COP 21 : l’Afrique en ordre dispersé

Venus en force à la 21 ème conférence des Nations unies sur le climat, les dirigeants africains cherchent à arracher un engagement ferme et précis sur le financement des adaptations aux changements climatiques. Ce n’est pas gagné d’avance.

L’épineuse question du financement

Une quarantaine de chefs d’Etat et de gouvernement africains participe à la 21ème Conférence des Nations unies sur le climat (COP) qui s’est ouverte lundi à Paris. Ce niveau de participation aussi important qu’à un Sommet de l’Union africaine (UA) traduit la volonté de l’Afrique d’arracher des avancées précises sur de nombreux défis imposés par le changement climatique pendant les négociations qui dureront jusqu’au 11 décembre.

Déjà posée sur la table lors de la Conférence tenue en 2009 à Copenhague, la question du financement des adaptations aux changements climatiques n’a toujours pas été réglée. Cette fois, les pays africains ne semblent pas prêts à s’accommoder de simples promesses. Selon les organisations de financement du développement, il faut près de 100 milliards de dollars de financements par an dès 2020 pour accompagner les Etats du Sud à faire face aux changements climatiques : inondations, sécheresse, déforestation, ensablement des cours d’eau, érosion.

Le Fonds vert annoncé dans la foulée des négociations de Copenhague devait servir à soutenir les pays pauvres dans ce combat pour l’adaptation au changement climatique. Sauf que les contributions annoncées pour sa mise en place n’ont jamais été tenues. Résultat, sur les 100 milliards de dollars promis à Copenhague, à peine 15 ont été réunis.

Donnant-donnant

Pour les délégations africaines présentes au Bourget, l’Afrique a respecté sa part d’engagement en préservant les forêts du Bassin du Congo, deuxième poumon écologique au monde, en renonçant à son industrialisation via des énergies fossiles, en s’engageant résolument dans la production des énergies propres et coûteuses. « Nous avons fait notre part de chemin, parfois en imposant des sacrifices à nos populations, il appartient désormais aux pays du nord de tenir leurs engagements financiers », insiste le ministre de l’Environnement d’un pays du Sahel, en proie à la désertification.

Les pays africains souhaitent également profiter de l’opportunité offerte par la COP 21 pour faire avancer le dossier de l’accès à l’électricité sur le continent. L’initiative de l’ancien ministre français de l’Ecologie Jean-Louis Borloo pour apporter l’électricité à près de 650 millions d’Africains sera défendue en marge de la COP21. Ce projet qui bénéficie du soutien du président Hollande a été bien accueilli par les pays africains. Mais, où trouver les 50 milliards de dollars nécessaires pour le fonds d’amorçage et les 5 autres milliards de dollars annuels pour relever le pays d’une électrification totale du continent ? Il y a fort à parier que la Conférence des Nations unies sur le climat ne fera pas avancer concrètement ce projet.

Chacun pour soi

Même sur leurs autres revendications, les pays africains pourraient repartir les mains vides. Alors qu’elle avait dégagé une stratégie commune pour la conférence de 2009 à Copenhague, l’Afrique est arrivée à la COP 21 en ordre dispersé.

Chaque Etat a défini, dans son coin, ses engagements chiffrés et les a transmis à la France presque secrètement. Les pays d’Afrique centrale, par exemple, disposent d’un mécanisme commun appelé Commission des forêts d’Afrique centrale et d’une Conférence des ministères en charge des forêts d’Afrique centrale (COMIFAC). Pourquoi n’ont-ils pas préparé la COP ensemble ? Pourquoi n’ont-ils pas mis sur la table de la COP21 des engagements communs alors que les forêts et les défis qu’elles posent sont transnationaux ?

Il est exact que l’Afrique a des arguments pour soutenir ses revendications pendant les négociations de Paris : elle consomme 3% d’énergie mondiale seulement, elle émet moins de 4% de gaz a effet de serre. Elle est cependant la première la première victime des effets du changement climatique avec la baisse de la pluviométrie suivie des chutes des récoltes dans le Sahel, l’érosion maritime dans le Golfe de Guinée.

Les pays africains pouvaient légitimement donc exiger à Paris la fin de l’injustice climatique. Mais pour cela, il fallait construire un rapport de force favorable dans la confrontation avec les grands pollueurs de la planète tels que la Chine, les Etats-Unis, l’Arabie Saoudite, l’Inde, la Russie, l’Australie, le Japon. Face à ces puissances énergétiques et économique, la stratégie d’une Afrique, une seule voix aurait permis au continent d’être entendu. Ce n’est pas le choix qui a été fait à Paris.