- Mondafrique https://mondafrique.com/loisirs-culture/ Mondafrique, site indépendant d'informations pays du Maghreb et Afrique francophone Mon, 21 Apr 2025 06:25:29 +0000 fr-FR hourly 1 https://wordpress.org/?v=6.8 https://mondafrique.com/wp-content/uploads/2017/11/logo_mondafrique-150x36.jpg - Mondafrique https://mondafrique.com/loisirs-culture/ 32 32 Abu Dhabi, les sœurs Labèque envoutent leur public https://mondafrique.com/loisirs-culture/au-festival-dabu-dhabi-les-soeurs-labeque-envoutent-lassistance/ https://mondafrique.com/loisirs-culture/au-festival-dabu-dhabi-les-soeurs-labeque-envoutent-lassistance/#respond Sun, 20 Apr 2025 18:27:48 +0000 https://mondafrique.com/?p=132152 Le 16 avril 2025, dans le cadre de la 22e édition du Festival d’Abu Dhabi, les sœurs Labèque ont offert un récital de piano à quatre mains au Red Theater de NYU Abu Dhabi. Devant un public attentif et ému, elles ont déroulé un programme construit comme une narration en triptyque, où se mêlent l’imaginaire […]

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Le 16 avril 2025, dans le cadre de la 22e édition du Festival d’Abu Dhabi, les sœurs Labèque ont offert un récital de piano à quatre mains au Red Theater de NYU Abu Dhabi. Devant un public attentif et ému, elles ont déroulé un programme construit comme une narration en triptyque, où se mêlent l’imaginaire des contes, la mémoire du cinéma et la puissance de l’écriture musicale.

Belinda Ibrahim d’Ici Beyrouth, site partenaire

Pour la 22e édition du Festival d’Abu Dhabi, au Red Theater de NYU Abu Dhabi, Katia et Marielle Labèque ont envoûté l’audience. Leur récital a tissé un dialogue saisissant entre Glass et Cocteau, avec Ravel comme pont musical. En ouverture, La belle et la bête de Glass déploie ses motifs hypnotiques sur deux pianos, suivie par Ma mère l’oye de Ravel dans sa version originale à quatre mains, parenthèse enchantée au cœur du programme. Après l’entracte, Les enfants terribles de Glass a refermé cette boucle sonore, fusionnant parfaitement ces univers artistiques en une expérience quasi cinématographique.

Dès les premières mesures de La belle et la bête, l’alchimie Labèque opère. Deux corps, quatre mains, une seule respiration. L’univers minimaliste de Glass, fait de motifs cristallins et de répétitions subtiles, épouse la ligne narrative du conte filmé. On entend le miroir, on ressent le jardin, on voit presque le pavillon et la métamorphose finale. Les pianistes offrent au public une sorte de cinéma sans écran, où la musique fait surgir les images mentales.

Avec Ma mère l’oye, elles font basculer la salle dans un autre rêve, plus délicat, plus enfantin. Du Petit poucet aux Entretiens de la belle et de la bête, chaque mouvement est peint avec une grâce limpide. Rien d’appuyé, rien de démonstratif. Ravel est ici joué dans toute sa poésie, avec cette pudeur qui sied à l’enfance et à la mémoire. Après l’entracte, Les enfants terribles s’ouvre sur une tension sourde. Ce dernier volet de la trilogie de Philip Glass inspirée de Cocteau met en musique la fusion destructrice entre Paul et Lise, deux adolescents enfermés dans leurs fantasmes. Les sœurs Labèque incarnent à travers leurs instruments la frontière trouble entre rêve et réalité. Le jeu devient théâtre, le théâtre devient vertige. Les thèmes s’emmêlent. Le monde se déforme comme un souvenir d’enfance mal refermé.

