Mondafrique présente les principaux acteurs de l’année à venir au Sénégal, en Côte d’ivoire, au Togo, au Bénin et au Libéria. Sur fond de crises politiques plus ou moins graves.
SENEGAL, les tètes d’affiche emprisonnées
Khalifa Sall : Pour la toute première visite officielle qu’il entame début février au Sénégal, le président français Emmanuel Macron n’aura pas à serrer la main de Khalifa Sall. Le député-maire de Dakar est en prison depuis mars 2017, accusé de « détournements de fonds publics ». Son procès, qui s’est ouvert le 23 janvier, dépasse les limites d’une simple affaire judiciaire. De son épilogue, dépend en partie la présidentielle de 2019. En effet, le député-maire de Dakar est à ce jour l’adversaire le plus sérieux du président sénégalais Macky Sall, qui sera, sans nul doute, candidat à sa réélection. Une condamnation de Khalifa Sall aura le parfum d’une élimination politique alors que son acquittement total conforterait son statut de challenger.
Fadel Barro : Le mouvement citoyen « Y’en a marre » qu’il dirige a été le fer de lance de la contestation qui a abouti à la défaite électorale du président Abdoulaye Wade, en 2012. A la veille de la présidentielle de 2019, les projecteurs seront braqués sur Fadel Barro, figure emblématique de Y’en a marre, arrêté en 2015, à Kinshasa, pour avoir apporté son soutien au mouvement citoyen congolais Filimbi. Ces derniers mois, « Y’en a marre » a très vivement critiqué certains choix de gouvernance de la coalition au pouvoir à Dakar.
Karim Wade– Retranché à Doha depuis sa libération négociée entre l’Emir du Qatar et le président Macky Sall, l’ancien ministre sénégalais et fils de l’ex-président Abdoulaye Wade, Karim Wade n’a pas pris la parole publiquement. A la fin de l’année 2017, son père a fustigé le bilan du président Macky Sall, une façon, pour certains, de préparer l’opinion à la candidature de Karim Wade à la présidentielle de 2019. Candidat ou pas, le « reclus de Doha » devrait cette année avoir une parole publique plus régulière. La réserve qu’il a observée faisait partie de l’accord entre Doha et Dakar. A la veille de la présidentielle Karim Wade pourrait finalement s’en affranchir.
Felwine Sarr : Economiste, universitaire et musicien, Felwine Sarr est devenu un des intellectuels africains les plus en vue. A 45 ans, l’économiste, lauréat du Prix Abdoulaye Fadiga pour la Recherche Économique en 2010 et du Grand prix de la Recherche des associations littéraires en 2016, a co-organisé avec le philosophe camerounais Achille Mbembé les deuxièmes ateliers de la pensée en octobre 2017 à Saint-Louis, au Sénégal. Professeur d’économie à l’université Gaston-Berger, Felwine Sarr, est devenu la coqueluche des médias et l’invité incontournable des grandes manifestations internationales sur
CÔTE D’IVOIRE, la fin de rêgne d’Alassane Ouattara
Guillaume Soro : Officiellement, tout va bien entre le président Alassane Ouattara et Guillaume Soro, président de l’Assemblée nationale. Signe de la détente entre eux, les deux hommes se sont vus deux fois en un trimestre. Mais, la réalité est plus nuancée : Ouattara et Soro n’ont pas le même agenda pour la présidentielle de 2020. L’année 2018 sera donc décisive pour Soro dont le choix sera également déterminant pour l’équation politique en Côte d’Ivoire.
Jean-Claude Kouassi Brou : Le ministre ivoirien de l’Industrie devrait quitter le gouvernement pour prendre le 1er mars prochain la présidence de la Commission de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Il devient ainsi le premier Ivoirien à diriger cette organisation sous-régionale depuis sa création en 1975 et qui a son siège à Abuja, la capitale fédérale du Nigeria. Pour l’économiste formé aux Etats, la présidence de la Commission de la CEDEAO ne sera pas une sinécure : il aura à gérer la menace terroriste qui sévit dans plusieurs Etats (Burkina Faso, Mali, Niger, Côte d’Ivoire) et le dossier sensible des migrations africaines vers l’Europe (Nigeria, Gambie, Côte d’Ivoire).
Sanussi Lamido– Autorité morale, religieuse et traditionnelle, l’Emir de Kano, la grande métropole du nord du Nigeria, est perçu par une bonne partie de l’élite musulmane comme un bon candidat de rechange, si le président sortant Muhumadu Buhari renonçait, pour raisons de santé, de se présenter à la présidentielle de 2019. Ancien gouverneur de la Banque centrale du Nigeria, Sanussi Lamido, avait eu de très sérieux démêlés avec l’ancien président nigérian Godluck Jonathan. Il est unanimement respecté au Nord et jugé « compatible » par les élites du Sud chrétien et pétrolier.
TOGO, la crise politique persistante
Tikpi Atchadam – Parfait inconnu dans les rangs de l’opposition, Atchadam, a été la révélation politique de l’année 2017 au Togo. Cet ancien fonctionnaire, qui a passé de longues années d’exil volontaire en Allemagne, a réussi à sortir l’opposition togolaise de sa torpeur et à la convaincre d’aller en rangs serrés à la bataille contre le pouvoir dynastique de Faure Gnassingbé. Il a surtout réussi à rallier les villes de l’intérieur du pays à la contestation populaire. Après la trêve observée pour donner une chance à la médiation du président guinéen Alpha Condé, les manifestations anti-Faure pourraient reprendre rapidement.
A Lomé, le pouvoir n’a pas encore trouvé la bonne réponse face au phénomène Atchadam qu’il a tenté de discréditer, en le faisant passer pour « un islamiste dangereux ». En 2018, le président du Parti national panafricain (PNP) devait être un acteur du dénouement ou de la persistance de la crise politique togolaise.
BENINn un climat politique malsain
Mgr Roger Houngbédji, Archevêque de Cotonou- Fait totalement inédit, l’Eglise catholique du Bénin a pris position sur le climat politique dans le pays, critiquant le déficit de dialogue politique et des problèmes de gouvernance. Sous l’égide de Monseigneur Roger Houngbédji, l’Eglise, à l’issue de ses journées de concertations des 24, 25 et 26 janvier 2018, a exprimé publiquement « les craintes et les appréhensions » que lui inspire le climat politique au Bénin.
LIBERIA, la fin de l’état de grâce
Georges Weah– L’état de grâce pourrait être de courte durée pour l’ancienne star du football international George Weah qui a prêté, à 50 ans, serment le 22 janvier pour devenir président de son pays, le Liberia. Premier non descendant de l’élite afro-américaine à devenir président du Liberia par les urnes, Weah devrait dès cette année s’atteler à consolider l’Etat libérien, laissé exsangue par près de dix années de guerre civile meurtrière. Outre les urgences en matière de sécurité, de santé, d’éducation, l’ancienne star du Paris-Saint-Germain (PSG) aura à redresser une économie tenue sous perfusion par l’aide extérieure, mais surtout à combattre la corruption et le détournement des fonds publics. Un match qui est loin d’être gagné d’avance. Même pour le premier et seul Africain ballon d’or (1995).