Au nord Mali, « chacun pour soi »

Déjà tentaculaire, la mosaïque des groupes armés qui composent le paysage de la rébellion au Nord Mali s’agrandit. A travers un communiqué diffusé le 10 octobre, des membres de la communauté touarègue « Kel Ansar » dont le territoire s’étend de la frontière mauritanienne à la région de Gao, ont annoncé la création d’un nouveau mouvement armé, le « Congrès pour la Justice dans l’Azawad » (CJA) censé veiller à l’application des accords de paix signés avec l’Etat malien en juin 2015 à Bamako. « Tout en réaffirmant son adhésion au processus d’Alger, la communauté Kel Ansar et ses alliés décident de la création d’un mouvement politico-armé dénommé « Congrès pour la Justice dans l’Azawad, pour garantir la viabilité et la fiabilité de l’application de l’accord ».

A sa tête, l’ancien ministre de la fonction publique et ex cadre du MNLA, Hama Ag Mahmoud, avait claqué la porte du mouvement en décembre 2012 suite à l’alliance de circonstance nouée avec groupe terroriste Ansar Dine d’Iyag Ag Ghali pour lancer une offensive contre plusieurs camps de l’armée malienne dans le nord du pays. C’est pourtant un ancien du HCUA – un groupe qui compte un grand nombre d’ex membres d’Ansar Dine –  Abass ag mohamed Ahmad, qui a été désigné chef d’Etat-Major militaire du CJA.

La création d’un énième groupe armé au Nord Mali reflète la tendance à l’émiettement de la rébellion touarègue et la perte d’influence du MNLA et de la CMA de moins en moins capable d’offrir une ligne directrice aux nombreuses revendications. « Aujourd’hui chaque tribu doit prendre en main son destin » résume, amer, un touareg. « C’est même chacun pour soi » affirme un autre.

Début septembre, l’ex cofondateur du MNLA, Moussa Ag Acharatoumane, avait pointé les nombreux déséquilibres au coeur du mouvement et de la CMA critiquée pour son incapacité à prendre en compte les desiderata d’autres tribus que celles des Ifoghas qui contrôlent l’essentiel de la région de Kidal. Son divorce de la CMA a été scellé par la création d’un nouveau mouvement : « le Mouvement pour le Salut de l’Azawad ».

Par ailleurs, fin avril dernier, le MNLA perdait une figure emblématique : son porte parole en France, Moussa Ag Assarid, qui a dénoncé l’abandon « des idéaux et objectifs du Mnla » par ses dirigeants.

Ces récentes scissions s’ajoutent à d’autres plus anciennes telles que celle effectuée par le colonel Hassan Ag Mehdi, alias « Jimmy le rebelle », qui a fondé un mouvement baptisé le Front populaire de l’Azawad en décembre 2012 réunissant de nombreux membres de la tribu Chamanamass présents dans la région de Gao.