Une vitalité solaire

Mais ce qui rend leur concert inoubliable, au-delà de la performance musicale, c’est l’énergie lumineuse qu’elles dégagent. Katia et Marielle Labèque dansent avec leurs touches, elles vivent chaque mesure, elles insufflent à la scène une vitalité rare. Durant le concert, les règles de la salle sont scrupuleusement respectées. Aucune photo, aucun mouvement superflu, une atmosphère de recueillement presque sacré. Mais à l’issue du récital, le cocktail offert permet un renversement de ton, une ouverture joyeuse et spontanée. Là, les sœurs Labèque se révèlent proches, curieuses, généreuses. On apprend que l’une d’elles adore les chats – terrain d’entente inattendu pour bien des convives – et que les conversations bifurquent avec naturel vers le Liban, d’où nous venons – pour couvrir en particulier ce concert –, la musique, les hasards de la vie. En quelques échanges, le sérieux s’efface, l’humain reprend le dessus, et la musique se prolonge dans les voix, les sourires, les complicités nouvelles.

Un art de la suspension

En ouvrant et refermant la soirée par deux œuvres de Philip Glass inspirées de Jean Cocteau, les sœurs Labèque placent leur récital sous le signe du double et du miroir. À travers La belle et la bête et Les enfants terribles, elles explorent deux manières d’aimer: la beauté transformatrice et l’obsession ravageuse. Entre les deux, Ma mère l’oye agit comme une parenthèse enchantée, une respiration d’enfance. Le choix des œuvres porte également une réflexion discrète, mais puissante, sur le temps; temps du conte, temps suspendu de l’enfance, temps cyclique du souvenir. En cela, le concert rappelle – moins par filiation que par résonance – le film Prodigieuses, qui met en scène deux sœurs pianistes traversant les épreuves main dans la main, portées par une même passion. Comme dans le film, chez Katia et Marielle Labèque, la musique devient un langage intime, une force de lien et de résistance. On y retrouve cette complicité presque organique, ce dialogue sans mots entre deux artistes qui ne forment qu’un souffle. Et, comme dans Prodigieuses, le temps semble suspendu, transfiguré, tendu vers un présent d’intensité et d’absolu.

Ce qui reste après un concert des Labèque, ce n’est pas seulement la mémoire d’un son. C’est une forme de joie tenace. Le Festival d’Abu Dhabi, en leur offrant cette scène, a aussi offert à son public un miroir précieux: celui d’une beauté qui ne se donne pas en spectacle, mais en confidence. Katia et Marielle Labèque, par leur complicité, leur exigence, leur feu tranquille, ont prolongé le silence. Et dans ce silence, il y avait comme un vœu. Que la musique continue. Et que, peut-être, dans un futur proche, elles rejouent sur d’autres rives qu’elles aiment, celles du Liban, pays de miel, d’encens… et d’espérance

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L’écriture d’Aimé Césaire belle comme l’oxygène naissante https://mondafrique.com/international/leloge-daime-cesaire/ https://mondafrique.com/international/leloge-daime-cesaire/#respond Sun, 20 Apr 2025 18:18:03 +0000 https://mondafrique.com/?p=132145 Paris. Jeudi, 17 avril 2025. La Rhumerie. Boulevard Saint-Germain. Hommage à Aimé Césaire, organisé par la poétesse Suzanne Dracius et l’éditeur Jean-Benoît Desnel, avec la participation des comédiens Amadou Gaye et Greg Germain. Une chronique de Mustapha Saha La part d’Aimé Césaire est toujours prégnante. Il prend en charge, dès ses premiers écrits, la part […]

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Paris. Jeudi, 17 avril 2025. La Rhumerie. Boulevard Saint-Germain. Hommage à Aimé Césaire, organisé par la poétesse Suzanne Dracius et l’éditeur Jean-Benoît Desnel, avec la participation des comédiens Amadou Gaye et Greg Germain.

Une chronique de Mustapha Saha

La part d’Aimé Césaire est toujours prégnante. Il prend en charge, dès ses premiers écrits, la part refoulée des noirs caraïbéens à l’époque des luttes anticoloniales, au moment où la conscience aigüe de l’esclavagisme suscite des traumatismes mortifères. L’écriture est taillée dans la pierre, éruptive, volcanique, irrévocable. Le rythme est percussif, impulsif, collusif.  Se transgresse les conventions du langage. S’ouvre la sémantique sur l’imprévisible, l’imprédictible, l’insoupçonnable.

