Makhanda transformée en capitale des arts africains jusqu’au 6 juillet 

Du 26 juin au 6 juillet, la ville sud-africaine de Makhanda accueille le National Arts Festival. Théâtre, danse, expositions, cinéma, conférences : un événement majeur sur le continent qui mêle mémoire, engagement et création, à échelle nationale et internationale.

 

Pendant onze jours, Makhanda, petite ville universitaire du sud-est de l’Afrique du Sud, devient la capitale culturelle du continent. Du 26 juin au 6 juillet 2025, le National Arts Festival y déploie une programmation dense et vibrante. Théâtre, musique, danse contemporaine, expositions visuelles, cinéma indépendant, installations sonores, conférences engagées, ateliers participatifs, visites guidées historiques : l’événement est un laboratoire à ciel ouvert des formes artistiques africaines d’aujourd’hui. Peu connu du public européen, il est pourtant l’un des festivals les plus ambitieux du continent, avec des centaines de représentations réparties dans toute la ville.

Fondé à la fin des années 1970, alors que l’apartheid battait encore son plein, le festival a d’abord été un espace de résistance symbolique et artistique. Il a vu naître des formes alternatives, a offert une tribune aux voix étouffées, a permis à de jeunes artistes sud-africains de se confronter à une scène exigeante et libre. Aujourd’hui, il conserve cet esprit tout en s’ouvrant largement à d’autres pays africains et à la scène internationale. En 2025, il revendique sa dimension continentale : les artistes programmés viennent du Nigeria, du Kenya, du Zimbabwe, du Ghana, d’Égypte ou du Mali, mais aussi d’Europe et d’Amérique latine, avec des œuvres souvent conçues en collaboration.

Le cœur du festival reste le théâtre, sous toutes ses formes. Des pièces classiques sud-africaines y côtoient des créations radicales, des performances immersives, du théâtre documentaire ou du spoken word. Des voix jeunes, souvent féminines et politisées, prennent la scène à bras-le-corps pour aborder les violences systémiques, la question de la terre, l’héritage colonial, la justice climatique ou les identités de genre. La danse n’est pas en reste : contemporaine, enracinée dans les traditions, traversée de formes urbaines, elle s’impose comme un langage politique autant qu’un geste poétique.

Les arts visuels occupent aussi une place de choix. Plusieurs expositions sont disséminées dans la ville : dans les galeries, les halls d’université, les chapelles désaffectées, ou à même la rue. Les artistes y interrogent la mémoire post-apartheid, les cicatrices du temps, les mythologies africaines ou la place du corps noir dans l’espace public. La photographie occupe une place croissante, tout comme la vidéo expérimentale et les installations multimédias. Cette année encore, l’accent est mis sur les pratiques émergentes, avec de jeunes créateurs souvent autodidactes, à la croisée des disciplines.

Le festival ne s’adresse pas qu’aux professionnels. Il accueille les curieux, les étudiants, les familles, les touristes, dans une ambiance conviviale et foisonnante. Les rues de Makhanda deviennent une scène à part entière : fanfares improvisées, slams spontanés, spectacles de marionnettes, ateliers pour enfants, lectures en plein air. Les lieux culturels se multiplient : anciens bâtiments coloniaux réhabilités, chapiteaux temporaires, musées, bars transformés en scènes nocturnes. La ville vibre jour et nuit, dans une effervescence rare.

Au-delà des spectacles, le National Arts Festival est aussi un espace de pensée. Les rencontres et débats qui accompagnent les œuvres permettent une prise de recul, une mise en contexte. Chercheurs, artistes, militants, philosophes et curateurs échangent sur la condition postcoloniale, la violence institutionnelle, les enjeux mémoriels, l’écologie ou la langue comme territoire de lutte. C’est dans ce maillage entre le sensible et le politique que le festival puise sa force. Il ne s’agit pas d’un simple divertissement, mais d’un moment d’intelligence collective, où l’art devient matière à discussion, à friction, à transformation.

La dimension historique de Makhanda – ancienne Grahamstown, haut lieu de la colonisation britannique et des conflits frontaliers – ajoute une profondeur particulière à l’événement. Certaines visites guidées organisées pendant le festival permettent de relire les lieux à travers l’histoire des luttes, des résistances, des silences. Ces parcours complètent les œuvres exposées ou jouées, et donnent aux visiteurs une compréhension plus fine de ce qui se joue ici : un art enraciné, en dialogue avec les fractures et les désirs d’un pays.

Informations pratiques

Dates : du jeudi 26 juin au dimanche 6 juillet 2025
Lieu : Makhanda (anciennement Grahamstown), province du Cap-Oriental, Afrique du Sud
Accès : en voiture depuis Port Elizabeth (environ 2 heures), ou par bus interurbain
Billetterie : sur le site officiel nationalartsfestival.co.za
Tarifs : variables selon les spectacles (certains gratuits)
Langues : programmation en anglais, isiXhosa, afrikaans, avec surtitrage pour certaines pièces
Hébergement : hôtels, auberges et résidences étudiantes disponibles en ville (réservation recommandée)
Climat : hivernal dans l’hémisphère sud – prévoir vêtements chauds en soirée