Les Iraniens dans la rue, la police des mœurs démantelée

Il aura fallu la mort de 448 personnes (chiffres Iran Human Rights (IHR), pour que les ayatollahs fassent un geste en direction des manifestants qui se sont mobilisés, ces trois jours de grève nationale, dans tout le pays..

Toute la question est de savoir si l’annonce sur le démantèlement de la police des moeurs va avoir un impact sur les manifestants et faire retomber la tension. Ou pas. Et si le débat interne au pouvoir iranien sur les règles coraniques créera de nouveaux rapports de force notamment entre les mollahs et les Gardiens de la Révolution, qui ont toujours pour l’instant uni leurs forces(voir l’article ci dessous)

L’obligation pour les femmes de sortir voilées est le résultat d’une loi votée en 1983, soit quatre ans après l’arrivée au pouvoir de l’ayatollah Khomeiny. La loi de 1983 a institué également la police des mœurs pour « répandre la culture de la décence et du port du voile ». En juillet 2022, le président Raïssi a fait voter une loi « sur le voile et la chasteté du pays » qui avait durci le code vestimentaire féminin : non seulement, le foulard était obligatoire, mais il devait couvrir aussi le cou et les épaules.

Samedi 3 décembre, le procureur général d’Iran Mohammad Jafar Montazeri a annoncé que « le Parlement et le pouvoir judiciaire travaillaient » sur la question du port du voile obligatoire, sans préciser ce qui pourrait être modifié dans la loi. Ils n’ont pas précisé l’étendue des concessions qu’ils entendaient réaliser. Dimanche 4 décembre, le même a annoncé le démantèlement de la police des mœurs, un corps de surveillance du vêtement féminin, créé en 2005.

Le président Raissi a déclaré lors d’un point de presse : « Notre Constitution a des valeurs et des principes solides et immuables […], mais il existe des méthodes de mise en œuvre de la Constitution qui peuvent être infléchies », a-t-il dit.

Pour l’instant, aucune annonce officielle concernant la police des mœurs ou un allègement des règles concernant le port du voile n’a eu lieu. Seules les déclarations du procureur font foi. Il sera intéressant de voir comment le principe du voile sera réaffirmé tout en étant assorti d’une multitude de dérogations. D’après les témoignages en provenance d’Iran, deux femmes sur trois déjà ne portent plus le voile dans la rue.

Un embrasement général

Le 83ᵉ jour du soulèvement en cours en Iran a commencé, ce mercredi 7 décembre,avec un bras de fer entre les loyalistes du régime qui tentent de contrôler les rues de la ville et les campus en émettant des avertissements et des menaces, et les jeunes déterminés, les femmes et le public qui les soutient qui se lèvent pour protester et montrer qu’ils sont très sérieux dans leur demande de renversement du régime et la naissance d’un Iran libre.

Le régime a mobilisé plus de 37 000 membres du Corps des gardiens de la révolution islamique, des bassidjis et des forces de sécurité de l’État dans la capitale, Téhéran, et a mis en place plus de 100 points de contrôle avec des dizaines de véhicules blindés et de nombreuses forces de sécurité à chaque point de contrôle dès le début de la matinée dans le but de contrecarrer toute manifestation.

Des rapports indiquent que les manifestants de Karaj, Javanrud, Kermanshah, Marivan, Mahabad et de nombreuses autres villes sont en grève et ferment leurs magasins en solidarité avec la révolution qui se poursuit contre le régime. Les étudiants de diverses universités de Téhéran, Ahvaz, Rasht et d’autres ont boycotté les cours en solidarité avec le soulèvement national. Le président du régime iranien, Ebrahim Raisi, s’est rendu à l’université de Téhéran où il a dû faire face à des protestations pendant son discours alors qu’il était évident que seules des personnes triées sur le volet étaient autorisées à entrer dans l’auditorium.

Les étudiants de Téhéran en pointe

Les étudiants de l’université Amir Kabir de Téhéran ont marqué la Journée de l’étudiant en lançant des protestations et en scandant des slogans hostiles au régime, notamment « Mort au dictateur ! », malgré d’importantes mesures de sécurité.

Les autorités ont tout fait pour empêcher les étudiants d’étendre leurs manifestations aux rues de la ville, où le public pourrait rejoindre leurs rangs et constituer une menace sérieuse pour la sécurité du régime. Des manifestations similaires ont été signalées dans différentes universités de la capitale du pays, particulièrement l’université Khajeh Nasir Toossi, l’université Allameh Tabataba’i, l’université de Téhéran, l’université Ferdowsi dans la ville de Mashhad, dans le nord-est de l’Iran, et d’autres encore.

Des rapports font état d’attaques menées par les unités Basij du régime et les services de sécurité du campus dans diverses universités contre des étudiants qui organisaient des rassemblements contre le régime à l’occasion de la Journée nationale des étudiants. Il s’agit notamment de l’université Ferdowsi de Mashhad, des universités de Téhéran et d’Amir Kabir, dans la capitale.

Des foules se sont dirigées vers la célèbre place Azadi (Liberté) de la capitale pour poursuivre leurs rassemblements. Les autorités ont désespérément dépêché des forces de sécurité dans la zone pour empêcher tout type de rassemblement de protestation contre le régime. Des manifestations similaires sont signalées à Najafabad dans la province d’Ispahan, à Yazd et Ardakan dans la province de Yazd, à Yasuj, Arak, Qazvin et Kerman.

 

 

 

Et si les Gardiens de la Révolution prenaient tout le pouvoir en Iran !