Algérie, la tentative ratée d’éviction de Gaïd Salah

Gaid Salah

Après l’échec d’une ultime négociation, la semaine dernière, entre la Présidence algérienne et les militaires, une rumeur a été lancée, le samedi 24 novembre, sur le renvoi imminent du chef d’état major, Gaïd Salah, par le président Bouteflika.

Il faut suivre à la loupe la situation intérieure algérienne qui se durcit d’heure en heure. Ce qui n’est pas simple, compte tenu du silence assourdissant des médias à Alger. Pas un mot ou presque dans la presse sur la guerre qui fait rage entre les principaux clans au pouvoir.

D’un coté, la Présidence où règne désormais le vice roi et frère du chef de l’Etat, Saïd Bouteflika, est l’alliée des oligarques qu’elle a toujours favorisés outrageusement. De l’autre coté, le général et chef de l’état major, Gaïd Salah, est parvenu, ces derniers mois, à nommer des fidèles comme chefs de région, patrons de la gendarmerie ou responsables du renseignement militaire.

L’impossible compromis

Le samedi 24 novembre, un blogueur algérien du nom d’Alsaid Bensedira annonce que le président Bouteflika a décidé de renvoyer « dans les heures à venir » Gaïd Salah. Ce propagandiste qui fut très lié à l’ancien DRS (services algériens), avant de rallier le RND, le mouvement créé par l’actuel Premier ministre Ahmed Ouyahia, est aujourd’hui basé à Londres et généralement fort bien renseigné par ses anciens amis. Sauf que, cette fois, le bougre est allé un peu vite en besogne.

La réalité telle qu’elle est décrite à « Mondafrique » par des sources fiables à Paris et à Alger, est bien différente. Dans la matinée de samedi 24 novembre, le frère du Président, accompagné du Premier ministre, a fait savoir à Gaïd Salah que le chef de l’Etat souhaitait son départ. Durant la semaine qui a précédé cette rencontre,  les deux clans n’ont pas réussi en effet à composer. La Présidence a proposé des fonctions de ministre de la Défense et une hypothétique promotion au poste de vice président à Gaïd Salah. Lequel a mis deux conditions à son éventuelle nomination: conserver son titre actuel de chef d’état major, pour ne pas se couper de sa base militaire, et voir le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, écarté du gouvernement.

Aucun compromis n’a pu être trouvé. Ce qui ouvrait la voie, pour sortir de la paralysie institutionnelle, à un possible coup de force, qui fut tenté, samedi dernier, par le clan présidentiel.

Tensions extrêmes

Face à l’oukase de Said Bouteflika et Ahmed Ouyahia, la réaction du chef d’état major fut immédiate. « Je ne démissionnerai que si le Président en personne me le demande ». Et Gaïd Salah de gagner, dans la foulée, le Palais de Zéralda, où réside en permanence un Abdelaziz Bouteflika à bout de forces.

Mais ce jour là, le gradé n’a pas voulu se rendre au chevet du Président en voiture comme il l’a toujours fait. Pas question, selon lui, de prendre le risque d’être bloqué à l’entrée du Palais par la garde présidentielle, dirigée par le général Ben Ali, un des derniers gradés à avoir conservé ses fonctions ces derniers mois et dont il connait l’hostilité à son endroit. Gaïd Salah a donc gagné Zéralda dans un gros hélico de transport de troupe, qui a décollé avec à bord deux cent hommes venus des corps d’élite de l’armée.

Sur place, quelques échanges assez vifs eurent lieu entre les hommes de Gaïd Salah et les patrons de la garde présidentielle, mais heureusement sans des coups de feu qui auraient provoqué un embrasement général. Dans ces conditions qui montrent l’état de tension extrême qui règne à Alger, le chef d’état major a pu rencontrer Abdelaziz Bouteflika. Lequel, dans le grand état de faiblesse qui est le sien, lui a assuré qu’il n’avait jamais donné l’ordre de le renvoyer. Depuis la nomination de Gaïd Salah voici quatorze ans, les deux hommes ont appris à cohabiter loyalement et s’apprécient.

Le jeu ambigu de la France

Ces ultimes rebondissements politiques confirment plusieurs hypothèses, guère réjouissantes, sur la situation algérienne. Une poignée d’hommes, dont Saïd Bouteflika, Ahmed Ouyahia et les principaux oligarques, profitent du vide du pouvoir et de leur proximité physique avec le Président malade pour imposer leurs vues et prêter à un homme épuisé et privé de parole des intentions qui ne sont pas les siennes. Ce qui est politiquement inadmissible, sinon moralement coupable.

Deuxième certitude, la possibilité d’un accord à l’amiable entre les clans qui s’opposent parait de plus en plus improbable. On voit difficilement comment l’élection présidentielle prévue pour avril 2019 pourrait se tenir dans des conditions sereines. Un possible état de transition, type le HCE en 1992 après la destitution de l’ex président Chadli par l’armée, parait une hypothèse pertinente.

