L’alliance fondatrice de l’armée algérienne avec la Russie

La visite du président algérien Abdelmadjid Tebboune à Moscou au mois de juin 2023 signait la volonté du clan militaire de s’adosser à son allié constant, la Russie, face aux menaces aux frontières marocaines. Et cela au détriment de l’axe Paris-Alger voulu par la Présidence qui ne pèse guère dans les équilibres internes au pouvoir algérien

La visite du président algérien à Moscou n’avait été annoncée qu’à la dernière minute par le service de communication de la présidence. Cette instance n’avait pas daigné commenter le report de la visite de Tebboune à Paris, dont on reparle ces dernières semaines. En effet, les tirs croisés des responsables politiques français sur la révision des accords de 1968 entre Alger et Paris sur l’immigration, relayés par plusieurs personnalités politiques,  est perçue comme une ligne rouge infranchissable à Alger.

Du coup, Abdelmadjid Tebboune, le plus francophile des dirigeants algériens actuels, avait signé le décret qui codifie le protocole de l’hymne national en réintroduisant le troisième couplet anti français. L’idylle légèrement surjouée entre Macron et Tebboune qui dure depuis l’arrivée au pouvoir du Président français aura été mis entre parenthèse, le voyage à Paris ajourné et le Président algérien condamné à privilégierMoscou et Pékin

Inquiétudes aux frontières

Le voyage à Moscou revêtait une importance existentielle pour le haut commandement qui voit se développer à l’ouest de ses frontières des exercices militaires internationaux maintes fois renouvelés entre les Etats Unis, et certains pays africains, et pour la première fois la participation des éléments israéliens du commando du bataillon Golani. Il est vrai que l’opération « Africain Lion » effectuée au Maroc sous la supervision de l’armée américaine donne à l’armée royale un vrai bonus en matière d’utilisation de ses forces. L’État Major algérien doit  rattraper le retard pris dans la préparation des forces algériennes aux frontières de l’ouest du pays. Lors d’un récent conclave du Haut Conseil de sécurité « restreint », réservé exclusivement aux forces constituées sans la direction générale de la sûreté nationale (DGSN) dirigée par Farid Bencheikh et acquise à la Présidence, il a été décidé de renforcer la présence militaire aux frontières Marocaines. D’importantes quantités d’armement ont été déployées par l’armée algérienne aux frontières de l’Ouest. 

Accompagné de plusieurs ministres et hommes d’affaires, le président Tebboune a été sommé de faire de sa visite un tournant dans les relations entre les deux pays en activant un volet économique. La participation de la délégation algérienne au forum économique international de Saint-Pétersbourg devient un challenge. L’Algérie est à la recherche d’une diversification de sa coopération avec Moscou basée essentiellement sur l’armement pour le déployer aux échanges commerciaux et économiques.

Les discussions portées officiellement devant les caméras des télévisions ont évité d’évoquer les questions de défense et notamment celles liées aux nouveaux contrats d’armement afin de ne pas susciter l’ire des partenaires occidentaux, plus précisément américains qui maintiennent des pressions coercitives. La prudence était de mise sur ces questions sensibles relatives à l’armement d’où l’absence de tout débat sur ce thème alors que la visite repose sur la question des armes.

Les non-dits des entretiens

Alger voulait solder sa dette envers la Russie qui s’élève à 2 milliards de dollars que les sanctions du système bancaire bloquent le transfert. Il est question également d’un nouveau contrat d’armement qui s’élèverait à 11 milliards de dollars en cours de discussion.

L’exercice de persuasion opéré par Alger devient aussi compliqué qu’un tour d’acrobatie. Il serait difficile de convaincre les occidentaux de maintenir une certaine distance avec la Russie et de promettre à celle-ci une fidélité soutenue. La posture de l’Algérie se fragilise, contenue d’une posture vacillante qui dépendrait de la nature des pressions des uns et des autres.

Cette ambivalence s’accroît à travers la déclaration du président Tebboune lors de l’inauguration du forum économique international à Saint Pétersbourg, « de l’existence des potentialités entre l’Algérie et la Russie concernant les changements effectués dans le domaine des technologies, de l’agriculture, le tourisme et les sciences exactes ». Il a proposé la création « d’une agence de promotion d’investissement qui aurait pour mission d’accompagner les agents économiques désireux lancer des projets entre algériens et étrangers ».

