L’ancien président du Tchad, Hissène Habré, est mort, à l’âge de 79 ans, au Sénégal où il avait été condamné à la prison à perpétuité, en 2016, pour crimes contre l’humanité, a annoncé, mardi 24 août, le ministre de la justice sénégalais, Malick Sall. Il aurait succombé au Covid-19 à l’hôpital principal de Dakar, a fait savoir le consulat du Tchad
Le 30 mai, l’ancien dictateur tchadien Hissène Habré a été condamné à la prison à perpétuité pour crimes contre l’humanité, crimes de guerres, tortures et viols. A la tête de l’Etat de juin 1982 à décembre 1990, Habré s’est largement appuyé sur le soutien de la France pour asseoir son pouvoir. C’est ce que démontrait, à travers des documents et des témoignages exclusifs, un rapport de l’ONG Human Rights Watch (HRW).
Charniers et Transall
Selon cette enquête, la complaisance de la France vis-à-vis de l’ex dictateur commence avant son arrivée au pouvoir. Dès mars 1982, « conscientes de la monté en puissance des FAN, les autorités françaises (…) se sont rapprochées des représentants des FAN » note le rapport. Et ce malgré la découverte en 1980 de charniers à ciel ouverts remplis de victimes fusillées par les forces d’Habré autour de sa demeure dans la capitale N’Djamena.
Après l’arrivée d’Habré au pouvoir, plusieurs unités de l’armée française sont déployées sur le sol tchadien tout près des zones du nord du pays où des centaines de combattants de Goukouni Oueddeï (opposant à Habré soutenu par la Libye de Kadhafi) sont alors « victimes d’exactions, de mauvais traitements, de tortures et d’exécutions sommaires » commises par les FANT. Par ailleurs, le rapport précise que le 11 juillet 1983, « 32 mercenaires, sélectionnés par René Dulac (…) ont décollé de l’aéroport du Bourget » en direction du Tchad. « Dual a reçu ses ordres lors d’une réunion de crise organisée par la DGSE dans les locaux du ministère de la coopération. Le projet est suivi de près par Jean-François Dubos, directeur adjoint du cabinet du ministre de la défense Charles Hernu, ainsi que par Guy Penne et François de Grossouvre, conseillers de Mitterrand ».
La complicité des autorités françaises avec le régime s’appuie également sur la mise à disposition d’avions « Transall de l’armée française pour transporter des prisonniers ». « Les avions français étaient mieux pour garder les choses secrètes » confie un technicien de l’armée de l’air tchadienne aux chercheurs de HRW.
Tchad-DGSE, les liaisons dangereuses
Lors de la répression violente menée par les forces tchadiennes contre les rebelles du sud du pays de 1982 à 1985, Paris ne suspendra jamais son aide aux autorités du pays. Objectif principal : dédouaner les troupes française de toute responsabilité. Le 4 décembre 1984, François Mitterrand écrit à Habré : « Il serait grave que nous semblions, de quelque manière que ce fût, associés à des excès commis par des troupes régulières tchadiennes que nous équipons et dont nous entrainons les cadres ».
Enfin, la proximité entre la DGSE et la Direction de la documentation et de la sécurité instaurée par Habré et coupable de nombreuses exactions laisse penser que les autorités françaises de l’époque n’ignoraient pas les abus commis par le régime. Selon un témoignage écrit par un ancien agent de la DGSE, Claude Faure, présent lors de la création de la DDS, une équipe de la DGSE était détachée auprès de la DDS tchadienne. « Les membre de cette équipe ont pour mission de conseiller et de former les personnels de ce service ».
Les victimes d’Hissène Habré dans une situation désespérée