Le mauvais tour joué par le président Paul Kagame à Emmanuel Macron

Présenté comme un haut fait de la diplomatie française, la rencontre entre Paul Kagamé, le président du Rwanda et Félix Tshisékedi, le président de la République démocratique du Congo (RDC), à l’initiative d’Emmanuel Macron, en septembre dernier à New York, n’a finalement servi à rien. Sans que Macron ait pu rappeler à l’ordre son homologue rwandais. 

Paul Kagame est un des rares chefs d’état africain pour lequel Emmanuel Macron a une véritable estime, voire de l’admiration

La mise en scène a été parfaitement réglée : à gauche sur la photo, le président rwandais Paul Kagamé, à droite le président de la République Démocratique du Congo (RDC) Félix Tshisékedi et au milieu des deux leur homologue français, Emmanuel Macron, tout sourire.

Voulue par Macron la rencontre organisée à New York, en marge de la 77 ème Assemblée générale des Nations unies, avait abouti à un accord rwando-congolais qui prévoyait la cessation immédiate des hostilités et le retrait des rebelles du M23 des positions qu’ils occupaient depuis octobre à l’intérieur du territoire congolais. 

L’accord de New York bafoué 

De retour chez lui à Kigali, le président rwandais s’est assis sur les engagements pris devant Macron à New York. En effet, il n’a fait aucun effort pour convaincre le M23 de se retirer de la RDC. Dans un rapport publié en juillet dernier, un groupe d’experts des Nations unies a assuré qu’il existait des preuves irréfutables de l’implication du Rwanda derrière le M 23. Les autorités congolaises, elles, vont plus loin en affirmant que Kigali continue de fournir du soutien logistique et de l’équipement aux rebelles du M23.

Si Paul Kagamé l’avait voulu, les rebelles se seraient immédiatement retirés de la RDC dès son retour de New York. Mais ce n’est pas tant l’attitude du président rwandais qui surprend que le silence total d’Emmanuel Macron et de la diplomatie française qui ont pourtant célébré la rencontre tripartite de New York. En initiant la rencontre et en la célébrant comme une victoire diplomatique, Macron se posait en garant du suivi des engagements pris en sa présence par Félix Tshisékedi et Paul Kagamé.

Macron fasciné par Kagamé

Le président français a finalement préféré ménager son homologue rwandais que d’assumer son rôle de garant de « l’accord de New York ». Ce qui ne surprend personne à Kinshasa et ailleurs. Macron a toujours nourri une fascination pour Kagamé. En prenant le risque de froisser une partie du lobby militaire et diplomatique, Emmanuel Macron est allé plus loin que n’importe quel autre chef d’Etat français pour arriver à la réconciliation totale entre la France et le Rwanda.

Kagamé aura obtenu en mars 2021 de lui le Rapport Duclert qui souligne la responsabilité de la France dans le génocide de 1994 au Rwanda ; le retour à Kigali de l’ambassadeur de France en juin 2021 ; un voyage officiel au Rwanda en mai dernier et, avant tout cela, le Secrétariat général de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) en 2018. 

   

Compter sur soi-même 

Le garant français de l’entente de New York se faisant discret, Félix Tshisékedi s’est résolu à passer de la diplomatie à la guerre avec le Rwanda. Outre la nomination d’un nouveau chef d’état-major à la tête des Forces armées de la république démocratique du Congo (FARDC),  le président congolais a lancé, début novembre, un appel à la mobilisation générale pour libérer les territoires occupés par le M23 dans l’Est de la RDC frontalière du Rwanda.

Selon des sources officielles, pas moins de 2000 jeunes congolais se sont enrôlés dans les rangs pour « défendre » la partie en danger.

À Kinshasa, le pouvoir compte également sur le déploiement prochain de la force régionale d’interposition décidée par la Communauté économique des Etats d’Afrique centrale (CEAC) pour inverser le rapport de force avec les rebelles. En application de cette décision, un contingent kenyan devait normalement être déployé dans le Nord-Kivu.  Mais rien n’indique toutefois que cela suffira à bouter dehors les rebelles. Pour le Rwanda, l’Est de la RDC présente un enjeu stratégique et économique. En prenant pied chez son voisin congolais, Kagamé garde l’œil sur les rebelles du Front démocratique de libération du Rwanda (FDLR) soutenus, selon lui, par les FARDC.

L’instabilité dans l’Est de la RDC permet surtout à Kigali de tirer directement ou indirectement des dividendes substantiels du trafic des minerais précieux congolais: le coltan, le cobalt, le cuivre, le manganèse et le diamant. Après la défection du garant Macron et faute de résultats sur le plan diplomatique, Félix Tshisékedi a choisi la confrontation militaire avec Paul Kagamé (voir l’article ci dessous).

Un pari risqué et incertain.  

Le divorce acté entre le Rwanda et la République Démocratique du Congo (RDC)

1 COMMENTAIRE

  1. Vous écrivez : »sans que Macron ait pu rappeler à l’ordre son homologue Rwanda ». Uniquement cette phrase me montre que les colonialistes ne changeront jamais. Vous continuez, 60 ans après les indépendances des pays africains, à n’avoir aucune respect des peuples africains, à vous comporter en maître chez eux. Vous ne comprenez que la force.

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