Le Qatar vainqueur de son bras de fer avec ses voisins du Golfe

Le président des Émirats arabes unis, Cheikh Mohammed bin Zayed al-Nahyan, dit MBZ, s’est rendu lundi 5 décembre à Doha (Qatar) pour la première fois depuis 2017, date à laquelle les Émirats arabes unis ont organisé un boycott de leur voisin qatari. Le président émirati, principal promoteur du boycott de Doha en 2017, pousse à un dégel des relations avec son voisin du Golfe à l’approche de la Coupe du monde

La coupe du monde de football aura donc marqué un dégel des relations entre le Qatar et ses puissants voisins. Trois ans durant, l’Arabie Saoudite, les Émirats arabes unis, l’Égypte et le Bahreïn ont tenté d’isoler le Qatar sur la scène internationale. Cette offensive s’est officiellement terminée en 2021 et les relations entre les pays ont repris une apparence de normalité.

Le prince Mohamed Ben Salmane a même été filmé assis aux côtés de Sheikh Tamim al Thani lors de la cérémonie d’ouverture du Mondial de footbal. Les fans soudiens sont les principaux détenteurs de billets après le Qatar et les États-Unis et les Émirats arabes unis – dont l’équipe n’a pas participé à la Coupe du monde – ont organisé des dizaines de vols quotidiens vers le Qatar.

Que reprochaient les États du Golfe et l’Egypte au Qatar ? De financer et soutenir des réseaux islamistes au Moyen-Orient – notamment les Frères Musulmans – et d’entretenir une relation chaleureuse avec l’Iran. Un ultimatum en treize points a même été envoyé au Qatar qui réclamait la fermeture d’ »Al Jazeera », la chaine de télévision qui fut un levier très efficace en faveur du « Printemps arabe » de 2011-2012, la rupture des liens avec la mouvance des Frères musulmans, la fin de l’aide apportée aux djihaidstes du « Front al Nusra » en Syrie et la rupture de la coopération militaire avec l’Iran.

Le Qatar qui a refusé cet ultimatum, s’est tiré de ce conflit à son avantage.  

L’échec du boycott du Qatar

 L’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis auraient pu envahir le Qatar et régler son compte à la famille al Thani. Mais comment envahir un pays qui, si faible soit-il, abrite sur son territoire l’une des plus grandes bases militaires américaine dans le monde ? A l’évidence, les Etats Unis n’avaient pas validé l’opération anti-Qatar.

A peine les frontières avec le Qatar ont-elles été fermées que la Turquie et l’Iran ont affiché leur solidarité avec le nouveau paria, maintenu leurs relations avec la famille al Thani et multiplié les vols aériens avec Doha.

Outre la Turquie et l’Iran, les États européens aussi ont maintenu leurs relations avec Doha. Tous se sont affiché à la Military Maritime Fair au Qatar en mars 2018 et certains pays comme l’Italie ont même intensifié leurs contrats d’achat de gaz. Aucun des grands pays consommateurs d’énergies fossiles n’entendait isoler un pays qui est l’un des plus grands producteurs de gaz au monde, un gros acheteur d’armes et un important investisseur sur les marchés financiers et immobiliers.

Par ailleurs, le Qatar avait les moyens d’une guerre d’usure. Ce pays dispose d’un fonds souverain de 355 milliards de dollars, de 30 milliards en actions et obligations, et d’investissements colossaux réalisés à l’étranger. La maison royale saoudienne, en revanche, est surendettée en raison des aides importantes en armes et en argent accordées à divers mouvements miliciens en Syrie, au Yémen et en Irak.

Les Saoudiens et les Emirats ont rangé leurs armes, mais ils continuent de penser que les relations du Qatar avec l’Iran et les Frères Musulmans menacent leur sécurité. La vengeance est un plat qui se mange froidL

Caroline Bright