L’ambassadeur de France en Côte d’ivoire, Gilles Huberson, a été brutalement rappelé à Paris, pour des raisons administratives, soit moins de deux mois avant l’élection présidentielle du 31 octobre 2020. Un véritable séisme au Quai d’Orsay!
En poste depuis septembre 2017, l’ ancien Saint-Cyrien et officier de gendarmerie a accompli un séjour de trois années, ce qui est le temps normal d’exercice des fonctions d’ambassadeur. La discrétion donnée a ce rappel à Paris accrédite un rappel définitif et non pas un rappel « pour consultation », qui est toujours assimilé à un différend diplomatique sérieux entre deux États. Cela ne semble pas être le cas, même si la décision de Alassane Drame Ouattara de se renier et de finalement de solliciter un troisième mandat présidentiel n’a guère été appréciée à l’Élysée.
Avec les soucis au Sahel et notamment au Mali, le » jusqu’au boutisme », d’Alpha Condé et le risque de chaos en Centrafrique avec un processus électoral devenu surréaliste et la probable réélection faussée de Faustin- Archange Touadera, la fin d’année sera agitée.
Des mouvements inhabituels
Dans la plupart des diplomaties, on ne change pas d’ambassadeur à la veille d’élections présidentielles. Les chancelleries sont particulièrement précieuses pour rendre compte de la situation et éventuellement pour peser sur les événements. La diplomatie française innove. Des élections présidentielle et législatives auront lieu prochainement lieu en Guinée (18 octobre), Côte d’Ivoire ( 31 octobre) et Centrafrique ( 27 décembre). Dans ces trois pays, ( cela devrait être confirmé à Abidjan), un nouvel ambassadeur aura la lourde tâche de représenter la France dans une période qui s’annonce de tous les dangers.
Recherche ambassadeur en urgence
Jean-Pierre Grosgurin a quitté, début septembre 2020, son ambassade de Conakry pour prendre celle de Bangui qu’ avait quittée Eric Gérard… après seulement deux années de séjour. A cette occasion , la France battra un record mondial avec six ambassadeurs depuis l’élection de François Hollande en mai 2012 et la toute-puissance de Jean-Yves Le Drian d’abord en qualité de ministre de la Défense , puis sous le président Macron, de ministre des Affaires étrangères. Quant à l’ambassade de France à Abidjan, elle attendra son nouveau locataire. Trouver le bon profil pour cette importante ambassade ne s’improvise pas. Généralement, une nomination avec les instructions qui suivent prend plusieurs mois. Il reste quelques jours au Quai d’Orsay pour désigner un diplomate qui devra également recevoir l’agrément de Alassane Drame Ouattara.
Un départ inopiné
La notion de » raisons administratives » exclue toute interprétation politique ou demande expresse venant du pays d’accréditation. Gilles Huberson (59 ans) avait de bonnes relations avec le président ivoirien et son administration. Il va de soi que les partis d’opposition ou leaders politiques de l’opposition n’ont rien à voir avec des « raisons administratives ». Il y a donc probablement dans la situation personnelle de Gilles Huberson, un motif suffisamment sérieux pour exiger un rappel précipité à Paris, de surcroît étant donné le contexte ivoirien.
Un fait dans la manière de servir en Côte d’Ivoire et très probablement dans l’un de ses anciens pays de service – des indiscrétions évoquent des révélations lorsqu’ il était ambassadeur au Mali ( 2013-2016)- pourrait motiver ce départ qui est peu apprécié du côté du président Ouattara car il risque d’être exploité politiquement par ses opposants.