Gabon – Albert Ondo Ossa : «Je suis le président élu»

Albert Ondo Ossa a été interviewé par nos confrères de Radio France Internationale le 11 juin 2024. Une interview au cours de laquelle il a principalement demandé qu’on publie les résultats de l’élection présidentielle du 26 août 2023 ou qu’on organise des « élections tout de suite » au Gabon.

S’il y a une chose que même les auteurs du coup d’État du 30 août 2023 au Gabon reconnaissent, c’est bien qu’Albert Ondo Ossa a remporté dans les urnes l’élection présidentielle au Gabon du 26 août 2023. Brillant économiste, l’ancien syndicaliste, qui avait été « super ministre » d’Omar Bongo (il lui avait confié le ministère de l’Éducation nationale et de l’Enseignement supérieur dans les dernières années de son règne), avait réussi à créer un véritable « buzz »  lors de sa participation à une émission qui avait poussé plusieurs acteurs politiques à le soutenir.

« L’affaire de la lettre »

Après la prise de pouvoir par les militaires, Albert Ondo Ossa avait qualifié le coup d’État de « révolution de palais » et avait même été ouvertement soutenu par le vice-président de la Guinée équatoriale, ce qui, au Gabon, était une grande première ! Certains soutiens d’Albert Ondo Ossa avaient aussi demandé ouvertement que l’on puisse procéder au recomptage des voix. L’attitude d’Albert Ondo Ossa avait subitement changé lorsque trois de ses soutiens (Mike Jocktane, Thérence Gnembou Moutsona et Joël Kassoum Ndong Assoumou) avaient été arrêtés dans le nord du Gabon le 5 septembre 2023. Ces trois émissaires, qui étaient porteurs d’une lettre adressée aux autorités de la Guinée voisine (dont Albert Ondo Ossa a toujours contesté en être l’auteur), ont été jetés en prison à Oyem où ils ont passé un mois.  

Cette arrestation a-t-elle fait peur à l’ancien leader syndical ? Toujours est-il que lors du déplacement de Brice Oligui Nguema dans le nord du pays, il fait partie du voyage. Albert Ondo Ossa est présent à la tribune lors du discours du nouveau maître du pays dans lequel l’ancien commandant en chef de la Garde prétorienne d’Ali Bongo admet publiquement la victoire d’Ondo Ossa dans les urnes, mais la volonté de l’armée de garder le pouvoir. « Le nouveau leader, c’est moi » clame Oligui Nguema dans son uniforme de parachutiste après avoir maintenu qu’il n’est plus question de revenir sur les élections du 26 août 2023. « Dissous, c’est dissous ! »

Albert Ondo Ossa (à gauche) et Brice Oligui Nguema (à droite) en septembre 2023 au Palais résidentiel du Gabon.

L’impossible succès 

Dix mois après le coup d’État, Albert Ondo Ossa revient à ce qui était sa ligne politique initiale : la revendication de sa victoire dans les urnes ou la réorganisation immédiate d’une élection présidentielle « ouverte et transparente ». Albert Ondo Ossa (sauf évènement très improbable)  et n’a aucune chance d’obtenir ce qu’il demande. D’abord, parce qu’il n’a aucun moyen d’être installé dans son fauteuil de président puisque ce sont les militaires qui l’occupent, notamment le patron de la Garde prétorienne qui est chargée en principe… de la protection du président du Gabon !

Ensuite, parce que son changement de ligne politique avait pour le moins suscité l’incompréhension de plusieurs Gabonais qui lui avaient pourtant apporté un soutien politique sans faille, sans contrepartie financière. Dix mois plus tard, beaucoup de Gabonais peinent à comprendre le retour d’Albert Ondo Ossa à sa ligne initiale…

Enfin, parce que les élections à venir au Gabon ne seront ni libres ni transparentes puisque l’organisation des élections présidentielles a été à nouveau confiée au ministère de l’Intérieur, actuellement dirigé par un ancien ministre… d’Ali Bongo !

« Je suis le président élu »

Albert Ondo Ossa laisse penser qu’il est toujours populaire et que seule une élection démocratique peut démontrer qu’il ne l’est plus, une élection « ouverte » qu’il souhaite voir se tenir « immédiatement ». Il se trompe. L’élection à venir au Gabon, qui est prévue par la « Transition » en août 2025, verra Brice Oligui Nguema se porter candidat et il est impensable qu’il soit déclaré perdant puisque l’armée gabonaise, rompue aux coups d’États électoraux, y veillera comme à son habitude.

Albert Ondo Ossa qui a  déclaré « je suis le président élu » a également affirmé « C’est le système Bongo qui perdure ». Sur ce dernier point on peut dire qu’il ne se trompe pas. 

 

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