Mauritanie, coup de balai au sein des services de sécurité

Voici quelques semaines, le président mauritanien Mohamed Ould Abdel Aziz a brutalement limogé le colonel Cheikh Ould Kotob, le chef du Basep, le bataillon d’un millier de militaires qui assure en Mauritanie la sécurité présidentielle. L’information n’est parue nulle part tant le fonctionnement de ce corps d’élite, largement corrompu, reste totalement secret. D’autant plus que le président mauritanien est l’ancien patron du Basep et couve ce bataillon de fidèles avec une attention toute particulière

Grogne dans les rangs

Ce limogeage brutal s’est accompagné de plusieurs changements de titulalres dans plusieurs régions militaires. Des sources bien informées à Nouakchott estiment que ces changements témoignent d’une certaine « fébrilité » du pouvoir face à la grogne des militaires de rang intermédiaire. Autant en effet les hauts gradés partagent avec le clan présidentiel d’incontestables privilèges financiers qui les tiennent éloignés de toute contestation ouverte, autant les hommes de troupe et les officiers de rang moyen subissent, comme l’ensemble de la population, les effets de la crise financière générale.

Autre signe inquiétant pour le pouvoir mauritanien, une partie de l’armée semble s’être opposée au président Aziz lors de la réforme constitutionnelle de l’été denier qui modifiait notamment le drapeau national en le barrant de deux bandes rouges en souvenir du sant versé contre le colonisateur français. Dans plusieurs bureaux de vote proches des garnisons militaires, le non l’a largement emporté lors du référendum qui eut lieu au mois d’aout dernier sur les modifications de la constitution. « La situation dans l’armée mauritanienne inquiète la présidence », explique un diplomate occidental.

Dans un pays muselé sur le plan politique et dont l’histoire est jonchée de coups d’état, l’armée est certainement un des principaux leviers qui pourraient, demain, rendre l’alternance possible.

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Nicolas Beau
Ancien du Monde, de Libération et du Canard Enchainé, Nicolas Beau a été directeur de la rédaction de Bakchich. Il est professeur associé à l'Institut Maghreb (Paris 8) et l'auteur de plusieurs livres: "Les beurgeois de la République" (Le Seuil) "La maison Pasqua"(Plon), "BHL, une imposture française" (Les Arènes), "Le vilain petit Qatar" (Fayard avec Jacques Marie Bourget), "La régente de Carthage" (La Découverte, avec Catherine Graciet) et "Notre ami Ben Ali" (La Découverte, avec Jean Pierre Tuquoi)