« L’écriture césairienne se savoure en poésie belle comme l’oxygène naissant 

André Breton

Suzanne Dracius lit un extrait du poème d’Aimé Césaire Le Verbe maronner. À René Depestre, poète Haïtien. Le texte d’origine, intitulé Réponse à René Depestre. Éléments d’un art poétique, est  publié dans la revue Présence Africaine dans le numéro d’avril-juillet 1955, dont Aimé Césaire est cofondateur.

« Fous-t-en Depestre fous-t-en laisse dire Aragon

Quittez Aragon bouler

La faiblesse de Depestre, dirais-je l’erreur, est d’avoir une vue a priori du problème 

Mais où est Depestre ?

Quel est cet éblouissement, quelle est cette contemplation extatique devant l’héritage prosodique français ? »

Paroles agissantes.

Les échauffourées rhétoriques galvanisent les luttes anticoloniales. Maronner, c’est pratiquer la spécificité nègre dans tous les domaines. Cette singularité passe par la poésie, qui installe l’intellectuel au cœur du monde et de lui-même. L’engagement politique n’altère pas la réflexion philosophique, l’invention littéraire, la subversion poétique. Le contraire d’un militantisme suiveur. Louis Aragon, particulièrement, attire les foudres d’Aimé Césaire. L’auteur de La Diane française, éditions Pierre Seghers, 1944, qualifie l’alexandrin de grand tracteur, de terrible maître du tambour. Il préconise le retour au sonnet. Il amalgame le mouvement révolutionnaire avec la Pléiade. Cf. Journal d’une poésie nationale, 1954. Aimé Césaire refuse l’instrumentalisation de la poésie à quelque fin que ce soit. Il récuse « le champ culturel structuré par la dégradation symbolique ». Il s’investit dans la décolonisation des formes et des contenus, la désaliénation de l’intellect, du percept, de l’affect. Il conseille à René Depestre un voyage « sans rimes, toute une saison, loin des mares ». Il l’exhorte à la rébellion prosodique, à la révolte contre les diktats de l’actualité parisienne. « Crois-m’en comme jadis bats-nous le bon tam-tam » (Aimé Césaire). La négritude est incessamment clamée comme indémontable matrice. « Ma négritude n’est pas une taie d’eau morte ruée contre la clameur du jour » (Cahier d’un retour au pays natal). Rejet des enrôlements, des enrégimentements, des encadrements. Impératif préalable, se dégager, de la bourbe, de la fange, de la bouillasse. Reprendre, en toute chose, l’initiative. Ainsi, Aimé Césaire s’institue comme le sémaphore de la métissité, de la créolité, de l’hybridité, de la forêt natale, du chant profond du jamais refermé.

 

Aux lendemains de la Seconde Guerre mondiale, Aimé Césaire est célèbre. Son Discours sur le colonialisme, éditions Réclame, 1950, est un tournant historique, dans la lutte des damnés de la terre et dans la littérature. L’impérialisme occidental se dénonce comme mécanique de déculturation. L’argumentaire est marxiste. Le style est explosif. Le combat est intrinsèquement culturel. Dès 1945, le poète est maire de Fort-de-France,  jusqu’en 2001, et député de la Martinique, jusqu’en 1993. Il est membre du parti communiste dont il démissionne en 1956. Lettre à Maurice Thorez : « Ce n’est ni le marxisme, ni le communisme que je renie. Je dis qu’il n’y a pas de variante africaine, ou malgache, ou antillaise du communisme, parce que le communisme français trouve plus commode de nous imposer la sienne. L’anticolonialisme même des communistes français porte les stigmates de ce colonialisme qu’il combat ».

En Mai 68, j’applique, avec Omar Blondin Diop, ce même constat au gauchisme. Nous sommes alors, tous les deux, les exceptions africaines qui confirment la règle. « Tiraillé entre son appartenance au parti communiste et ses amitiés surréalistes, entre la liberté de création et le caporalisme partidaire, entre les cultures nègres et les assimilations européennes, Aimé Césaire n’a jamais réussi à concilier ses aspirations fondamentales » (David Alliot, Le Communisme est à l’ordre du jour. Aimé Césaire et le PCF, de l’engagement à la rupture, 1935 – 1956, éditions Pierre-Guillaume de Roux, 2013). Le poète détracte l’assimilationnisme des communistes, leur chauvinisme, leur suprémacisme.

