La crise éthiopienne sape définitivement l’autorité de l’Union africaine ! 

Très largement critiquée pour ses atermoiements face aux crises politico-institutionnelles au Tchad, au Mali, en Guinée et au Soudan, l’Union africaine voit sa crédibilité plonger avec son impuissance dans le conflit en Ethiopie, pays siège de l’organisation panafricaine depuis 1963

 De toutes ces crises, celle que connaît l’Ethiopie depuis la fin de l’année 2020 est celle qui sape le plus la crédibilité de l’Union africaine. 

Capitale de l’Afrique 

Addis-Abeba n’est pas seulement la capitale de l’Ethiopie. C’est aussi là où les pères fondateurs des indépendances africaines ont choisi en 1963 d’établir le siège de l’Organisation de l’unité africaine (OUA) devenue plus tard Union africaine. C’est donc là que commence la crédibilité et la respectabilité de l’organisation panafricaine avant d’irriguer le reste du continent. Pourtant, depuis que s’est nouée la crise éthiopienne avec la décision du Premier ministre Abiy Ahmed d’envoyer en novembre 2020 l’armée fédérale déloger les autorités régionales issues des rangs du Front de libération du Tigré (FPLT), l’Union africaine est en retrait total.

Il aura suffi que les autorités éthiopiennes lui brandissent l’argument d’une crise intérieure sans droit de regard pour les non Ethiopiens pour que l’organisation panafricaine botte en touche. Sa timide tentative de revenir à la charge en nommant l’ancien président nigérian Olusegun Obasandjo comme Envoyé spécial de l’UA en Ethiopie n’a guère prospéré.   

Craignant de ne pas réussir là où l’organisation continentale, elle-même, a échoué, l’Autorité intergouvernementale pour le développement en Afrique de l’Est (IGAD), communauté économique sous-régionale à laquelle appartient l’Ethiopie, n’a finalement pris aucune initiative de médiation. Pourtant, le conflit a débordé l’Ethiopie pour arriver dans les pays voisins, notamment avec des dizaines de milliers de réfugiés éthiopiens au Soudan. L’implication militaire directe de l’Erythrée pendant la première phase de la crise entre Addis-Abeba et les autorités régionales du Tigré est venue affaiblir l’argument du conflit intérieur brandi par le Premier ministre éthiopien et donner à l’UA la légitimité de prendre en charge la recherche d’une issue pacifique. Ce qu’elle fait habituellement dans les autres zones de conflit du continent.

  

L’ONU en première ligne 

A l’origine concentrée dans la seule région du Tigré, la crise s’est répandue en Amhara et en en Afar. Les forces rebelles ne cherchent même plus à défendre seulement le Tigré mais à encercler les alentours de Dessie, ville stratégique de 200 000 habitants située sur l’axe menant à Addis-Abeba. Les troupes des Forces de défense du Tigré (TDF) n’excluent même plus de marcher sur Addis-Abeba, distante de moins de 400 km au Sud d’une de leur position. Elles se rapprochent déjà dangereusement de l’axe reliant la capitale éthiopienne à Djibouti, le port maritime le plus proche pour l’Ethiopie, son poumon économique d’où partent et entrent les exportations et les importations du pays.

Face à l’inertie de l’Union africaine, même après les bombardements urbains des forces fédérales éthiopiennes, les Etats-Unis et l’Union européenne ont exhorté le Premier ministre Abiy Ahmed et les rebelles tigréens à accepter un cessez-le-feu. Toutefois, la réaction la plus virulente est venue du Secrétaire général des Nations unies Antonio Guterres qui a fermement demandé aux autorités éthiopiennes de garantir un accès humanitaire libre et sécurisé aux organisations internationales d’assistance et de secours aux populations prises au piège des affrontements.

Escalade entre Addis-Abeba et les Nations Unies

Plusieurs diplomates onusiens ont été déclarés persona non grata. La reprise des frappes aériennes sur Mékélé, la capitale du Tigré, a obligé les agences onusiennes à suspendre les vols humanitaires, fragilisant ainsi des milliers de personnes désormais privées de la moindre assistance.  

Constatant que les pressions diplomatiques ne servent à plus rien, les Etats-Unis et l’ONU brandissent à présent la menace de sanctions contre les dirigeants éthiopiens face auxquels l’Union africaine, quant à elle, n’arrive même pas à hausser le ton. Dans cette crise l’organise panafricaine joue, de toute évidence, ce qui lui reste encore comme crédibilité.