ENCADRÉ, LE VERBATIM DES ENTRETIENS ENTRE TEBBOUNE ET POUTINE

Intervention de Tebboune :

–          Au nom de la délégation qui m’accompagne et en mon propre nom, je tiens à vous remercier de l’accueil chaleureux que vous m’avez réservé. Ceci reflète la profondeur de l’amitié qui existe entre l’Algérie et la fédération de la Russie.  

–          Comme toujours, nos relations n’ont pas changé depuis plus de 60 ans. L’Algérie est toujours fidèle avec une grande loyauté à cette relation et amitié.

–          Actuellement, il existe des situations et des pressions internationales mais qui ne peuvent pas infléchir notre relation et amitié existante entre nous.

–          Premièrement, le maintien de notre indépendance repose sur l’aide importante de la fédération de la Russie amie dans son approvisionnement en armes pour la défense de notre pays dans un contexte régional très difficile.

–          La concertation des amis est nécessaire dans toutes les situations nouvelles. Nous sommes appelés à concerter nos amis dans tous les points que nous partageons en commun.

–          Avant d’aborder les points que je vais évoquer, je tiens à vous présenter mes félicitations à la journée de la Russie le 12 Juin.

–          Concernant les grands axes qu’on va aborder, et comme vous le saviez, et grâce au soutien de notre ami la Russie, l’Algérie a récemment acquis le siège dans le conseil non permanent de sécurité au sein de l’ONU. Cela s’est réalisé grâce à des amis et à leur tête la fédération de Russie.

–          Nous sommes en commun accord sur plusieurs points dans le contexte international qui est très perturbé. Et c’est à ce titre que nous demandons expressément l’entrée de notre pays dans l’organisation des BRICS afin d’intégrer une autre organisation, en dehors du Dollars et l’Euros. Il s’agit d’un bénéfice important à notre économie.

–          En ce qui concerne les affaires relevant de la géopolitique, nous sommes en accord sur le dossier libyen. Notre vision est en commun accord, la Libye est amie de la Russie et amie et sœur de l’Algérie.

–          Il en est de même des pays du Sahel ; nous cautionnant les relations actuelles développées entre le Mali et la fédération de la Russie. Le Mali demeure un pays proche et important et si le contexte l’exige, il serait possible de se concerter dans la gestion du dossier Malien.

–          Actuellement, il y a un cadre qui est l’accord d’Alger. Nous demandons de l’aide à nos amis Russes pour renforcer cet accord avec les dirigeants actuels du Mali. Car nous observons que le problème malien ne peut trouver un dénouement qu’à travers cet accord. Le problème malien ne trouve pas de solution par la violence.

 

Intervention de Poutine:

–          Les relations entre nos deux pays sont en constante amélioration depuis les années 50. Ces relations étaient stratégiques sans grande exagération.

–          Durant cette période, les deux peuples ont défendu leur indépendance économiques, politiques, militaires.

–          L’année dernière, nous avons fêté les 60 ans de l’indépendance de votre pays et de nos relations diplomatiques. L’Urss a contribué à la guerre de libération et a participé au développement économique du pays dans des domaines différents.   

–          La coopération algéro russe a de multiples faces. Nous avons de multiples capacités et des potentialités. Et selon le déroulement de nos discussions nous allons signer un accord global entre l’Algérie et la Russie pour entamer une nouvelle étape dans nos relations bilatérales.

–          En effet, le dialogue politique joue un rôle crucial. Nous sommes en contact permanent avec vous. Nos responsables travaillent d’arrache-pied avec vos responsables. Le ministère des affaires étrangères et le directeur de la sécurité Russe sont en contact permanent avec vos responsables.

–          Nous travaillons avec un esprit de conviction dans le cadre de la commission commune Algéro Russe.

–          Hier seulement, vous avez assisté aux travaux du forum Algéro Russe des affaires. L’importance de nos relations sera renforcée à travers de telles opérations concrètes.

–          Nous sommes heureux de vous voir à Saint-Pétersbourg lors du sommet Russie Afrique. Je souhaite confirmer et renouveler l’expérience de la coopération Algéro Russe dans différents secteurs.  

https://mondafrique.com/la-visite-du-president-tebboune-en-russie-un-revers-pour-macron/

 

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1 COMMENTAIRE

  1. Je lis : « La visite du président algérien à Moscou n’aura été annoncée qu’à la dernière minute par le service de communication de la présidence ».

    C’est complètement faux. Depuis l’automne 2022, les journaux algériens parlaient, toutes les semaines, de la visite du président Tebboune.

    Vous ne pouvez pas « mentir tout le monde tout le temps »

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