Mahamadou Issoufou porte plainte contre Sylvain Itté

Offensé par les « calomnies » de l’ambassadeur Sylvain Itte, qui l’accuse d’avoir joué un rôle dans le coup d’Etat contre son dauphin le 26 juillet, l’ancien Président Mahamadou Issoufou a fait publier par son avocat du Niger un texte de démenti en prélude à une action en justice.

Dans ce communiqué publié mercredi par Me Illo Issoufou, avocat au barreau du Niger, Mahamadou Issoufou dément « avec force » les propos tenus par Sylvain Itté « lors de son audition par la commission défense de l’Assemblée nationale française », le 29 novembre dernier. Le parrain du guri système, le nom donné par les Nigériens à la mise en coupe réglée de leur pays par le parti socialiste au pouvoir, voit dans la publication de cette audition à huis-clos « un agenda destiné à déconstruire tous (ses) efforts » déployés « au plan national et international ». 

Il proteste de son innocence et accuse le diplomate de ne verser « aucun élément probant » à l’appui de ses accusations. Il admet cependant avoir rencontré le 28 juillet en compagnie de Sylvain Itté le général Abdourahamane Tiani, le patron de la Garde présidentielle tombeur de Mohamed Bazoum. Mais sa proposition de restauration du Président Bazoum « dans le cadre d’une solution négociée », dit-il, a reçu une fin de non recevoir du général Tiani, dit-il. Ce n’est pas lui, non plus, qui a fait venir le général Salifou Modi pour disperser les manifestants en train d’attaquer l’ambassade. Syvain Itte s’était dit convaincu que la dispersion de la foule hostile par le général Modi faisait suite à un appel téléphonique d’Emmanuel Macron à Mahamadou Issoufou.  

A la question posée par des députés sur les raisons pour lesquelles la France n’avait pas vu venir le coup d’Etat, Sylvain Itté avait répondu que « ce coup d’Etat est dû à un paramètre que personne ne pouvait imaginer : l’implication directe de l’ancien Président Issoufou dont on peut avancer sans grand risque de se tromper qu’il a fomenté ou pour le moins accompagné le coup contre son successeur. » Mahamadou Issoufou lui fait répondre que les renseignements français n’étaient pas davantage au courant des tentatives de putsch antérieures, « en particulier celle intervenue dans la nuit du 30 au 31 mars à 48 heures de l’investiture du Président Bazoum. » Et d’enfoncer le clou : « cette défaillance ne saurait donc justifier l’implication de l’ancien Président Issoufou Mahamadou dans les événements du 26 juillet. » 

Il dément une autre affirmation du diplomate selon laquelle le conseil des ministres du jour du coup d’Etat devait enregistrer la création d’une nouvelle société pétrolière, cristallisant un conflit entre le Président Bazoum et son ministre du Pétrole, le fils de Mahamadou Issoufou, actuellement emprisonné. « Le prétendu différents ne serait qu’une pure création » de Sylvain Itte, poursuit l’avocat. 

Habilement, tentant de flatter le général Tiani qui dirige désormais le Niger, le communiqué estime que Sylvain Itte « infantilise » le militaire en affirmant que l’ancien Président a envoyé « le chef de la Garde présidentielle, son homme, renverser celui qui était son camarade de parti depuis trente ans. » Surfant sur la vague très anti-française qui prévaut au Niger depuis les menaces d’intervention militaire de Paris et le bras de fer entre Emmanuel Macron et la junte au pouvoir, Mahamadou Issoufou accuse Sylvain Itte d’une vision « révolue » et coloniale » « qui n’honore pas la France. »