Jean Yves Le Drian au Liban: une visite pour rien

Le ministre français des Affaires étrangères, Jean Yves Le Drian,  a effectué une visite éclair à Beyrouth en menaçant de fermer le territoire français à une quarantaine de personnalités libanaises si « l’obstruction politique » à la formation d’un gouvernement persistait.   

Un article de Michel Touma

Est-ce l’échec de l’initiative d’Emmanuel Macron pour faciliter la formation d’un gouvernement viable au Liban? Le patron du Quai d’Orsay, Jean-Yves Le Drian, a quitté Beyrouth jeudi 6 mai après avoir tenu une série de réunions qui n’ont débouché sur rien. « Il est urgent de sortir de l’impasse politique dans laquelle se trouve le pays (…), a souligné le chef de la diplomatie française. Jusqu’à ce jour, je constate que les acteurs politiques n’ont pas encore assumé leurs responsabilités». Les dirigeants libanais ne parviennent toujours pas en effet à former un nouveau gouvernement après la démission du Cabinet de Hassan Diab le 10 août dernier à la suite de la double explosion du 4 août qui avait détruit le port de Beyrouth et dévasté plusieurs quartiers de la capitale.  

Arrivé mercredi soir au Liban, M. Le Drian a tenu trois brèves réunions de moins d’une demi-heure chacune avec le président de la République, Michel Aoun, le président de l’Assemblée nationale Nabih Berry et le Premier ministre désigné Saad Hariri qu’il a informés de la décision de la France d’adopter des « mesures nationales » restrictives à l’encontre des responsables qui font obstruction à la formation d’un nouveau gouvernement. Lesquels, au nombre d’une quarantaine, se verront interdire l’accès au territoire français. « Ce n’est qu’un début », a précisé M. Le Drian.

Réunion avec des opposants

Comme pour bien souligner que la France a fini par désespérer des responsables politiques qui détiennent véritablement les rênes du pouvoir sur la scène libanaise, le chef de la diplomatie française a tenu une longue réunion de près de deux heures à la résidence de l’ambassadeur de France avec des représentants de certaines formations de l’opposition, dont trois anciens députés. Il a écouté leur perception de la situation actuelle dans le pays et les a exhortés à unifier leurs rangs autour d’un programme commun dans la perspective des élections législatives qui devraient avoir lieu en mai 2022.    

Cette réunion a été critiquée par certains milieux locaux du fait que le chef du Quoi d’Orsay s’est montré très sélectif au niveau du choix des mouvements d’opposition qu’il a rencontrés, écartant de ses concertations plusieurs formations et courants de l’opposition dont l’influence et l’action sur la scène libanaise ne sauraient être contestées. M. Le Drian a paru ainsi s’être « laissé entraîner dans les dédales de la petite politique libanaise en choisissant ses interlocuteurs sur des bases qui ne sont pas très claires », a souligné une source de l’opposition qui s’interroge en outre sur les raisons pour lesquelles le ministre français n’a pas rencontré le patriarche maronite Béchara Raï « qui prône pourtant la seule solution radicale et durable à la crise libanaise, à savoir la neutralité du Liban appuyée par un très large éventail de l’opposition et des factions politiques locales ».

Aide aux écoles chrétiennes

Avant son départ de Beyrouth, M. Le Drian a rendu publique une déclaration écrite dans laquelle il a réaffirmé que « la France reste et restera mobilisée sur la durée en soutien à la population libanaise ». Il a indiqué dans ce cadre que la France a consacré récemment un montant de 85 millions d’euros pour soutenir quatre domaines prioritaires : la reconstruction et la préservation du patrimoine ; l’accès à l’alimentation ; le soutien au secteur médical et sanitaire ; le soutien aux écoles et au secteur éducatif.

Le chef du Quai d’Orsay a précisé qu’en 2020, la France a accordé une aide à « plus de 180 établissements et environ 90 000 élèves ». « Nous avons décidé de préserver et de renforcer le fonds pour les écoles d’Orient qui devrait apporter de nouveau cette année une aide de près de 2 millions d’euros aux écoles chrétiennes francophones du Liban », a ajouté M. Le Drian.