Enfin on peut s’interroger sur le rôle de la France dans les luttes actuelles de pouvoir. Une certitude, le général Gaïd Salah qui a généralisé l’usage de l’arabe dans l’armée et préféré acheter des armes à Moscou plutôt qu’à Paris, n’a guère la cote chez les Français. Ce nationaliste ombrageux ne cherche d’ailleurs pas à améliorer son image chez l’ancien colonisateur.

En revanche, Ahmed Ouyahia aurait reçu à Paris, sinon un soutien franc et massif, du moins quelques encouragements, y compris dernièrement lorsqu’il a participé, le 11 novembre, à la cérémonie organisée par Emmanuel Macron pour le centième anniversaire de la fin de la guerre de 1914-18. Le discours que le Premier ministre algérien a prononcé à cette occasion a été considéré chez beaucoup à Alger comme un signe d’allégeance à la France. N’a-t il pas qualifié la révolution algérienne de «guerre» et les martyrs de «morts», des expressions qui heurtent la sensibilité nationaliste  des Algériens?

Le maintien ou l’éviction du chef du gouvernement dans les semaines qui viennent sera un test probant de l’état du rapport de force et sur l’influence du « Hibz França », « le parti de la France », dans l’Algérie d’aujourd’hui.

15 Commentaires

  1. Ca m’étonnerait fort que Abdelaziz Bouteflika puisse désavouer son frère Said qui est la pupille de ses yeux , ses oreilles , ses yeux et son porte voix avec ses collaborateurs !
    Cela m’étonnerait aussi que Said ait pris une quelconque initiative sans l’aval de son frère Abdelaziz !
    Ceci dit , Abdelaziz Bouteflika , rompu à la politique et fin manoeuvrier malgré sa maladie , pourra se séparer facilement de Gaid Salah le moment qu’il aura décidé . Ce n’est qu’une question de Timing !

  2. Mondafrique est une référence dans le monde du journalisme.impartail,il égratigne la France,les etats unis,Israel,Algérie,Maroc……!!!!!
    A chaque fois qu’un journaliste etranger s’attaque a notre pouvoir corrompu,on joue les vierges effarouchées et allons a sa defense.

  3. Je trouve l’article pertinent.il y’a des hélicoptères capables d’embarquer 55soldats et 5 membres d’équipage,…..et des vehicules militaires dedans !!!!!!!!!

  4. Un Hélicoptère lourd russe Mi-26 T2 peut faire l’affaire car sa charge utile est de 20 000 kg
    Un Hélicoptère Mi-26 T2 peut facilement transporter 200 soldats debuts de 80 kg chaqu’un sur une court distance. L’ANP possede plusieurs Mi-26 T2 qui sont des Hélicoptères polyvalent et de transport lourd.

  5. Bonjour Mr Nicolas Beau,
    En lisant votre article, c’est comme si je voyais un film, une chose est sûr il n’est pas Français, mais plutôt Hollywoodien.
    je ne suis pas en mesure de dire a quel point vous avez raison, mais il y une part de vérité et beaucoup d’autre chose que je qualifierai de fantasme politique.

    Merci de nous laisser tranquille.

  6. 200 hommes dans un hélico ?? Vous nous prenez vraiment pour des buses Mr Nicolas Beau.
    Vous pensez que c’est une voiture de clowns ou quoi ?
    Le Mil mi-26 (plus grand hélico au monde) ne peut transporter qu’une 60aine d’hommes environ.

  7. A ma connaissance aucun hélicoptère militaire au monde ne peut transporter une troupe de 200 hommes ( y compris le MIl MI- 26 russe )…Fake news, ragots de salon ou journalisme de bas étage ??…

  8. Entonnant votre spontanéité dans cet article M. Beau ! Mais vous auriez pu vous hisser un niveau plus élevée dans l’objectivité… Ne sous-estimé jamais la capacité des algériens à porter un regard affranchi des événements. Et n’oublié jamais aussi qu’il s’agit de l’armée POPULAIRE d’Algérie, constitué d’enfants du peuple, où chaque famille famille est fière de compter un de ses membres dans ces rangs…

    Bien cordialement

  9. Si ce que vous racontez est vrai, cela veut tout simplement dire que les institutions algériennes sont à présent liquéfiées, l’Europe en particulier et l’occident en général aura une lourde facture a supporter, la lorgnette libérale à menai à un aveuglement tout azimut, la prophétie du camps des saints est en phase de réalisation.

  10. Le système Algérien pousse le peuple à la révolution la chose qu’il parait proche surtout avec la chute des prix de pétrole instruites par Trump et surtout la révolution des gilets jaunes française.

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