Les Mots Nus

Je dis mon poème Les Mots nus, dédié à Aimé Césaire, lutinerie post-mortem en alexandrins.

« Que peuvent les mots nus quand sonnent les clairons

Quand s’éclipse la lune au rythme des alarmes

Quand s’endeuillent les clowns et les joyeux lurons

Quand s’abreuve l’amour aux collecteurs de larmes

Que peuvent les mots nus quand s’embrasent les tours

Quand voltigent les corps comme fétus de paille

Quand s’invite la bourse au festin des vautours

Quand s’unit la canaille aux funestes ripailles

Que peuvent les mots nus quand rodent les vampires

Quand traînent dans la boue les âmes sans ressort

Quand s’écroule d’un coup l’invulnérable empire

Quand s’arment les enfants pour conjurer le sort

Que peuvent les mots nus quand s’extirpent les lombes

Quand germe la guerre dans les mares d’or noir

Quand tombe au petit jour la dernière colombe

Quand spéculent sur l’art les affreux tamanoirs

Que peuvent les mots nus quand meurent les sirènes

Quand flambent les cités pour un bout d’oriflamme

Quand s’écrit la gloire dans le sang des arènes

Quand s’enfuient les serpents des ziggourats en flammes

Que peuvent les mots nus quand pleuvent les missiles

Quand s’ébattent les chiens dans les maisons sans porte

Quand crache la terre ses ténébreux fossiles

Que peuvent les mots nus que vent de sable emporte

(Mustapha Saha, Le Calligraphe des sables, éditions Orion, 2021).

« Bordélise ta poésie »

J’ai fréquenté Aimé Césaire pendant trente ans, de 1968 jusqu’à quelques mois avant sa mort en 2008. Il abhorrait la métrique classique. Je le taquinais avec mes octosyllabes, mes décasyllabes, mes alexandrins. Il faisait semblant d’être agacé. Un jour, il me dit : « Bordélise un peu ta poésie, elle sera plus vivante. Moi, je n’écris pas dans la mélodie. J’écris dans la discordance, dans la dissonance, dans la dissidence ».

La dernière fois que je vois Aimé Césaire, il a un verre de lunettes cassé. Je lui propose de contacter un opticien. Il me dit : « Pas la peine. Je n’en ai plus besoin ». J’esquisse au crayon son portrait. J’en tire plus tard une peinture sur toile. Cette image s’impose dans mon esprit chaque que je pense à lui.

 

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Kehinde Wiley à Rabat des portraits monumentaux de chefs d’État  https://mondafrique.com/loisirs-culture/kehinde-wiley-a-rabat-des-portraits-monumentaux-de-chefs-detat/ https://mondafrique.com/loisirs-culture/kehinde-wiley-a-rabat-des-portraits-monumentaux-de-chefs-detat/#respond Sun, 20 Apr 2025 07:35:37 +0000 https://mondafrique.com/?p=132110 Cet ’extraordinaire transgresseur des règles du monde de l’art, se saisit de la portraiture classique à l’ancienne et lui donnee une transformation ultra-moderne super cool.

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Jusqu’à fin avril, le Musée Mohammed VI à Rabat accueille « A Maze of Power », une exposition magistrale de Kehinde Wiley. Cet ’extraordinaire transgresseur des règles du monde de l’art, se saisit de la portraiture classique à l’ancienne et lui donnee une transformation ultra-moderne super cool. Nous parlons de portraits énormes, audacieux et percutants comme ceux de chefs d’État africains qui interrogent, détournent et réinventent les codes de la représentation politique.

