Le journaliste Emmanuel Razavi, dont une partie de la famille a été massacrée en Iran, affirme que le régime de Téhéran s’est transformé en une véritable mafia, se livrant au trafic de drogue, d’armes, d’or, et même à la prostitution. Des accusations largement étayées.
En 1979, le magazine Times n’hésite pas à qualifier l’ayatollah Khomeini d’« homme de l’année », alors que selon Emmanuel Razavi, auteur de « La face cachée des mollahs », il s’agit d’un « psychopathe ». Qui ne pouvait mettre en place qu’un système aboutissant au « chaos et à la violence » (*). Le journaliste, spécialiste du Moyen-Orient, collaborateur de Paris Match, rappelle que ce religieux ne cachait guère ses intentions. N’avait-il pas écrit que « la guerre sainte signifie la conquête des territoires non musulmans », et que « nous n’avons d’autre solution que de renverser tous les gouvernements qui ne reposent pas sur les purs principes islamiques, et sont donc corromps et corrupteurs » ?
Toutefois cet ouvrage ne parle guère d’islam et de religion, mais bien davantage de liens avec des mafias en Amérique du Sud et en Russie, de « syndicat du crime », avec à sa tête un parrain, l’ayatollah Ali Khamenei, qui a succédé à l’ayatollah Khomeini. Pour Emmanuel Razavi, les mollahs et les gardiens de la révolution islamique ne s’intéressent guère au bonheur du peuple iranien. Leur principale préoccupation étant de maintenir la terreur afin de continuer à s’enrichir. Le journaliste ne parle pas en millions mais en milliards de dollars. Cette mafia se sait néanmoins sur un siège éjectable. « Quelque 10 milliards de dollars auraient quitté l’Iran au cours des derniers mois de l’année 2022, en raison de l’inquiétude face à la contestation anti-régime », écrit-il. Des milliards qui prendraient la direction de la Turquie, des Émirats arabes unis, du Qatar, de Oman, de la Géorgie, du Kazakhstan, du Turkménistan. Mais aussi du Venezuela.
Qui pourrait renverser les mollahs ?
L’auteur nous livre une information inédite. Alors que l’Organisation des moudjahidines du peuple iranien (OMPI) était tenue, jusqu’à présent, à l’écart par le reste de l’opposition, notamment par les royalistes, Mustafa Hijri, le leader du Parti démocratique du Kurdistan d’Iran (PDKI) « s’est rapproché de Maryam Radjavi », à la tête de l’OMPI, ajoutant qu’il s’agit d’« une alliance qui interroge ». Maryam Radjavi serait critiquée par une majorité d’Iraniens qui lui reprochent de s’être mis « sous la protection de Saddam Hussein au début des années 1980 ».
Emmanuel Razavi rappelle également les liens souvent inconnus entre les Frères musulmans égyptiens, sunnites, avec les mollahs iraniens chiites. Ces liens ont été noués par le philosophe iranien Ali Shariati, l’inspirateur de la révolution islamique, mais qu’il ne connaîtra pas, étant mort en Angleterre en 1977. Et par Navvâb Safavi, le fondateur des Fedayins de l’Islam, une organisation chiite. Ce dernier avait rencontré à Jérusalem en 1953 Syyid Qutb, le principal penseur de la Confrérie, auteur de A l’ombre du Coran, pendu par Nasser en 1966. « A dire vrai, l’influence de Qutb est telle chez les clercs de la mouvance khomeiniste qu’en 1984 un timbre à son effigie est imprimée par la République islamique d’Iran », raconte le rédacteur de « La face cachée des Mollahs ».
(*) « La face cachée des Mollahs. Le livre noir de la République islamique d’Iran », Les éditions du Cerf, février 2024, 226 pages.