Gabon, des inquiétudes sur le sort de Brice Laccruche

Une photo de Brice Laccruche Alihanga a fui depuis quelques jours sur internet et interroge sur la santé et les conditions de détention de l’ancien bras droit du chef de l’exécutif gabonais Ali Bongo.

Par Jocksy Andrew Ondo-Louemba

La photo a fait parler d’elle sur Internet. On y voit Brice Laccruche Alihangatorse-nu, cheveux ébouriffés, très amaigri, visage marqué, regard presque hagard. L’ancien Directeur de cabinet d’Ali Bongo qui avait des  prérogatives très étendues est actuellement détenu à la Prison centrale de Libreville la capitale du Gabon, une véritable « prison bidonville » communément appelé par les Gabonais « Sans famille ».

À l’isolement depuis 4 ans

Arrêté le 2 décembre 2019 dans le cadre d’une véritable opération de démantèlement de son équipe, Brice Laccruche Alihanga a été incarcéré le 13 décembre 2019 et placé à l’isolement dans des conditions pour le moins atroces (chaleur intense, insalubrité, très faible luminosité…). Même les gardes qui se relaient pour le surveiller ont des consignes très strictes et doivent notamment  limiter les contacts avec ce prisonnier particulier. Aujourd’hui, avec cette photo, l’état de santé réel de Brice Laccruche Alihanga interroge, mieux interpelle. 

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Sauveteur d’Ali Bongo

Le 24 octobre 2018, Ali Bongo est victime d’un Accident Vasculaire Cérébral (AVC) à Ryad en Arabie Saoudite où il s’était rendu pour participer au « Davos du désert ». Le porte-parole de la présidence Ike Ngouoni – actuellement en prison lui aussi  – parle d’une « fatigue sévère ». Le Gabon est en émoi et la situation rappelle deux précédents dans l’histoire du pays avec le premier président Léon Mba et son successeur Omar Bongo.

Pour « combler le vide », Brice Laccruche Alihanga entreprend une tournée politique dans tout le pays  pour « rassurer » que le régime tient. Devenu « le messager intime » d’Ali Bongo, il parcourt le Gabon pour porter « le message » d’Ali Bongo mais surtout pour  éviter que le régime  du « patron » se fissure et que certains tenants du pouvoir manifestent trop leurs ambitions. Et ça fonctionne.

La chute

De retour au Gabon, Ali Bongo est d’abord satisfait de ce si bon collaborateur qui a su contribuer au maintien de son régime en assurant l’intérim d’autant plus que Brice Lacruche Alihanga a organisé un grand meeting au stade de Nzeng Ayong à Libreville où Ali Bongo tout de blanc vetu accompagné de sa femme Sylvia Bongo déclare à des partisans rémunérés près de 10 euros « Je suis là et je resterai là ».

Mais très vite, il se raconte que « BLA » a voulu prendre le pouvoir et renverser Ali Bongo. Ali Bongo y croit et décide de se débarrasser de son « messager intime » et de l’envoyer en prison dans une ambiance de purge généralisée. 

Règlements de comptes, forcément.

Reste le motif. Si la presse parle de détournement de fonds, d’ « affaires » , l’un des motifs retenus contre Bla concerne sa nationalité. En effet, on lui reproche d’avoir des faux papiers gabonais alors qu’il a été directeur de cabinet d’Ali Bongo connu pour son obsession du renseignement. Ali Bongo l’ignorait -il? On peut dire que non. 

Commencée à grands coups de communication, 4 ans après, on peut se demander où en est l’enquête et les preuves avancées contre Brice Laccruche Alihanga. Des preuves, si elles existent et sont produites, qui ne manqueraient pas d’éclabousser Ali Bongo lui-même.

« Brice Laccruche Alihanga n’est pas un prisonnier d’opinion »

Interrogé sur le sujet lors de sa dernière visite à Paris par  Christophe Boisbouvier et Marc Perelman sur  RFI et France 24, Alain Claude Bilié By Nzé, l’actuel premier ministre du Gabon a indiqué que la justice gabonaise faisait son travail et contesté qu’on puisse considérer Brice laccruche Alihanga comme un prisonnier d’opinion : « Brice Laccruche Alihanga (…) n’est pas un prisonnier d’opinion, s’il l’était on saurait quelle est son opinion ».

Il est vrai que dans tout ce qu’il a fait, Brice Laccruche Alihanga s’est plutôt démené pour préserver le régime qui l’a élevé mais qui a fini par le dévorer.

On peut donc dire sur ce point que l’actuel premier ministre du Gabon a raison.