Désormais sur la sellette, trois juges célèbres aux ordres du régime ont longtemps influencé le cours des grands procès en Algérie
A Alger, leurs noms sont sur toutes les lèvres. Dans les tribunaux et palais de justice, ils évoquent la suspicion et la partialité. Ils sont accusés de jouer un rôle controversé dans de nombreuses affaires judiciaires où l’arbitraire a primé sur le droit. Quoi qu’il en soit, ces trois juges sont considérés comme les véritables “intouchables” que personne n’osera contester ou remplacer en dépit d’une justice qui suscite l’exaspération de la population algérienne.
Allaili Tayeb est juge à la Cour d’Alger. Benzaoucha Abdelhakim est juge à Tizi-Ouzou tandis qu’Omar Belkarchi officie à Alger. Ces trois juges font l’objet ces jours-ci d’une véritable polémique au sein du sérail algérien. Leur influence est si importante, si impressionnante, leurs poids sur les verdicts est si considérable qu’on les surnomme les “chambres à gaz” de la justice. Ce surnom, ils le doivent à leurs procès où les opposants, les entrepreneurs ou acteurs de la société civile qui ne sont pas dans les bonnes grâces du régime, sont systématiquement condamnés sans aucune équité.
Sur le départ
Ces trois barons font parler d’eux dans toutes les affaires clés qui bouleversent et déstabilisent le pays. Depuis des années, ils jugent, dirigent des procès où les volontés du régime ont toujours été respectés. Aujourd’hui, ils sont sur la sellette. Certains décideurs veulent les mettre à la retraite pour calmer une rue rongée par la colère en raison de ces procès bâclés et arrangés pour satisfaire les intérêts des autorités politiques. Des hauts responsables et des lobbyistes réclament leur départ pour se soulager de leurs poids encombrant. Mais d’autres refusent leur départ et persistent à affirmer que leurs services sont encore précieux et incontournables.
Et pourtant, le gouvernement algérien prétend qu’il est en plein processus de modernisation de la justice afin de mettre fin aux pratiques de la corruption qui déterminent souvent l’issue des procès. Une modernisation censée également libérer les juges du poids de l’influence politique. Mais ces promesses demeurent un très mince espoir, estiment de nombreux acteurs et cadres du ministère de la Justice à Alger. Le sort des “chambres à gaz” alimente le feuilleton de l’été pendant que les vacancières judiciaires instaurent un climat très pesant dans les tribunaux. D’ici le 25 septembre prochain, on saura si leurs noms figureront sur la liste des juges qui doivent partir. Mais d’ici là, leur mythe continue d’inspirer la peur et la terreur aux algériens qui auront le malheur d’être convoqués par la justice.