La Guinée au bord de la confrontation

Après de nombreuses irrégularités commises pendant l'élection présidentielle en Guinée, l'opposition unanime demande l'annulation du scrutin. La campagne a fait une dizaine de morts

9AE9752C-52DB-4D9B-8651-32778E6C5FE1_w640_r1_sTôt le matin du 11 octobre 2015, les guinéens se sont rendus aux urnes pour élire leur président. Ils avaient le choix entre huit candidats, sept de l’opposition et le président sortant, Alpha Condé. Plus de six millions d’électeur étaient inscrits sur les listes électorales. Pour l’heure la commission électorale nationale indépendante (CENI), ne s’est pas prononcée sur le taux de participation à cette élection. Mais dans les bureaux de vote, l’affluence est grande. Les citoyens sont massivement sortis pour accomplir leur devoir. Plusieurs bureaux de vote ont ouvert à Conakry et en province à 7 heures du matin alors que d’autres ont accusé du retard à cause de l’absence par endroit d matériel électoral (urnes, ancres, bulletins…).

Il est 8 heures. Devant le bureau de vote N° 24 du quartier Yembéya dans la commune de Ratoma, fief de l’opposition, plus d’une cinquantaine d’électeurs attendent. « Je suis devant le bureau de vote où je dois accomplir mon devoir civique depuis 6 heures du matin. Mais le vote n’a pas commencé parce qu’on nous dit que la liste d’émargement n’est pas dans le lot du matériel»,  confie Aboubacar Baldé, un citoyen qui s’impatientait. Comme Aboubacar, plusieurs électeurs sont sortis tôt le matin pour s’acquitter de leur obligation civique. Mais ils n’ont pu voter à temps à cause du retard.

Un scrutin entaché par de  nombreuses irrégularités

En effet, le matériel électoral n’était pas au complet dans plusieurs bureaux de vote à Conakry et même dans plusieurs villes de l’intérieur du pays. « On n’a pas de liste d’émargement, donc cela n’a pas inspiré confiance aux électeurs, il a fallu leur expliquer que même sans liste d’émargement, ils peuvent voter »,  témoigne le président du bureau de vote N° 25 du secteur yembéya. Il y avait en effet, manque d’enveloppes sécurisées, de liste d’émargement, d’isoloirs dans plusieurs bureaux de vote. Par endroits, les électeurs n’avaient pas leur nom sur le fichier électoral. En début d’après midi du 11 octobre, près d’une vingtaine de bureaux de vote étaient en rupture de bulletins de vote, a confié Aliou Condé, secrétaire général du parti de Cellou Dalein Diallo, l’UFDG. Tout cela a créé un retard dans le démarrage des opérations de vote dans plusieurs localités.

La CENI, commission électorale nationale indépendante, organe en charge de l’organisation des élections, a décidé de proroger pour ces bureaux de vote exceptionnellement, le déroulement des opérations de vote jusqu’à 20 heures. Le porte-parole de la CENI, maître Amadou Salif Keiba a reconnu qu’il y a eu une insuffisance dans le déploiement du matériel. Mais la CENI a essayé de corriger toutes les insuffisances au fur et à mesure du déroulement du scrutin. Elle a autorisé le vote sans enveloppe car dans plusieurs bureaux de vote, les enveloppes étaient en rupture. Les membres des bureaux n’avaient pas tous été formés sur le déroulement des opérations. Résultat,  plusieurs d’entre eux  n’ont pas été en mesure de retrouver à temps les noms des électeurs sur le fichier électoral. Tous ces problèmes, la CENI a essayé d’y apporter des solutions avant la fermeture des bureaux de vote.

Risques de contestation des résultats

Les partis politiques de l’opposition, notamment les partis des 7 candidats de l’opposition avaient annoncé que la CENI n’était pas suffisamment prête pour organiser ces élections. « Tout ce que nous avons dénoncé, se concrétise aussi. La CENI n’était pas prêt » a lancé Aliou Condé de l’UFDG. Il estime que tous ces problèmes étaient prévisibles et que la CENI aurait pu les éviter si ces élections avaient été reportées d’une semaine. La CENI,  elle,  estime qu’aucune des insuffisances constatée sur le terrain ne peut entacher la crédibilité du vote. Pourtant, l’opposition, a dénoncé,  dans un communiqué rendu public dimanche en fin de journée, des fraudes massives sur l’ensemble du territoire national.

L’UFDG a également  annoncé que les représentants de l’opposition ont été chassés dans les bureaux de vote dans les sous préfectures des villes de Faranah, Kankan, Kérouané…  Le collectif des 7 candidats de l’opposition a précisé,  dans un communiqué, que l’opposition n’acceptera pas les résultats de la présidentielle. L’opposition se réunit en urgence lundi matin et  prévoit de rencontrer la presse pour révéler sa stratégie post-électorale.