La naiveté de Macron face à Poutine

Poutine profite du 22 ème Forum économique international de Saint-Petersbourg, du 24 au 26 mai 2018, pour recevoir Emmanuel Macron. Lequel pense infléchir la politique extérieure du Tsar.

Le Forum de Saint-Pétersbourg accueille autant de monde que celui de Davos mais il ne lui ressemble guère. Le Forum de Saint-Petersbourg n’est pas la grande messe de la « mondialisation heureuse » et la célébration de l’hyper capitalisme « bienfaiteur de l’humanité ».
Poutine a fait de ce Forum international une plateforme politique pour accroître les parts de marché de la Russie dans la compétition mondiale. La politique extérieure de la Russie y est omniprésente. Une centaine d’événements aussi économiques que politiques se tiendront dans la ville natale de Poutine.

Sur les traces de Sarkozy

 Des chefs de l’État, des chefs de gouvernements, de très nombreux ministres sont invités personnellement par le Tsar. Le candidat à l’élection présidentielle, Nicolas Sarkozy, s’y était rendu, en juin 2016, pour défendre un rapprochement entre l’Union européenne et la Russie, évoquer les situations en Ukraine et en Syrie et essayer de prôner le dialogue pour mettre un terme aux régimes réciproques de sanctions économiques. Emmanuel Macron se rendra en Russie, les 24 et 25 mai 2018, pour participer à ce Forum, en qualité d’invité d’honneur, avec le Premier ministre japonais. Il reprendra probablement les mêmes arguments que Nicolas Sarkozy avec les mêmes résultats.
On peut constater que les rencontres, très médiatisées, du président français  avec Donald Trump et Vladimir Poutine n’ont guère infléchi leurs politiques et n’ont pas eu d’incidence sur leurs comportements hostiles. Trump a évidemment, comme prévu, dénoncé l’accord nucléaire avec l’Iran, dénoncé le multilatéralisme béat et n’est toujours pas sensible aux changements climatiques, tandis que Poutine continue la russification de territoires jadis ukrainiens, apporte une fin de non-recevoir aux condamations de son soutien décisif à Bachar El Assad et roule dans la farine les diplomaties occidentales en Afrique, comme en République centrafricaine.
Si en France, les rencontres internationales du président Macron avec les grands leaders mondiaux sont bien accueillies car élles restaurent la fonction présidentielle, si dégradée avec le précédent chef de l’État, en revanche,  elles montrent aussi les limites de l’action présidentielle et une  certaine méconnaissance des principes fondamentaux des relations internationales.
Au service des grands groupes français
Les visites à l’étranger du président Macron ont essentiellement pour objectif de renforcer l’attractivité de la France et de permettre aux grands groupes français de conquérir de nouveaux marchés. A Saint-Petersbourg, les groupes implantés en Russie, comme  Auchan, Engie, Total, seront particulièrement présents  et le commerce avec la Russie sera au centre de la visite présidentielle . C’est bien un Forum économique international qui motive le voyage du président Macron.
Il est vrai que le quinquennat du président Hollande, avec Laurent Fabius à la manoeuvre destructrice de nos positions commerciales, a été catastrophique dans nos relations commerciales avec la Russie. On se souvient de l’annulation extravagante de la livraison de deux navires de guerre Mistral qui a coûté 950 millions d »euros aux contribuables francais. La France occupe désormais le cinquième rang du commerce avec ce pays, qui est sous sanctions économiques de l’Union européenne, depuis 2014. L’Allemagne, les Pays-Bas, l’Italie et la Pologne devancent la France, incapable de tirer son épingle du jeu des sanctions économiques.
Après l’affaire des Mistral, le président Macron et son ministre des Affaires étrangères ne pourront pas vendre des Rafales ou des navires de guerre. Seuls les secteurs de l’agro alimentaire, de la grande distribution et du pétrole peuvent apporter des satisfactions françaises. Les quatre  États européens, qui devancent la France, apprécient énormément les positions françaises en pointe dans les conflits dans lesquels est impliquée la Russie, comme en Syrie ou en Ukraine. Il n’est pas sûr que les choix politiques français à l’international facilite le  développement du commerce français avec la Russie.
En politique, la cohérence est fondamentale. Le « en même-temps » trouve ses limites.