Ramtane Lamamra, l’homme qui avait redonné du tonus à la diplomatie algérienne depuis 2013 suscite les plus grosses craintes dans le camp du clan présidentiel à Alger.
Les ambitions de l’ancien diplomate qui avait su gagner la confiance des Algériens et leur estime grâce à son style, son professionnalisme et son aura, ont fortement dérangé le clan présidentiel.
L’entourage et proches du président Bouteflika ne veulent pas d’un concurrent qui peut faire de l’ombre à celui qui sera choisi pour remplacer le charismatique Abdelaziz Bouteflika si ce dernier s’avère incapable de poursuivre son règne au-delà de 2019. Ramtane Lamamra s’est retrouvé sur un siège éjectable depuis qu’il a refusé de cautionner la gouvernance de celui qui était alors premier ministre, Abdelmalek Sellal.
Un solide carnet d’adresse
Ses clashs successifs avec Sellal ne vont pas arranger sa situation auprès des Bouteflika. Son adversaire juré, Abdelkader Messahel, longtemps simple ministre délégué aux questions africaines, va en profiter allègrement pour lui voler le poste dont il a toujours rêvé et devenir le chef de la diplomatie algérienne. Selon nos sources généralement très bien informées, Bouteflika avait pris la décision de confier la diplomatie du pays à Messahel depuis mars dernier. Mais il a attendu jusqu’au 25 mai pour confirmer officiellement ce choix. Il faut dire qu’il n’était pas aisé de se débarrasser d’un homme de la carrure de Lamamra.
Ses réseaux à l’ONU et à l’Union Africaine lui conféraient un certain prestige. Preuve en est, le jour de son départ de son poste, Lavrov et John Kerry l’appellaient pour prendre de ses nouvelles, témoignent nos sources. Fort de ses relations, Lamamra n’avait pas caché ses ambitions dans son travail et il avait à maintes reprises essayé d’imposer le changement au sein du corps diplomatique. Mais sa feuille de route fut longtemps bloquée et ralentie par le Président Abdelaziz Bouteflika qui voyait d’un très mauvais oeil la montée en puissance de ce ministre potentiellement menaçant pour l’avenir du clan.
Guerre de réseaux
Proche d’Ahmed Ouyahia, son ancien consisciple à l’ENA et avec lequel il entretient toujours de très bonnes relations, Lamamra aurait pu tisser l’alliance qui pouvait mettre en péril les plans de succession du clan présidentiel. Autre scénario possible, le général-major Ahmed Gaïd Salah, l’homme fort de l’armée qui ne veut guère d’une succession « familiale » qui verrait Said Bouteflika prendre le pouvoir, pouvait être tenté de pactiser avec le diplomate algérien.
Il s’agissait donc d’enterrer le ministre définitivement. Même après avoir quitté ses fonctions de ministre des Affaires Etrangères, Ramtane Lamamra se verra refuser le poste prestigieux d’ambassadeur à Paris. Du coup, le brillant technocrate prendra sa revanche en décrochant, grâce à ses propres relations, le poste de membre du Haut-Comité consultatif de l’ONU en charge de la médiation internationale. Des fonctions qui peuvent constituer un possible tremplin pour accéder, demain, au Palais présidentiel d’El-Mouradia.