Le frère de Brice Oligui Nguema accusé d’actes de torture

Brice Oligui Nguema en Novembre dernier au Palais Rénovation à Libreville (Gabon) .

Un homme accuse formellement le frère du général Brice Oligui Nguema, le lieutenant-colonel Pierre Bibang Bi Nguema, de l’avoir torturé dans le cadre d’une véritable expédition punitive menée en dehors de tout cadre légal.

C’est l’histoire qui agite la toile gabonaise, mais qui, curieusement, n’a pas fait réagir les médias mainstream du Gabon ni le gouvernement gabonais. Tout commence le 15 juin 2024, en après-midi, lorsque Hans Otounga Obame est enlevé chez lui à Libreville par des hommes armés dans une voiture appartenant à l’administration gabonaise et immatriculée au ministère des Finances.

« Fais ta dernière prière, là on va aller te tuer »

Hans Otounga Obame est menotté et une cagoule est mise sur sa tête. Il est conduit dans une villa située au nord de la capitale du Gabon par les hommes qui viennent de l’enlever. Cette villa situé au Cap Estérias dans la forêt classée de la Mondah est un véritable centre de torture et de détention clandestin, selon des témoignages qui nous sont parvenus des personnes y ont été assassinées. « Fais ta dernière prière, là on va aller te tuer », lui lance l’un de ses ravisseurs. Là, deux chiens d’attaque le reniflent pour détecter son odeur en cas d’évasion, puis il est conduit dans une pièce qui est en réalité une salle de torture avec des « échafaudages » ainsi que d’autres instruments de torture, dont des fouets.

Hans Otounga Obame est alors torturé par ses bourreaux, qui l’accusent d’être le frère d’un activiste gabonais vivant en France, et lui disent qu’ils agissent ainsi en représailles. Outre les coups divers, Hans Otounga Obame est torturé à l’électricité, notamment dans ses parties intimes. Un de ses bourreaux lui a sauté dessus à plusieurs reprises. Hans Otounga Obame parle d’une quinzaine de personnes dans la villa, constituées en équipes, qui se relayaient pour le torturer : « Ils n’ont jamais arrêté de taper » . Il explique que pour stopper ses saignements, ses bourreaux ont versé du ciment colle sur ses blessures.

Photos du corps supplicié de Hans Otounga Obame publiées par l’interessé.

« Le colonel Power »

Hans Otounga Obame fait une révélation très importante : ses bourreaux avaient pour chef un certain colonel Power, qui se trouve être le colonel Bibang Bi Nguema, le petit frère de Brice Oligui Nguema, qui a pendant plusieurs années dirigées la très secrète et redoutée Section d’Intervention Spéciale (S.I.S.) de la Garde Républicaine du Gabon. Hans Otounga Obame est formel : « Il est venu me taper (…) C’est lui [le lieutenant-colonel Bibang Bi Nguema] qui disait de taper. Quand ils sont fatigués, ils changent de groupe, il dit tapez ! »

Alors que l’alerte est donnée, l’escadron de la mort dirigé par le « colonel Power » ramène Hans Otounga Obame très mal en point au palais présidentiel du Gabon, à la Direction générale des Services Spéciaux (DGSS – Garde Républicaine), qui refuse « le colis » au vu de son état.

Hans Otounga Obame est alors remis à la Direction Générale des Recherches (DGR – Gendarmerie, mais placée sous l’autorité directe du Président du Gabon, Ndlr.), située à deux pas du palais présidentiel gabonais, qui va confirmer à ses proches qu’il est bien dans leurs locaux, mais qu’ils ne peuvent pas le voir. Certains gendarmes essaient de trouver des subterfuges pour que la famille puis l’avocat de Hans Otounga Obame, Me Jean Paul Moubembé ne puissent le voir. « Voilà pourquoi ils m’ont gardé longtemps à la DGR, parce que je ne marchais plus », dira plus tard Hans Otounga Obame, qui sera finalement « libéré » après plusieurs jours et un passage à l’hôpital militaire de Libreville d’où il parviendra à donner l’alerte et aussi grâce à la réactivité de son avocat Me Jean Paul Moubembe

Le courrier de Me Jean Paul Moumbembe adressé au Procureur de la République informant de la situation de Hans Otounga Obame.

Système répressif toujours en place

Le témoignage précieux de Hans Otounga Obame, en plus de livrer des détails supplémentaires sur les agissements des escadrons de la mort qui sévissent au Gabon, montre que le système répressif gabonais est toujours en place et très fonctionnel. Selon nos informations, cette unité de la Garde Républicaine, fondée par Ali Bongo en 2009, est familière de ce genre d’actions. Bénéficiant de la faveur de Brice Oligui Nguema, qui l’a étendue à 300 hommes qu’il connaît personnellement, ils sont prêts à tout pour lui, y compris au « sacrifice suprême » qu’ils mentionnent dans un chant composé par Brice Oligui  Nguema lui-même.

Au moment où nous terminons cet article, la présidence du Gabon n’a pas officiellement réagi…

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