Au cœur du Musée Mohammed VI d’Art Moderne et Contemporain, à Rabat, les murs semblent vibrer sous le poids d’une présence singulière : celle des chefs d’État africains, figés dans une majesté troublante, regard fixe, port altier, costumes taillés sur mesure, trônant au sein de compositions baroques éclatantes. L’exposition « A Maze of Power » de Kehinde Wiley, en cours jusqu’à la fin avril 2025, offre bien plus qu’un face-à-face avec le pouvoir. Elle met en scène une galerie d’images où se croisent histoire coloniale, iconographie royale européenne et identité africaine contemporaine, dans un ballet visuel aussi somptueux qu’inconfortable.

Kehinde Wiley, artiste américain de renom international, est surtout connu pour avoir réalisé le portrait officiel de Barack Obama en 2018. Mais son œuvre va bien au-delà. Depuis plus de vingt ans, il interroge les formes de représentation du pouvoir, en particulier celles qui ont longtemps exclu les corps noirs des récits dominants. Son geste artistique, profondément politique, consiste à réinvestir les codes visuels de la peinture occidentale — portraits d’apparat, décors floraux, poses théâtrales, drapés opulents — pour y inscrire des figures noires, anonymes ou célèbres, qui revendiquent une place dans l’histoire de l’art et dans l’imaginaire collectif.

Avec « A Maze of Power », Wiley pousse encore plus loin cette entreprise de renversement symbolique. Il y présente une série inédite de portraits de dirigeants africains contemporains, réalisés au terme d’un long travail de recherche, de rencontres et de mises en scène. Chaque chef d’État a été invité à choisir sa posture, son cadre, sa symbolique. Le résultat : des images à la fois grandioses et ambiguës, qui interrogent notre rapport au pouvoir, à la représentation, à la masculinité et à l’autorité. Car si les portraits impressionnent par leur facture et leur éclat, ils dérangent aussi par ce qu’ils révèlent – ou dissimulent.

La transfression du pouvoir

À Rabat, ces toiles monumentales prennent une résonance particulière. Dans une institution dédiée à l’art moderne et contemporain du Maroc, elles viennent perturber le regard, poser des questions sans réponses faciles. Qui décide de ce qu’est un « bon » portrait politique ? Que signifie représenter le pouvoir aujourd’hui, dans un monde saturé d’images mais avide de symboles ? Quelle est la place de l’Afrique dans l’imaginaire global du pouvoir ? Wiley ne propose pas de verdict, mais tend un miroir, déformant parfois, révélateur toujours.

L’exposition frappe également par son ambition esthétique. Chaque toile déborde de détails minutieux, de couleurs vives, de motifs ornementaux inspirés aussi bien de la peinture flamande que de l’art décoratif islamique. Les arrière-plans se détachent parfois du réalisme pour entrer dans une abstraction luxuriante, qui vient encadrer – ou engloutir – les figures représentées. Le contraste entre la solennité des poses et la profusion visuelle crée une tension permanente, un vertige presque baroque, fidèle à l’univers de Wiley.

L’exposition est traversée par une question plus vaste : celle de l’image et de son pouvoir. En redonnant aux chefs d’État africains ou autres, comme le portrait de Napoléon ci dessus,les outils de leur propre représentation, Wiley brouille les pistes. Sont-ils mis en scène ou maîtres de leur image ? Sont-ils sujets ou objets d’un regard critique ? L’artiste joue avec cette ambiguïté, s’en nourrit, l’exacerbe. Et le spectateur, lui, oscille entre fascination et méfiance.

Jusqu’à la fin du mois, « A Maze of Power » offre ainsi aux visiteurs une expérience à la fois esthétique, historique et politique. Une plongée dans un labyrinthe d’images, de symboles et de récits où rien n’est figé, où tout se joue dans l’ambivalence.

