L’opération tchadienne « Colère de Bohoma », qui a été lancée le 30 mars, a eu comme conséquence de refouler Boko Haram vers l’Etat du Borno au Nigeria.
L’opération militaire « Colère de Bohoma » visait à venger l’honneur de l’armée tchadienne une semaine après la défaite meurtrière encaissée par le Tchad sur la presqu’île de Bohoma. Quatre cent combattants d’une branche de Boko Haram auraient attaqué la garnison au petit jour, à bord de canots motorisés, faisant une centaine de morts parmi les soldats.
Bulletin de victoire
Le bulletin de victoire n’a guère tardé après l’opération militaire commandée sur le terrain par Idriss Deby en personne. Selon le bilan officiel invérifiable mais très médiatisé, les troupes tchadinnes auraient permis de tuer 1000 combattants djihadistes, de saisir beaucoup d’armes, de matériel et d’embarcations, au prix de 52 morts et 186 blessés dans l’armée tchadienne.
Un sérieux bèmol a été appporté à ce bilan victoriéux par le puissant voisin nigérian. Le gouverneur de l’Etat du Borno, Babagana Zouloum, a en effet expliqué que des combattants de Boko Haram et de l’Etat islamique en Afrique de l’Ouest avaient fui la région du lac Tchad « pour se replier rapidement au Sud en territoire nigérian. »
Chicayas entre le Tchad et le Nigeria
Entre le Tchad et le Nigeria, la confiance n’est plus de mise. L’armée tchadienne a pénétré en territoire nigérian et a laissé des hommes sur place pour s’assurer d’une relève effective de la présence armée. Dans une vidéo tournée par la télévision tchadienne, le président Deby a même expliqué à ses officiers qu’ils devront s’assurer que l’armée nigériane ne relâche pas de prisonniers de Boko Haram qui reviendraient ensuite attaquer le Tchad! Et Idriss Deby e répéter, depuis, que le Tchad était seul dans cette guerre contre le terrorisme.
Ce qui est vrai, c’est que l’opération tchadienne a semé la panique dans une partie du groupe terroriste, qui a essaimé dans la région.« Actuellement, beaucoup de Boko Haram fuient les rives du lac Tchad et sont en train de venir dans le nord de l’Etat de Borno et bientôt, dans le sud. Et il faut qu’on soit capables de mener des opérations contre eux », a déclaré le gouverneur nigérian, Babagana Zouloum, après s’être entretenu, jeudi, avec le président Mahamadou Buhari à la villa présidentielle.
Le jeudi 10 avril, des combattants de Boko Haram ont tenté sans succès de s’emparer d’un camp de l’armée nigériane dans la région de Gamborou, dans l’Etat de Borno. Des dizaines de djihadistes auraient été tués à cette occasion. Le lendemain soir, le chef d’état-major de l’armée nigériane, le général Toukour Bouratai, s’est adressé aux hommes du Super Camp de Ngamdou, dans l’Etat de Borno, pour leur annoncer qu’il viendrait combattre les terroristes dans les prochains jours à leurs côtés.
Le Niger, bon élève du multilatéralisme
Même si Idriss Deby a peu évoqué l’aide du Niger, l’armée nigérienne avait engagé ses moyens terrestres et aériens dans le cadre de l’opération « Colère de Bohoma ». Les nigériens avaient agi sur leur territoire et en territoire nigérian, y compris dans le cadre d’une opération de la force multilatérale mixte.
Le ministre de la Défense du Niger Issoufou Katambe a fait part mercredi, dans un communiqué, de la destruction de caches d’armes, de véhicules et de bombardements aériens sur des îles servant de bases à Boko Haram, puis, le 6 avril, des militaires nigériens du bataillon spécial d’intervention, appuyés par des avions de reconnaissance, « se sont opposés à une colonne de sept véhicules terroristes » en territoire nigérian. Contrairement au bouillant président tchadien, le ministre Katambé a salué « l’exemplarité de la coopération avec les forces alliées dans le cadre de la lutte contre le terrorisme aux côtés des forces armées nigériennes. »
Au moins un pays, le Niger, qui croit encore au multilatéralisme, alors que le président tchadien, Idriss Déby, annonce qu’il se retire « des opérations militaires extérieures » (voir l’article ci dessous).