De nouvelles révélations sur Michel Tomi et l’avion d’IBK

Interrogé par le vérificateur général du Mali qui enquête sur les conditions d’achat de l’avion d’IBK, l’ancien ministre de la défense malien, Soumeylou Boubèye Maïga apporte de nouveaux détails sur le rôle joué par le parrain corse Michel Tomi dans la transaction. Il souligne notamment la mise en place d’une société écran immatriculée au îles vierges britanniques spécialement montée pour l’occasion. Par ailleurs, il indique que la société de Tomi Afrijet, avait déjà loué un autre avion de type Bombardier BD-700 Global Express pour un coût de 500 000 euros à la présidence malienne.

Comme prévu, le bureau du vérificateur général du Mali a rendu, le 30 octobre, son rapport destiné à faire la lumière sur les conditions d’acquisition de l’avion d’IBK et les contrats d’équipements militaires par l’Etat du Mali. Deux dossiers sensibles impliquant d’opaques montages financiers qui ont valu au pays d’être épinglés  par le FMI.

Abus de procédure

Long de 241 pages, le rapport dévoile le contenu des rencontres entre le vérificateur et l’ancien ministre de la défense malien Soumeylou Boubèye Maïga, signataire à l’époque des contrats relatifs à l’avion et au matériel militaire. Début octobre, l’ex ministre avait été placé en garde à vue lors d’un séjour en France et entendu par la brigade financière de Nanterre, au nord de Paris.

Auditionné précédemment par le vérificateur général en juin 2014, l’ancien ministre fait une série de révélations, notamment sur le rôle du parrain corse Michel Tomi dans l’achat de l’avion du président malien.

Selon lui, « l’acquisition de l’aéronef  n’a pas fait l’objet d’une détermination de besoin. Il s’agissait d’une décision de souveraineté et le ministre de la défense n’a servi que de couverture afin de faire passer ladite acquisition sous l’empire du chapitre 8 du Code des marchés publics ». Cet article permet en effet de ne pas respecter certaines exigences de transparence pour des cas jugés sensibles comme dans le domaine de la défense. Son utilisation jugée abusive par le FMI a d’ailleurs fait l’objet d’une demande de modification ordonnée par le Fonds.

Soumeylou Boubèye Maïga a ensuite pointé le rôle de Moustapha Ben Barka, le ministre chargé de la promotion de l’investissement et de l’initiative privée. En tant que « principal négociateur du côté du gouvernement malien ». Mieux, l’ancien ministre de la défense a affirmé être disposé à « éclairer la lanterne de la mission de vérification en lui fournissant des explications ou autres documents permettant une bonne analyse de la procédure d’acquisition de l’aéronef. »

Moustapha Ben Barka avait été nommé au gouvernement par l’ancien premier ministre Oumar Tatam Ly. Ce dernier avait démissionné de son poste en avril 2014 après avoir pointé dans sa lettre de démission, une série de « dysfonctionnements » et « d’insuffisances dans la marche du gouvernement ». Grande famille fortunée d’origine marocaine, les Ben Barka sont bien connue dans les cercles politiques maliens. Moustapha n’est autre que le fils de Lamine et de Lala Ben Barka, la sœur de l’épouse du président IBK. Zeïd Ben Barka, le frère de Lamine, est, quant à lui, chargé d’affréter les avions pour les voyages présidentiels d’IBK.

Akira investment, la société écran de Michel Tomi

Plus loin, Boubèye Maïga révèle que Marc Gaffajoli, le représentant de la société « Sky Colour » mandatée par l’Etat malien et qui a conclu un contrat de gré à gré avec la société « Akira investment » domiciliée aux îles vierges britanniques, a joué plusieurs rôles dans le processus d’acquisition de l’aéronef. Il aurait notamment « effectué l’audit de l’ancien avion présidentiel et a aussi servi d’intermédiaire entre le gouvernement et le vendeur du nouvel avion. » D’après nos informations, l’avion aurait appartenu à un couple d’américains à qui l’argent de la vente n’a jamais été versé directement. C’est Marc Gaffajoli qui a cosigné le contrat de cession acquisition de l’aéronef et non le représentant de la société Akira investment avec qui l’Etat malien a signé le contrat en février 2014.

Or, selon Boubèye Maïga, Marc Gaffajoli n’est autre que le représentant de Michel Tomi, propriétaire de la société Afrijet. A la tête d’un empire de Casino et de PMU en Afrique, Michel Tomi, ancien lieutenant de Charles Pasqua longtemps protégé par les services français, est très proche d’IBK. En juin dernier, il a été mis en examen en France pour corruption d’agent public étranger, faux et usage de faux, abus de confiance, recel d’abus de bien social, complicité d’obtention indue d’un document administratif et travail dissimulé.

Une transaction à 7,4 milliards de CFA

Selon les révélations de Boubèye Maïga, la société de Tomi, Afrijet, n’en serait pas à son premier fait d’armes. L’entrepreise avait déjà loué un avion de type « Bombardier BD-700 Global Express pour un coût de 500 000 euros » à la présidence. Le ministre de la défense précise qu’Akira Investment est « une société écran qui a été créée uniquement pour cette opération ». La société Akira investment représentée par un certain Kerry Wright, est immatriculée aux îles vierges britanniques. Estimant que les références bancaires de ladite société n’étaient pas fiables, la Banque de développement du Mali a préféré effectuer le virement des 17,5 milliards servant à l’achat vers le compte du Trésor Public.

Au total affirme l’ancien ministre de la défense, le montant de la transaction serait de 7. 470 milliards de francs CFA (soit 11 millions, et 354 mille euros) cela expliquant « la récente immobilisation de l’appareil en Suisse, à la demande du fisc américain. » A cette somme, il faut ajouter les frais d’équipage, l’Etat malien louant « les services d’un équipage étranger à chaque déplacement de l’avion » précise Boubèye Maïga.