Ces présidents africains qui se font tirer le portrait

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Le 19 avril, Tarba Mbaye enflammera les Folies Bergère. https://mondafrique.com/loisirs-culture/le-19-avril-tarba-mbaye-enflammera-les-folies-bergere/ https://mondafrique.com/loisirs-culture/le-19-avril-tarba-mbaye-enflammera-les-folies-bergere/#respond Sat, 19 Apr 2025 08:09:18 +0000 https://mondafrique.com/?p=132078 Ce sera une soirée unique où la voix chaleureuse du chanteur sénégalais portera les rythmes du Sahel, entre tradition et modernité, dans l’un des lieux les plus emblématiques de Paris.   Le 19 avril prochain, c’est un souffle venu de Dakar qui traversera la scène des Folies Bergère. Tarba Mbaye, figure montante de la scène musicale […]

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Ce sera une soirée unique où la voix chaleureuse du chanteur sénégalais portera les rythmes du Sahel, entre tradition et modernité, dans l’un des lieux les plus emblématiques de Paris.

 

Le 19 avril prochain, c’est un souffle venu de Dakar qui traversera la scène des Folies Bergère. Tarba Mbaye, figure montante de la scène musicale sénégalaise, y donnera un concert très attendu, dans une salle mythique qui s’apprête à vibrer au rythme du mbalax, des balades en wolof et des métissages sonores qui font la singularité de son univers. C’est la première fois que l’artiste se produit dans cette salle parisienne, et l’événement promet d’attirer une foule cosmopolite, composée autant de fans de la diaspora que d’amateurs de musiques du monde en quête d’émotions vraies.

Exil, amour, identité, transmission

Tarba Mbaye n’est pas un inconnu. Né à Saint-Louis du Sénégal, il a grandi dans un environnement musical riche, nourri par les grandes figures de la chanson africaine comme Ismaël Lô, Baaba Maal ou Youssou N’Dour, mais aussi par les influences venues des États-Unis et d’Europe. Sa musique, enracinée dans les traditions sénégalaises, s’ouvre sans complexe aux guitares blues, aux nappes électroniques discrètes et aux grooves chaloupés. Elle parle d’exil, d’amour, d’identité, de transmission, de résistance aussi. Elle est à la fois intime et collective, portée par une voix chaude, souple, capable de vibrer autant dans les graves que dans les envolées lyriques.

Aux Folies Bergère, Tarba Mbaye présentera les titres de son dernier album Jëmm, acclamé par la critique et largement diffusé sur les plateformes musicales. Ce disque, conçu entre Dakar, Paris et Bruxelles, témoigne de sa maturité artistique et de sa volonté d’ancrer son art dans le présent, tout en restant fidèle à ses racines. À travers des textes en wolof, en français et en anglais, il tisse des ponts entre les continents, entre les générations, entre les mémoires. Jëmm, qui signifie à la fois « paix » et « équilibre », est un manifeste doux et déterminé, un appel à l’écoute et au dialogue.

Le concert du 19 avril s’annonce comme un moment fort de cette tournée européenne. Il réunira sur scène un ensemble de musiciens virtuoses : percussions sabar, guitare acoustique, kora, claviers et chœurs viendront tisser un paysage sonore riche, dynamique, en constante évolution. Ce concert sera aussi un geste artistique, une prise de parole musicale sur ce que signifie être un artiste africain en 2025, entre ancrage local et circulation mondiale. Tarba Mbaye incarne cette génération qui n’a pas besoin de choisir entre tradition et modernité, entre langue maternelle et langues étrangères, entre danse et réflexion. Il les embrasse toutes, avec une sincérité désarmante.

Le 19 avril, sous les lumières des Folies Bergère, les battements du Sénégal résonneront au cœur de Paris. Une soirée pour vibrer, chanter, réfléchir, danser peut-être. Une soirée pour sentir que la musique, quand elle vient du cœur et qu’elle parle vrai, n’a pas de frontière.

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Ce road-movie à travers le Maroc présenté à Cannes https://mondafrique.com/loisirs-culture/ce-road-movie-a-travers-le-maroc-presente-a-cannes/ https://mondafrique.com/loisirs-culture/ce-road-movie-a-travers-le-maroc-presente-a-cannes/#respond Sat, 19 Apr 2025 00:15:00 +0000 https://mondafrique.com/?p=132084 Présenté en sélection officielle au Festival de Cannes 2025, « Sirat » d’Óliver Laxe nous entraîne dans un road-movie à travers le Maroc, où un père et son fils cherchent une disparue – et se retrouvent face à eux-mêmes. Il est des films qui ne racontent pas une histoire mais qui la traversent, comme on […]

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Présenté en sélection officielle au Festival de Cannes 2025, « Sirat » d’Óliver Laxe nous entraîne dans un road-movie à travers le Maroc, où un père et son fils cherchent une disparue – et se retrouvent face à eux-mêmes.

