Jouant de malchance dans sa promotion du genre, Emmanuel Macron a procédé à des nominations malheureuses, notamment dans le domaine des relations internationales.
La volonté du président français, Emmanuel Macron, d’établir une égalité homme/ femme dans des nominations éminemment politiques s’est soldée par des choix souvent contre productifs. On se rappelle qu’Alain Juppé, alors premier ministre en 1995, avait congédié brutalement, six mois après leur nomination, neuf femmes ministres. Les « Juppettes » avaient fait les frais de leurs difficultés dans leur ministère, mais aussi de la misogynie ambiante qui était encore bien établie dans le milieu politique.
Le disciple d’Alain Juppé, qu’est Edouard Philippe, s’est probablement remémoré cette affaire tant décriée » des Juppettes », lors des multiples péripéties qu’il a dû subir avec certains membres féminins de son gouvernement ou constater avec de surprenantes nominations à l’international. Revisitons cette galerie d’échecs qui marqueront ce quinquennat.
Marielle de Sarnez et Sylvie Goulard, hors jeu
Le quinquennat venait à peine de commencer, qu’un mois après la nomination du premier gouvernement d’Édouard Philippe, le 17 mai 2017, que le Modem de François Bayrou était contraint d’abandonner trois postes ministériels importants, suite à des accusations portant sur de possibles emplois fictifs concernant leurs assistants parlementaires au Parlement européen. Outre le poste de Garde des Sceaux, ministre d’Etat de la Justice de François Bayrou, Marielle de Sarnez devait abandonner le poste de ministre chargée des affaires européennes. Sylvie Goulard avait déjà décidé de prendre les devants en quittant préventivement le ministère des Armées
. Cela n’empêchera pas Marielle de Sarnez de devenir ensuite la présidente de l’importante commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale. Quant à Sylvie Goulard, dont les compétences étaient nullement remises en cause et qui était appréciée à Bruxelles, elle dut affronter un second retentissant échec avec sa candidature avortée au poste stratégique de Commissaire au Marché unique. Proposée imprudemment par Emmanuel Macron, cette candidature fut rejetée par le Parlement européen.
On se demande comment le président Macron a pu présenter cette candidature improbable, étant donné les procédures en cours contre l’intéressée et les liens rémunérés avec des think tanks lobbyistes, dont l’institut Berggruen. Ce camouflet venant du Parlement européen est surtout celui du président Macron, qui a pu, à cette occasion, mesurer les limites de sa côte de confiance en Europe.
La catastrophique Nathalie Loiseau
Les diplomates du Quai d’Orsay avaient déjà une appréciation très négative de Nathalie Loiseau, leur ancienne directrice des relations humaines puis directrice de l’administration générale. Son limogeage par Laurent Fabius fut un soulagement. Ce n’est qu’au prix d’un lobbying tenace auprès des associations militant pour la parité qu’elle obtint le poste de directrice générale de l’ENA, alors même qu’elle n’est pas une énarque.
Cette juppéiste fut tardivement récompensée par Emmanuel Macron pour remplacer Marielle de Sarnez, au ministère chargé des affaires européennes. Ayant peu de complémentarité avec Jean-Yves Le Drian, ministre de l’Europe et des affaires étrangères, elle fut exfiltrée du gouvernement pour mener la campagne des élections européennes du parti présidentiel.
Rarement, un parti présidentiel aura connu une campagne aussi désastreuse de la part de sa cheffe de campagne. De favori au début, le parti présidentiel arriva derrière le Rassemblement national. Ne pouvant prétendre à aucune présidence du Parlement européen, Nathalie Loiseau est rentrée dans le rang et constitue l’exemple des erreurs de casting ayant d’importantes conséquences politiques, allant bien au-delà de sa personne.
Françoise Nyssen et Laura Flessel, des promesses non tenues
La nomination de Francoise Nyssen au ministère de la Culture était une surprise. Empêtrée dans des affaires de travaux immobiliers et de conflit d’intérêt, la directrice de la maison d’éditions Actes Sud fut remplacée après dix-sept mois de rue de Valois. Cette novice en politique ne fut guère épargnée par les attaques, souvent injustes, venant de toutes parts et par ⁰des nominations internes, lui échappant, qui avaient considérablement réduit son champ d’action.
Quant à l’ancienne championne olympique et très populaire, Laura Flessel, elle démissionna au bout de quatorze mois du ministère des Sports, en invoquant » des raisons personnelles ».
Louise Mushikiwabo, une nomination disruptive
Afin de succéder à la Canadienne Michaëlle Jean, au poste de Secrétaire général de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF). le président Macron a proposé avec insistance, sinon imposé, l’inamovible ministre des affaires étrangères du Rwanda, Louise Mushikiwabo.
Ce choix, motivé par des considérations purement françaises dans la perspective d’un rapprochement avec Paul Kagame, a choqué dans le monde francophone et tout particulièrement en Afrique. Depuis l’élection de la très américanophile et peu regardante sur les droits de l’Homme, le 1er janvier 2019, l’OIF est entrée en sommeil.
Sibeth Ndiaye, Nicole Belloubet et Roxana Maracineanu: le discrédit
Par le déficit de leur sens politique, les trois ministres sont devenus des maillons faibles du gouvernement. Leur gestion et fautes de communication à répétition ont fragilisé le gouvernement d’Édouard Philippe qui n’est en rien dans ces nominations. Leur expérience politique, notamment avant 2017, au sein du parti socialiste, aurait dû leur éviter des déclarations et des décisions proches de l’amateurisme. Sibeth Ndiaye, active dans la communication du candidat Macron puis à l’Élysée, irrite pour sa langue de bois et ses jugements expéditifs sans nuance.
Nicole Belloubet, jadis élue municipale à Toulouse et ancienne membre du Conseil constitutionnel, doit faire face à une hostilité de la plupart des professionnels de la Justice. Pour une agrégée de droit, cela surprend et interpelle sur son choix.Quant à Roxana Maracineanu, jadis conseillère régionale d’Île de France, elle aura réussi, en dix-huit mois, à mécontenter le monde sportif et notamment les clubs de football et leurs supporters.
Agnès Buzin, une tragédie
Il est inutile de rappeler le cauchemar vécu par l’ancienne ministre des solidarités et de la santé. En six mois, la professeure de médecine aura perdu tout son aura. Les avanies se sont multipliées avec la pandémie du Covid-19, les accusations et controverses, la réforme du système de santé et son chemin de croix, à la suite de la demande présidentielle de succéder à Benjamin Griveaux, dans la campagne électorale de Paris.
Les déboires actuels dans la promotion du genre du président Macron ne doivent pas faire oublier, que pour la première fois dans la V ème République, après la démission de François de Rugy en juillet 2019, il y a eu pendant quelques semaines, davantage de femmes membres du gouvernement (18) que d’hommes (17). Un des objectifs du chef de l’État reste de nommer une Première ministre femme.
Il reste que le nombre et les effets médiatiques importent moins que l’expérience politique, les capacités à gouverner et le respect des valeurs républicaines.