paris 8) et l'auteur de plusieurs livres: "Les beurgeois de la République" (Le Seuil) "La maison Pasqua"(Plon), "BHL, une imposture française" (Les Arènes), "Le vilain petit Qatar" (Fayard avec Jacques Marie Bourget), "La régente de Carthage" (La Découverte, avec Catherine Graciet) et "Notre ami Ben Ali" (La Découverte, avec Jean Pierre Tuquoi)

2 Commentaires

  1. La partie premiere de l’article ne m’etonne guerre. c’est la routine dans les pays africains francophones. on annonce une democratie mais en fait c’est le regime de la famille mafia qui prime. Pour la derniere partie, ou la France envoie des militaires pour proteger Total (une compagnie privee) m’interpelle. 1, comment les francais acceptent que l’etat qui puisse de leur impot pour payer les services de protection pour une societe privee. 2 – ceci montre encore que les ex colonies francaises n’ont pas gagne leur independance encore. Leur regime est sous la main mise militaire de Paris. Donc la prochaine fois quand la france veut parler de democratie, merci de ne pas citer votre nom comme defendeur de la democratie au monde

  2. Les gabonais.. Contents que leur président ai eu son AVC dans un autre pays, car au Gabon il serait mort…. Combien de Gabonais meurent d’un AVC au Gabon…. justement parce que Bongo a été incapable de construire de bons hôpitaux dans le pays qu’il dirige? Il faudrait interdire aux dirigeant africains d’aller se faire soigner hors de leur pays. Comme ça peut être qu’il mettront l’argent dans le développement au lieu de s’acheter des châteaux en France !

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