Il est des films qui ne racontent pas une histoire mais qui la traversent, comme on traverserait un désert, une douleur, une vérité difficile à regarder en face. « Sirat », le nouveau long-métrage d’Óliver Laxe, appartient à cette catégorie rare. Sélectionné en compétition officielle au Festival de Cannes 2025, ce film d’une beauté saisissante déploie un récit de disparition qui devient peu à peu une traversée intérieure. Sur les routes poussiéreuses du Maroc, un père et son fils roulent vers une absence, et ce faisant, vers eux-mêmes.

Luis, la cinquantaine, Espagnol aux gestes retenus, apprend que sa fille Marina, étudiante en école d’art, a disparu lors d’une rave party dans le désert marocain. Il décide de partir à sa recherche, accompagné d’Esteban, son fils adolescent, qu’il connaît à peine et dont il semble s’être éloigné depuis longtemps. Ce voyage improbable, qui commence sur fond de silences gênés et de non-dits familiaux, se transforme en un périple initiatique au fil des kilomètres, des paysages et des rencontres.

Le titre « Sirat », qui évoque en arabe le « pont » étroit que traversent les âmes après la mort selon certaines traditions musulmanes, donne immédiatement la clé symbolique du film. Laxe, fidèle à son style méditatif et sensoriel, ne cherche pas tant à résoudre une énigme qu’à faire sentir ce qui se joue dans le lien ténu entre les êtres. Il filme les silences plus que les dialogues, les visages abîmés plus que les mots, les paysages comme des états d’âme mouvants. Le désert marocain devient ici un personnage à part entière, changeant, hostile, sublime, où le réel se trouble et vacille.

La caméra d’Óliver Laxe capte cette vibration particulière : celle d’un monde à la fois spirituel et désenchanté, qui oscille entre le mystique et le banal. À travers Luis et Esteban, il sonde la faille générationnelle, l’incapacité à communiquer, la fatigue d’aimer et la peur de perdre. Le père, rationnel, occidental, fatigué, semble incapable de comprendre ce que Marina est venue chercher dans cette fête en plein désert. Le fils, lui, en marge de tout, est peut-être celui qui comprend intuitivement ce que ce voyage signifie. Le chemin qu’ils empruntent n’est pas linéaire : il bifurque, s’ensable, recule parfois, au gré de leurs émotions et de leurs confrontations.

Mais « Sirat » n’est pas un film bavard. Laxe préfère suggérer que démontrer. Il fait le choix de l’épure, du ralenti, de la contemplation. On pense parfois à Terrence Malick, à Nuri Bilge Ceylan ou à Apichatpong Weerasethakul, mais avec une texture propre, ancrée dans un rapport intime à la lumière, au minéral, à l’effacement. Le montage, ample et précis, laisse respirer les plans. La bande sonore, quasi hypnotique, mêle nappes électroniques, chants traditionnels et bruits naturels, dans une fusion qui évoque le trouble des frontières.

Le Maroc filmé par Laxe n’est ni carte postale ni décor, il est présence, densité, trouble. Il se donne à voir comme un espace de projections, de fantasmes et de confrontations. Loin des clichés orientalistes, le réalisateur laisse la place aux habitants, aux visages anonymes, aux figures secondaires qui viennent ponctuer le récit d’éclats d’humanité : un conducteur de taxi philosophe, un vieil homme qui garde une oasis oubliée, une femme qui parle à la lune. Autant d’apparitions qui brouillent le chemin et nourrissent la dimension quasi métaphysique du film.

