Tunisie, des agences financières pour détrousser les pays pauvres

Hier, la Grèce, le Liban, le Mali étaient étranglés par les agences de notation …., aujourd’hui c’est la Tunisie. Et demain, à qui le tour ?

Une chronique de Ezzeddine BEN HAMIDA.

La dégradation de la note souveraine de la Tunisie de B3 à Caa1 avec la mention de perspectives négatives rend le coût des emprunts sur les marchés financiers internationaux prohibitif. En réalité, l’abaissement de la note de la Tunisie est un mesure inutile et contreproductive car les autorités monétaires tunisienne sont conscientes de leur fragilité financière et se sont abstenues depuis un moment de recourir aux emprunts à court termes sur les marchés financiers internationaux parce que le coût est prohibitif : le taux d’intérêt avoisine les 16%. La Tunisie privilégie donc les emprunts bilatéraux même si le prix politique peut être parfois pénible.

1/ Un marché de dupe

Les Big Three américaines, S&P Global Moody’s et Fitch, dominent le marché de la notation. Elles concentrent, à elles seules, plus de 85% du marché international. Ainsi, ces agences de culture anglo-saxonne représentent la vision économiques des États-Unis et de l’Occident, en général.

Qu’un pays envisage d’aller sur les places internationales pour emprunter, et il doit au préalable demander et payer  les agences de notation américaines, Moody’s, Fitch et S&P Global, pour le noter. Cette note représente son ticket d’entrée, déterminante pour la fixation du taux d’intérêt

Plus le risque d’insolvabilité est grand et plus le taux d’intérêt est élevé. En réalité, les Big three  lne snnt pas insensibles aux arguments des  bailleurs de fonds ; le plus souvent, ils font partie des mêmes groupes financiers.

2/ Des agences américaines conspuées

 Après la faillite de Lehman Brothers en 2008, les agences de notation ont été mises au banc des accusés « pour avoir contribué à la crise financière la plus grave depuis celle de 1929 en surévaluant la qualité des produits dérivés adossés aux emprunts immobiliers à risque (« subprimes ») achetés par de nombreuses banques et fonds dans le monde. » Quand la bulle immobilière américaine s’est dégonflée, cela s’est traduit par des défauts de paiements par centaines de milliers. Des défauts de paiements ayant à leur tour entraîné de très lourdes pertes pour de nombreuses banques qui avaient acheté des dérivés de ces crédits risqués.

En février 2012, les Big three avaient dégradé la note de neuf pays, de la zone euro, d’un seul coup : de la France à l’Allemagne en passant par la Belgique. Ce qui a provoqué chez ces « mauvais élèves de la classe » une levée de bouclier contre ces agences, les responsables politiques de ces pays avaient qualifié « d' »aberrant », « à contretemps » ou « suspect » la dégradation d’un seul coup de neuf pays de la zone euro ». Et ils avaient appelé à « examiner le rôle des agences de notation » et même envisagé de créer une agence de notation européenne, face aux organismes américains accusés de « jeter de l’huile sur le feu ». Près de dix ans après, cette agence n’a toujours pas vu le jour ! Pourquoi ? Quels accords ont-ils conclus ?

3/  Une alternative chinoise?

La décision de créer Dagong fut prise en 1992 par les autorités chinoises. L’objectif est de  maîtriser les techniques financières et d’évaluations des Big Three pour mieux les concurrencer. Dès 1993, une équipe chinoise, présidée par Liu Jizhong, s’est rapprochée de S&P Global (ancien Standard & Poor’s) et Moody’s afin de parfaire la stratégie de création de Dagong. Un partenariat avec Moody’s allait même être signé en 1999, avant d’être abandonné.

Une simple « incompatibilité », selon la version américaine.

Une autre version selon Guan Jianzhong, PDG en 2011 de l’agence de notation chinoise Dagong.

« Depuis toujours, disait-il, elles [les Agences de notations] utilisent le principe du « deux poids, deux mesures ». Le niveau de la dette américaine augmente rapidement et va bientôt dépasser son PIB. Sa solvabilité réelle continue de se détériorer et sa volonté de remboursement s’est nettement émoussée. Le fait d’avoir recours à la planche à billets afin de transférer la dette contribue à altérer encore davantage les intérêts des créanciers. Les trois agences ont choisi d’ignorer ces faits et conservent la notation Triple A des États-Unis1. Avant d’ajouter avec agacement : « En revanche, elles ont diminué de manière significative la note des pays de l’Eurozone, tels que la Grèce, l’Espagne, le Portugal, etc., auxquels Moody’s et Standard & Poor’s avaient auparavant accordé des évaluations de premier ordre. En réalité, la capacité des États-Unis à rembourser sa dette est devenue très, très faible. Cette observation à elle seule indique que ces agences cherchent à protéger les intérêts des États-Unis en exploitant leur position dominante et qu’elles ont perdu tout semblant d’impartialité et d’objectivité. Par conséquent, l’utilisation de leurs informations de notation douteuses pour réaliser des opérations de crédit provoquera un dérèglement du marché. » (institutdesactuaires.com)

 

 

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