Une hyper inflation paupérise les Égyptiens

La période de Ramadan a révélé une vulnérabilité croissante de plus de 100 millions d’égyptiens à l’inflation, notamment alimentaire. Touchant traditionnellement les plus pauvres, celle-ci grignote aussi les revenus des classes moyennes avec une augmentation des prix des denrées alimentaires de 31% sur l’année 2022.

Mateo Gomez

De plus en plus d’égyptiens ont été forcés de revoir à la baisse la quantité et qualité de leur alimentation lors du Ramadan, qui a eu lieu au printemps. La viande, surtout, passe de plus en plus à la trappe: le prix du bœuf est passé de 5,8 dollars états-uniens à 9 dollars, pendant que le prix du poulet a doublé. Ces deux viandes forment une partie essentielle de la cuisine arabe et méditerranéenne.
Même certains des égyptiens les plus aisés ont renoncé a organiser leurs traditionnels banquets caritatifs ouverts à tous au moment de la rupture du jeûne. Outre la viande, l’inflation du grain se fait puissamment sentir depuis février 2022 avec l’éclatement de la guerre en Ukraine, et impacte durablement les prix de la farine et du pain. En 2021 pas moins des trois-quarts des importations de blé égyptiennes provenaient soit d’Ukraine soit de Russie. Une calamité pour la république arabe, qui figure parmi les plus gros importateurs de blé au monde. Aujourd’hui, l’ancien panier à pain de l’Empire Romain couvre moins de la moitié de sa consommation nationale de blé avec sa production locale, qui s’élève à environ 20 millions de tonnes par an.

A l’inflation alimentaire de 31% s’ajoute une dépréciation de la livre égyptienne, qui rend les importations plus chères car il faut maintenant débourser plus de livres pour la même quantité, ce qui augmente les prix. Le pouvoir d’achat s’en trouve fortement affecté. Selon une étude de l’International Food Policy Research Institute (IFPRI, 2022), près de la moitié de la population ont réduit leur alimentation, et 70% optent aujourd’hui pour des produits moins chers mais surtout moins nutritifs, ce qui nuit à leur santé sur le long terme, et augmente les risques d’obésité et malnutrition. Les plus pauvres, qui habitent majoritairement les zones rurales, voient la précarité augmenter, eux qui consacraient déjà avant l’inflation la moitié de leurs revenus à l’alimentation. Il se peut que la croissance s’en trouve durablement affectée.