Alors qu’une vague de retrait – concertée ou non – de la présence militaire française en Afrique se poursuit avec l’annonce faite par le président de la Côte d’Ivoire, Alassane Ouattara, la fermeture de la base militaire française au Gabon n’est pas à l’ordre du jour. Mondafrique vous explique.
En Centrafrique, au Mali, au Burkina Faso et au Niger, l’armée française, présente notamment dans le cadre des opérations de lutte contre le terrorisme, a été contrainte de fermer ses bases et de se retirer. Dans certains cas – comme en Centrafrique et au Mali – ce retrait a ouvert la voie à l’arrivée de la Russie, par l’intermédiaire du groupe Wagner, aujourd’hui rebaptisé Africa Corps, ainsi qu’à d’autres forces, telles que les soldats rwandais en Centrafrique.
« Nous avons décidé du retrait concerté et organisé des forces françaises en Côte d’Ivoire »
Le Tchad, longtemps perçu comme un bastion de la présence militaire française depuis les années 1970, a également acté le départ des troupes françaises. Le 28 novembre 2024, le président Mahamat Idriss Déby Itno, désormais maréchal à 40 ans, a jugé les accords de défense avec la France « complètement obsolètes face aux réalités politiques et géostratégiques de notre temps ».
Au Sénégal, le président Bassirou Diomaye Faye a annoncé le 31 décembre 2024 « la fin de toutes les présences militaires étrangères au Sénégal dès 2025 ».
La véritable surprise est venue du président ivoirien Alassane Ouattara, qui a déclaré lors de son discours à la nation le 31 décembre 2024 : « Nous pouvons être fiers de notre armée, dont la modernisation est désormais effective. C’est dans ce cadre que nous avons décidé du retrait concerté et organisé des forces françaises en Côte d’Ivoire (…) dès ce mois de janvier 2025. »
L’exception gabonaise
Au Gabon, où le général Brice Oligui Nguema a pris le pouvoir le 30 août 2023 par un coup d’État, la question du départ des forces françaises ne semble pas à l’ordre du jour. Si certains y voient une stratégie pour consolider son pouvoir sans se brouiller avec Paris, dont les liens historiques et multiformes avec Libreville sont bien connus (la France accueille la première diaspora gabonaise et a formé l’essentiel des cadres gabonais), d’autres soulignent une réorientation profonde de la présence militaire française.
« Le pôle opérationnel de coopération militaire de l’Afrique centrale »
La France a amorcé une transformation de sa présence militaire au Gabon, désormais axée sur la formation des forces locales. L’inauguration, en juillet 2024, de l’ Ecole d’Administration des Forces de Défense de Libreville (EAFDL- créée en 2022) dans le camp général de Gaulle à Libreville, illustre ce changement. Cette base, qui comptait 350 militaires français, verra ses effectifs réduits à 200 d’ici 2025. Depuis 2022, les éléments français au Gabon se présentent comme « le pôle opérationnel de coopération militaire de l’Afrique centrale ». Ce dispositif privilégie le transfert de compétences et la formation des forces gabonaises, des unités d’élite aux sapeurs-pompiers, offrant un encadrement de haut niveau adapté aux besoins du pays.
La coopération militaire Franco- Gabonaise se traduit également par la présence de nombreux officiers français dans le forces armées gabonaises dans le cadre de la coopération sécurité défense…
Chinois et Américains en embuscade
Le Gabon demeure une terre de convoitises pour d’autres puissances. Avant le coup d’État, des discussions sur l’établissement d’une base militaire chinoise étaient en cours, mais cet intérêt semble avoir décliné sous le nouveau régime. Néanmoins, la coopération militaire avec la Chine reste forte, notamment en matière de fourniture d’équipements, tandis que de nombreux officiers gabonais, dont le général Antoine Balékidra, commandant par intérim de la Garde républicaine, ont été formés en Chine.
Par ailleurs, les relations militaires avec les États-Unis s’intensifient. Le général Brice Oligui Nguema a bénéficié d’une attention particulière du Département d’État et du Pentagone lors de son dernier voyage à Washington. L’idée d’une base militaire américaine au Gabon, en discussion depuis deux décennies, pourrait refaire surface.
Le spectre russe
Enfin, la Russie pourrait chercher à étendre son influence au Gabon. Bien qu’elle dispose déjà de relais parmi les proches collaborateurs du général Oligui Nguema, elle pourrait avancer très prochainement ses pions surtout si à Paris on critique un peu trop fermement les résultats des élections présidentielles prévues en août 2025 et dont Brice Oligui Nguema sera très certainement donné vainqueur.
Mais nous n’en sommes pas encore là…
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