Pulchérie Gbalet, icône de la société civile ivoirienne, persiste et signe

L’icône de la société civile ivoirienne, Pulchérie Gbalet, présidente de l’organisation ACI(Alternative citoyenne ivoirienne), qui vient d’être libérée de prison, se prononce en exclusivité pour Mondafrique sur la situation en Côte d’Ivoire. Soumise à de strictes conditions par la justice du régime duprésident Ouattara après sa libération provisoire, elle ne peut revenir elle même sur les causes de sa seconde incarcération.

La case prison

Rappelons toutefois qu’après avoir été incarcérée du 15 août 2020 au 28 avril 2021 pour avoir protesté contre le 3  ème mandat inconstitutionnel du chef de l’État, elle a été nouveau emprisonnée du 22 Août 2022 au 3 février 2023) venait de son voyage au Mali, après lequel elle a proposé de négocier pour faire libérer ses 83 compatriotes incarcérés à Bamako.
On ne connait jusqu’à aujourd’hui ni le statut  de ces forces spéciales régulières, ni leur projet. Ces supplétifs oeuvraient-ils pour renverser le régime de Bamako? La question reste posée.

La Côte d’ivoire s’enferre dans ses mensonges face au Mali

Un entretien de Michel Galy, les titres et Inters sont de la rédaction de Mondafrique

« On avait donné des instructions fermes au personnel pénitentiaire pour que je sois isolée »

« Sur le fond, il n’y a guère de différence entre mes deux séjours à la MACA ; la prison centrale d’Abidjan, ,du fait que les deux arrestations constituent  une entrave à ma liberté d’expression.  Et c’est cela le plus important.  L’État de Côte d’ivoire a un problème avec le respect des principales caractéristiques d’un état démocratique : séparation des pouvoirs,  respect des libertés et souveraineté du peuple à travers le choix de nos représentants dans les urnes.

Les conditions de détention de ma seconde arrestation étaient plus difficiles que celles de la première. On avait donné des instructions fermes au personnel pénitentiaire pour que je sois isolée. On mutait immédiatement toute garde qui osait me manifester de la sympathie et on persécutait les détenues proches de moi. J’étais très surveillée et tout ce que je faisais ou disais était rapporté

Le refus des visites

On refusait également que je reçoive des visites en dehors de ma fille. Le Directeur de l’administration pénitentiaire avait donc publié un communiqué mensonger sur mon droit de visite. Il n’y a que 3 personnes de ma famille qui ont reçu le droit de me visiter.

J’ai été libérée suite à un appel de mes avocats après le 5ème refus de ma mise en liberté provisoire.  Une audience de la cour d’appel a donc été programmée le 13 février 2021,  et contre toute attente, elle a eu lieu le 3 février et été sanctionnée par ma mise en liberté provisoire attachée à un sévère contrôle judiciaire. 

Des soutiens très larges

Du coté des personnalités politiques ivoiriennes, j’ai reçu l’appui constant et réitéré du président Laurent Gbagbo (PPPA CI) et du président Henri Konan Bédié (PDCI RDA), ainsi que de nombre d’autres personnalités politiques dont des partisans de Soro s’exprimant via la presse et les réseaux sociaux.

Certaines ONG des droits de l’homme ont été particulièrement actives pour ma libération, notamment M. Kokou Delmas d’Amnesty international Cote d’Ivoire et M. Éric-Aimé Semien de l’observatoire Ivoirien des Droits de l’Homme (OIDH), le Mouvement Ivoirien des Droits de l’Homme (MIDH) et une coalition de sept organisations de la société civile dont la Coalition des des indignés de Côte d’Ivoire.
Quant aux appuis internationaux,  je ne peux savoir de façon exhaustive toutes les interventions en ma faveur,  mais je sais que toute la diaspora africaine s’est mobilisée (notamment par une grande manifestation au Trocadéro à Paris, aux USA, au Canada et en Italie),  mon ami le politologue Michel Galy, le parti communiste français(avec le député Lecoq), la France Insoumise (et les interventions du député Arnaud Legal) et plusieurs TV panafricaine tels que Afrique Média.

A ma sortie j ai malheureusement trouvée une situation économique encore plus dégradée pour le niveau de vie des populations, avec une inquiétante restriction des libertés encore plus renforcée, de même que une aggravation de l’insécurité sur tous les plans.

Une démocratie d’opérette

Des réformes urgentes s’imposent , dans l’intérêt du peuple, et même du régime qui ne sait pas qu’il danse sur un volcan. Il y a urgence à assainir l’environnement électoral, puisque tous nos conflits portent sur les élections. Notre programme, le voici: 

  • Il faut arrêter de ruser avec la réconciliation et organiser un dialogue direct et franc comme l’a relevé le Président Bédié lors de la remise du prix Houphouet Boigny pour la  paix le mercredi 8 février à Yamoussoukro, et pour cela nul ne devrait être exclu de ce dialogue au nombre des forces vives de notre pays -dont Guillaume Soro en exil, et la société civile engagée que nous représentons ;

  • Il faut réviser les cadres institutionnels ( réforme de la CEI et du Conseil constitutionnel), juridique (code électoral) et opérationnel des élections (tout le processus, depuis la révision du découpage jusqu’à la proclamation publique des résultats par bureau de vote, en passant par l’actualisation informatisée de la liste électorale),  pour garantir une transparence dans les futures élections  de même que la souveraineté du peuple

  • Il ne faut pas certains candidats pour un VRAI nouveau départ démocratique, 

  • Il faut former des militants des partis politiques sur les valeurs démocratiques -dont la tolérance qui devrait garantir des élections apaisées ;

  • Il faut éradiquer phénomène des microbes (enfants des rues en bandes hyper violentes) qui.constituent une milice en période électorale ;enfin procéder à une réforme de toutes les institutions qui sont toutes soit budgétivores, soit en dysfonctionnement.Au plan économique,  sortir de la démagogie,  de la gabegie et du népotisme pour mettre en œuvre une politique saine de formation et d’emploi des jeunes pour les délivrer de la migration et du chômage,  puisque plus de 75% de la population est considérée comme jeune en Cote d’Ivoire

    L’inflation, voici l’ennemi

    De manière plus spécifique, la population souffre beaucoup de l’augmentation des prix, à tel point qu’un mouvement spontané de refus de la hausse des tarifs de téléphonie a très récemment pris le gouvernement de court ; il est probable que eau , électricité , loyers suivent, tant le peuple est oppressé dans un quotidien invivable.

    Notre projet à court terme est renforcer à la lutte contre la cherté de la vie et contre les injustices. A moyen terme, nous voulons renforcer notre politique de communication. Nous espérons aussi trouver les moyens de poursuivre notre programme sur la réconciliation.

     

       « La répression ne fait que prouver l’absence d’un État de droit ». Pulchérie Gbalet

    À long terme, nous espérons trouver les moyens d’une campagne nationale pour sensibiliser les populations sur les valeurs démocratiques et citoyennes, de même que sur  les critères de choix d’un bon candidat, pour garantir que 2025, date de la prochaine élection présidentielle, ne se passe pas dans la violence.

    Pour terminer, il est important de souligner que malheureusement,  la majorité ignore le rôle de la vraie société civile. Il est donc temps de sensibiliser la masse sur le sujet , de même que sur les valeurs démocratiques et citoyennes,  pour avoir des citoyens de qualité,  mais aussi demander aux pouvoirs publics de donner toute sa place à la société civile au lieu de la réprimer. La répression ne fait que prouver l’absence d’un État de droit: ce qui est très humiliant pour notre pays, qui mérite mieux. »