La campagne pour la présidentielle et les législatives de dimanche 29 novembre s’achève ce vendredi 27 novembre à minuit. Les forces en présence se réclament de la social-démocratie, du libéralisme et… de nulle part.
Trois semaines pour le scrutin présidentiel, quatorze jours pour les législatives, la campagne électorale fut longue, épuisante et coûteuse pour les 14 candidats engagés pour la conquête du palais de Kosyam (siège de la présidence) et pour les quelques 90 formations politiques et groupements d’indépendants en lice pour les 127 sièges à pourvoir dans la prochaine assemblée nationale.
Aux cortèges de militants brandissant de grands portraits de leurs favoris, ont succédé les meetings géants dans les capitales régionales, provinciales, les villes moyennes et même dans des petits villages. Tout ce qui peut rapporter une voix, deux, trois et davantage était bon à prendre pour les candidats qui n’ont pas hésité, pour certains en tout cas, à mouiller la chemise et à user les semelles des chaussures. De vedettes internationales de la musique moderne ont été mobilisées par ceux qui ont les moyens de leur payer un cachet conséquent. C’est le cas de la Malienne Oumou Sangaré qui a égaillé le premier meeting du candidat de Roch Marc Christian Kaboré, candidat du Mouvement du peuple pour le progrès (MPP) organisé le 08 novembre à Bobo-Dioulasso.
Bataille des projets
Derrière les affiches et autres T-shirts aux couleurs des candidats ou des partis, se mène une vraie bataille d’idées, un affrontement projet contre projet. Deux grands pôles se dessinent à en juger par les discours entendus lors des meetings : celui des sociaux-démocrates emmenés par le MPP de Roch Marc Christian Kaboré et le groupe rival composé des libéraux conduits par Zéphirin Diabré, présidentiable de l’Union pour le progrès et le changement (UPC).
Selon l’ancien ministre Salif Diallo, directeur national de la campagne du MPP, les sociaux-démocrates burkinabè, regroupés dans 17 formations dites de Gauche favorables au candidat Kaboré, plaident pour une meilleure place aux ouvriers dans les entreprises, pour l’indépendance nationale face aux multinationales et au capital financier. Ils défendent aussi une politique budgétaire orientée vers des priorités du développement avec des emprunts extérieurs en adéquation avec la soutenabilité de la dette publique. Le camp social-démocrate s’engage par ailleurs à ce qu’il n’y ait plus aucune école sous les paillottes au Burkina et à recruter toutes les jeunes diplômés de l’enseignement supérieur sans emploi pour en faire des enseignants.
Considérant la sécurité comme une affaire qui dépasse la seule puissance publique, les sociaux-démocrates envisagent d’organiser les populations en brigades villageoises ou sectorielles. « Dans ce combat de longue haleine contre l’insécurité, l’apport de notre peuple est primordial. Dans ce cadre, les populations seront organisées en brigades villageoises ou sectorielles de sécurité dans tout le pays. Cette contribution citoyenne de notre peuple à cette lutte contre l’insécurité vient de notre profonde conviction que la sécurité doit être avant tout l’affaire du peuple lui-même. Aucune force, aussi spécialisée soit-elle, ne peut à elle seule assurer la sécurité d’un peuple », écrit Salif Diallo dans le journal de campagne du MPP du 11 novembre.
Zéphirin Diabré, le libéral
En face, les libéraux structurés autour du mouvement « Zeph 2015 pour le véritable changement » composés de 10 partis tous membres du Chef de file de l’opposition soutiennent le principe d’accorder une place privilégiée au secteur privé dans l’économie nationale.
Le candidat de l’Union pour le changement et le progrès (UPC), qui porte les couleurs du camp libéral à la présidentielle de dimanche, soutient que ce sont les entreprises qui résoudront le problème du chômage des jeunes au Burkina Faso. Pour les libéraux, le secteur agricole doit également être modernisé et mécanisé afin d’en faire un véritable levier dans la lutte pour l’autosuffisance alimentaires et contre le chômage des jeunes et des femmes.
A cet effet, le camp libéral défend la création d’une Banque agricole et le regroupement des pays en coopération. Il soutient en outre la création d’une Cour de répression de la délinquance économique et la dépolitisation de l’armée burkinabé. « Je traiterai de manière équitable toutes les régions, provinces et villages en matière d’allocation des ressources. Je serai exclusivement guidé par la recherche du bien-être pour le plus grand et la protection des plus vulnérables d’entre nous. Seuls prévaudront les critères de compétence dans le choix des chefs d’institutions et d’entreprises publiques, et ce pour des durées limitées tandis que la transparence et l’intégrité seront les maîtres dans la gestion publique en général », a promis au nom du camp des libéraux Zéphirin Diabré dans sa profession de foi.
Pluie des promesses
Au-delà de ces deux visions croisées de la société, la longue campagne électorale a aussi été l’occasion des promesses tous azimuts. Chaque étape, chaque ville, chaque village s’en tire avec un voeu pieu ; souvent il correspond opportunément à ce qui manque depuis très longtemps. Le candidat indépendant Jean-Baptiste Natama s’est, pour sa part, engagé à assurer la gratuité de l’école de 6 à 16 ans, s’il était élu président de la république. Son adversaire Tahirou Barry du Parti pour la renaissance (PAREN) a promis, de son côté, d’éradiquer la corruption au Burkina Faso en six mois alors que Saran Séré Sérémé, candidate du Parti pour le développement et le changement (PDC) s’est engagé à prendre en charge dès son entrée en fonction tous les problèmes santé, d’éducation et d’alimentation des Burkinabé.
Seconde femme candidate au scrutin présidentiel, Françoise Toé, du Mouvement de libération nationale du Burkina Faso (MLN-BF), jure qu’elle placera son mandat de président de la république sous le signe de la promotion de l’habitat et de l’urbanisme tout en portant une attention particulière à l’usage des énergies renouvelables. Ram Ouédraogo, candidat de l’Union des verts pour le développement du Burkina Faso(UVBF), promet à ses compatriotes la création d’unités de transformation des matières premières et agricoles, la transformation de la viande, la promotion, la création et la vulgarisation de laiteries nationales performantes. « Je m’engage à m’employer courageusement à répondre, avec honnêteté et abnégation à vos aspirations légitimes, à l’amélioration de votre épanouissement, dans la paix, la sécurité et la solidarité », jure la main sur le cœur Ablassé Ouédraogo présidentiable de « Le Faso Autrement » qui promet également une croissance économique au Burkina Faso dès 2016.
Reste désormais à savoir si les 5,5 millions de Burkinabé tiendront compte de ces promesses plus mirobolantes les unes que les autres pour se décider dans le secret de l’isoloir.