Le dialogue national proposé par le pouvoir gabonais qui s’est tenu à Agondje en février – mars 2017 devait permettre d’avoir « une démocratie plus forte » avec notamment des « élections apaisées ». Ce dialogue posait d’emblée une équation impossible à résoudre: comment redorer l’image d’un président (et de son régime), largement ternie par la crise post électorale d’août et septembre 2016, tout en ne faisant aucune réforme susceptible de contraindre Ali Bongo de quitter le pouvoir autrement que par sa propre volonté?
Six mois après ce vrai faux dialogue, la situation politique gabonaise est toujours totalement bloquée.
Circulez, il n’y a rien à voir
Le cadrage proposé par le pouvoir ne trompe personne : parler de tout, sauf de l’élection de 2016 -ce qui revenait à admettre la victoire d’Ali Bongo, malgré les scores mathématiquement impossibles obtenus notamment dans le Haut-Ogouée. Le tout en invitant des opposants « modérés » soucieux de « l’intérêt supérieur du Gabon » à la grande Kermesse du consensus national. Le « jus d’Okoumé » – le champagne – y a coulé à flot et les « perdiems » -le paiement des frais de déplacement- ont été comme toujours encaissés avec goumandise.
Le pouvoir et l’opposition « modérée » se mirent d’accord sur des réformettes : changement de la Commission nationale autonome et Permanente (CENAP) et Centre Gabonais des Elections (CGE), abaissement de l’âge pour devenir Président de la République de 40 à 18 ans, proclamation des résultats électoraux par le Centre Gabonais des élections et plus par les autorités politiques et administratives (Ministre de l’Intérieur, Gouverneurs, Ambassadeurs…)…. Les « dialogueurs » ont obtenu qu’un comité de suivi des maigres résolutions du dialogue national soit créé.
Entourloupe générale
L’entourloupe est venue du ministre chargé du dialogue national gabonais – qui fut également l’avocat d’Ali Bongo – Francis Nkea qui a annoncé sans trémolo dans la voix que les résolutions du dialogue ne s’appliqueraient pas avant 2018. Le « comité de suivi » est donc enterré avant même d’avoir existé.
Ce dialogue devait aussi comme lors des « Accords de Paris » en 1994, déboucher sur une distribution de strapontins pour former un gouvernement d’Union nationale. La « prise de guerre » la plus remarquable fut Réné Ndémezo’o Obiang, ancien directeur de campagne de Jean Ping, principal opposant d’Ali Bongo. L’ossature du gouvernement devra rester « Pédégiste », c’est-à-dire composée de membres du Parti Démocratique Gabonais (PDG) au pouvoir depuis sa création en 1968. Deux mois après « le dialogue national » le gouvernement post dialogue se fait toujours attendre et selon Ali Bongo dans son dernier discours à la nation, il verra le jour très prochainement avec à sa tête le même premier ministre Emmanuel Isozet Ngondet, membre du groupe « des amis du président » dont l’un d’entre eux a publiquement déclaré qu’il n’y a jamais eu de victimes pendant la crise post électorale. Or Ali Bongo lui-même a reconnu lors de l’émission complément d’enquête sur France 2 que « quatre pillards avaient été abattus ».