Sans aucune annonce préalable, le président algérien a fait une apparition surprise, non pas à travers un canal officiel de la télévision nationale, mais sur son propre compte tweeter, pour confirmer notamment la tenue des futures élections « dans les plus brefs délais ». Il y a le feu au lac!
Une chronique de Mohand Tamgout
Dans un décor improvisé d’une chambre aux fenêtres cachées par des rideaux, le président algérien fixe la seule caméra et sans doute un prompteur pour lire son intervention. Un drapeau à sa droite et deux téléphones posés sur une table de chevet laissent croire à une certaine activité de communication avec le monde extérieur.
Le cou caché par un pull bleu foncé, sans doute pour dissimuler la perte de poids subie depuis son hospitalisation, le président Tebboune entame son allocution en arabe littéraire. La voix essoufflée, les mains croisées posées sur une table, le président algérien gardera la même posture durant toute son intervention. Habitué au langage gestuel, Tebboune s’interdit le moindre mouvement possible afin d’économiser ses forces. Son œil gauche est légèrement plus incliné que le droit.
4 minutes 54 secondes
Sa laconique allocution, 4 minutes 54 secondes, n’est pas seulement l’annonce d’un rétablissement. Il est vrai que le président algérien évoque son rétablissement progressif du Covid, un retour au pays et un recouvrement total de ses capacités physiques dans deux à trois semaines. Mais le même souhaite enfin et surtout que s’ accélère la mise en place d’une structure chargée d’élaborer une nouvelle loi électorale pour les échéances futures.
Tout laisse à croire que le chef d’Etat major, le général Chengriha, qui à la tète d’une armée divisée reste l’homme clé du pouvoir, maintient le plan initial d’organiser des élections législatives et locales en vue de ravaler la façade du système de pouvoir en perte de vitesse.
Les coulisses de l’apparition
Le maintien du calendrier initial apparait comme recours ultime pour Chengriha qui cherche à contrer la progression des anciens cadres de l’ex DRS, les services secrets du général Toufik, qui avancent leurs pions. Ces derniers ont redoublé de présence médiatique en proposant des plans de sortie de crise. A travers ce déploiement, ils tentent de constituer un pole politique susceptible d’imposer un nouveau schéma dont l’objectif reste leur retour en douceur aux affaires avec le soutien d’un Emmanuel Macron, saluant l’action « courageuse » de Tebboune.
L’espace médiatique officiel échappe-t-il au contrôle du général Chengriha au point d’envoyer un message par le Tweeter du président ? Le service de communication de la présidence serait-il entre des mains incompétentes et instrumentalisées ? Les premières vidéos sut Tebboune malade, incomplètes, avaient été distillées auprès des chaines traditionnellement proches des services du DRS telles que Al Bilad et Al Nahha.
Le sentiment d’encerclement
Pour le moment, une bataille a été emportée par l’état-major, mais la guerre des tranchées entre les clans du système militaire et leurs relais politiques continuera sur d’autres fronts. Le chef d’état major et ses alliés cherchent à remettre sur pied, dans les plus brefs délais, un président affaibli dans le seul but est de promulguer la constitution, de parapher la loi de finance et de rester sur des rails légalistes. Des nombreuses voix au sein du Hirak réclament en revanche l’application de l’article 102 de l’ancienne constitution sur la vacance du pouvoir pour ouvrir la voie d’une transition. Mais plus cette crise politique s’amplifie et plus Tebboune est affaibli, plus le clan des anciens du DRS place ses pions, et à tous les niveaux.
Les Algériens, les grands oubliés, assistent médusés face à une mise en scène qui rappelle la fin de règne de Bouteflika. La situation de Tebboune est pire qui survient dans un contexte où les crises régionales sont amplifiées (Libye, Sahara, Mali ) et le sentiment d’encerclement réel.
Ce n’est pas un hasard si la président Tebboune rappelle que l’Algérie doit être protégé en se référant à une ode lyrique du grand Saint d’Alger, Sidi Abderrahman Al Thaâlibi.