Tunisie, un peuple vertueux, des dirigeants corrompus

L’infatigable militant associatif qu’est Tarek Ben Hiba en appelle à la nomination d’un « Juste » comme Premier ministre d’une Tunisie en pleine crise morale et politique

Nous vivons un climat délétère où pas un jour ne passe sans que l’on découvre au sommet de l’Etat une nouvelle affaire de soupçon de corruption, voire de corruption. La dernière a été révélé par le président de la République et concerne la disparition/réapparition(?) du procès-verbal concernant une affaire qui concerne un ministre.

Comment ne pas s’étonner de l’atonie de la société civile tunisienne dont on connait pourtant l’énergie inépuisable de vigie protectrice des libertés, de la démocratie et des droits de l’homme en Tunisie.

Les forces politiques donnent on spectacle de mauvais gout au parlement alors que la situation économique et sociale est dramatique et que les gens coulent sous le joug de la précarité et de la cherté de la vie.

Le seul élément notable est le rôle joué par l’UGTT qui essaye de peser de son poids pour préserver la défense de la « madaniya – civilité » de l’état contre les prédateurs de nos libertés.

Etrange Tunisie entrée dans l’histoire des révolutions par la grande porte mais qui a porté au pouvoir des forces politiques qui ne font pas justement de la politique

Les derniers sondages indiquent que les défenseurs des droits de l’homme ne seraient pas majoritaires si les élections avaient lieu aujourd’hui.

Les raisons mises en avant pour le dépôt d’une mention à l’ARP pour exiger la démission du gouvernement (qui a pourtant démissionné !) ne convainquent personnes en dehors de leurs partisans. Les Tunisiennes et les tunisiens ont observé avec stupeur le double jeu des auteurs : membres de la majorité gouvernementale mais farouches alliés de l’opposition. Le résultat de ce mariage de la carpe et du lapin a été l’adoption par la Commission des droits, des libertés et des relations extérieures à l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) le projet de loi portant amendement du décret-loi n°2011-116 relatif à la liberté de la communication audiovisuelle qui vise à permettre aux forces de l’argent aux daéchiens de tous poils l’accès à l’espace audiovisuel tunisien sans aucun contrôle. Cet amendement qui abolit le système des autorisations et instaure un système déclaratif est une lourde menace que font peser les mafieux et les ultrareligieux réactionnaires sur les acquis arrachés par nos luttes depuis la révolution.

Comment donc avoir un gouvernement dans le même rapport de forces au sein de l’ARP, les mêmes causes sont censées produire les mêmes effets.

Si la dissolution de l’assemblée des représentés du peuple reste une solution constitutionnelle il existe une solution qui éviterait cette nouvelle épreuve pour les Tunisiens.

Comment trouver un gouvernement qui pourrait obtenir une majorité et combattre la gabegie qui s’installe dans le pays ?

Je ne crois pas aux miracles mais il est possible de mettre mise en place un gouvernement durable qui s’attèlerait enfin aux travaux herculéens de la mise en place d’un nouveau modèle de développement éradiquant le système de la rente qui asphyxie le pays et la corruption qui l’étouffe et qui donnerait aux jeunes une petite lueur d’espoir ?

Il y existe une autre voie, étroite mais qui existe : si le Président de la République choisit un premier ministre dont les compétences sont ayant tout politique. La recherche de l’excellence du candidat en matière économique n’a pas été en effet un critère suffisant de succès.

Un politique qui redonnerait à la politique son sens premier celui de gérer les intérêts de la cité et des gens qui y vivent, celui qui avec une crédibilité et une expérience est capable de faire prévaloir l’intérêt général contre les cartels et les profiteurs des rentes qui se sont incrustés dans l’économie du pays.

Le président devrait choisir un homme issu de la lutte contre l’ancienne dictature, dont l’engagement pour les libertés, la démocratie et le respect des droits de l’homme ne fait pas l’ombre d’un doute, et dont l’engagement pour la lutte contre la corruption emporte l’adhésion des démocrates.

Au Président qui bénéficie encore d’un crédit auprès des Tunisiens, de résoudre la contradiction que nous vivons entre d’une part la plaie de la Tunisie qui réside dans la corruption devenue presque endémique et dans l’absence d’une majorité de forces politiques qui respecte les règles institutionnelles issues de la nouvelle constitution.

Au président de choisir un homme non partidaire, issu de la société civile (réellement issu) ferme dans l’attachement aux principes de la révolution loin des tactiques désuètes qui visent à la préservation des places et à la défense des intérêts privés voir mafieux.

Un nouveau premier ministre issu de la société civile dont l’autorité ne pourrait pas être rejeté est la meilleure des solutions, qui combattrait l’argent sale et ses méfaits, qui serait crédible et capable d’apporter des solutions durables aux calvaire dont souffre les jeunes et les exclus.

Cet homme politique issu de la société civile devra être secondé par des équipes d’experts en économie capable de mettre en actions des mesures d’urgences et de réformes qui ont tant tardées.

Il sera difficile aux forces politiques actuelles sont incapables de trouver par eux même les solutions capables d’inverser la chute du pays vers des horizons inconnus.

Le choix du prochain premier ministre doit s’inscrire dans une continuité pour ne pas tout recommencer à zéro et ne pas permettre aux deux principales forces présentes qui œuvrent pour instaurer la réaction de remettre en cause les fruits des luttes des Tunisiennes et Tunisiens en faveur des libertés, de la démocratie et des droits de l’homme : la coalition des ultrareligieux et de l’argent sale d’une part et les néo Ben Alistes d’autre part qui veulent restaurer les réseaux mafieux de l’économie de la rente.

Face à ces deux forces le Président de la République qui a démontré son attachement public clair et net pour la défense des droits et de la constitution a les prérogatives institutionnelles nécessaires pour choisir un homme porteur d’espoir.

Au nouveau premier ministre de lancer une grande concertation pour palier à l’absence de vision claire et mettre en place les assises de la première décennie de la révolution

Ce que je souhaite c’est que les assises travaillent sur les points suivants :

  1. Empêcher l’abrogation scélérate du décret 116 de la HAICA
  2. Terminer les mises en place des institutions prévues par la constitution et en particulier la cour constitutionnelle
  3. Appliquer les accords issus des luttes sociales
  4. Faire des propositions de réformes du système politique pour enlever les blocages qui minent le développement économique et la lutte contre la corruption, la pauvreté et les exclusions.
  5. Sauvegarder les acquis juridiques en matière des droits de l’Homme et continuer à améliorer la législation pour les droits des femmes, des jeunes et des minorités.

Tarek BEN HIBA