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Netflix, une comédie familiale sur la société sud-africaine https://mondafrique.com/loisirs-culture/netflix-une-comedie-familiale-sur-la-societe-sud-africaine/ https://mondafrique.com/loisirs-culture/netflix-une-comedie-familiale-sur-la-societe-sud-africaine/#respond Fri, 18 Apr 2025 23:41:00 +0000 https://mondafrique.com/?p=131189  Le 11 avril, Netflix met en ligne Meet the Khumalos, une comédie sud-africaine au ton vif et familial. Dans un contexte où les productions africaines gagnent en visibilité mondiale, ce film marque une nouvelle étape vers un cinéma continental plus accessible. Netflix poursuit son exploration du continent africain avec Meet the Khumalos, une comédie sud-africaine attendue sur […]

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 Le 11 avril, Netflix met en ligne Meet the Khumalos, une comédie sud-africaine au ton vif et familial. Dans un contexte où les productions africaines gagnent en visibilité mondiale, ce film marque une nouvelle étape vers un cinéma continental plus accessible.

Netflix poursuit son exploration du continent africain avec Meet the Khumalos, une comédie sud-africaine attendue sur la plateforme le 11 avril. Ce choix stratégique s’inscrit dans une volonté affirmée du géant du streaming de diversifier ses offres tout en misant sur des récits enracinés dans des cultures locales, mais à portée universelle. À l’heure où l’industrie du divertissement tente de répondre à une demande croissante de représentations plus larges, plus authentiques et moins standardisées, Meet the Khumalos arrive à point nommé.

Le pitch est simple, mais redoutablement efficace : deux mères, autrefois meilleures amies, sont désormais ennemies jurées. Leurs enfants tombent amoureux, et une guerre de voisinage s’ensuit, faite de coups bas domestiques, de rivalités anciennes ravivées et de tendresses mal dissimulées. L’histoire se joue dans un quartier sud-africain ordinaire, mais c’est justement dans cette ordinarité que réside sa puissance. Car au-delà du comique de situation, ce sont les dynamiques sociales, les codes familiaux, les blessures du passé et les espoirs de réconciliation qui s’expriment. Le spectateur est invité à rire, certes, mais aussi à reconnaître les enjeux profonds qui nourrissent ce type de confrontation.

La comédie familiale est un genre souvent délaissé lorsqu’il s’agit de parler du continent africain sur la scène internationale. On lui préfère des récits de guerre, de survie ou de misère, comme si l’Afrique ne pouvait exister qu’à travers la souffrance. Or, Meet the Khumalos prend le contrepied de cette vision étroite et caricaturale, en offrant un récit où les personnages sont drôles, complexes, imparfaits, mais profondément humains. Il ne s’agit pas ici de lisser une réalité ou de nier les difficultés sociales, mais de montrer que le quotidien africain peut aussi être source de comédie, d’émotion et de finesse narrative. Et cela, sans exotisme ni misérabilisme.

En diffusant ce film, Netflix contribue à renforcer la place des créations africaines dans le paysage audiovisuel mondial. La plateforme avait déjà donné le ton avec des productions nigérianes comme Blood Sisters ou Shanty Town, mais Meet the Khumalos s’inscrit dans un registre différent : celui du cinéma populaire, accessible à un large public, et capable de fédérer par son humour. C’est aussi une manière de normaliser l’Afrique à l’écran, de l’ancrer dans des récits universels tout en respectant ses spécificités culturelles. L’enjeu n’est pas seulement de produire en Afrique, mais de faire entendre des voix africaines, dans leur diversité et leur autonomie de ton.

La réussite d’un tel film ne tient pas uniquement à son scénario ou à sa mise en scène, mais à la capacité de ses acteurs à incarner avec justesse des personnages ancrés dans une réalité locale. La distribution sud-africaine, peu connue du grand public international, est pourtant d’une justesse remarquable. Chaque regard, chaque réplique est habité de cette vérité qui dépasse le simple jeu comique. On y perçoit l’influence du théâtre sud-africain, la vivacité des dialogues issus de la rue, et cette manière très africaine de mêler rire et gravité dans une même scène.

Si Meet the Khumalos rencontre le succès escompté, il pourrait ouvrir la voie à d’autres projets similaires : des films qui ne cherchent pas à représenter l’Afrique au sens large, mais un quartier, une famille, une situation précise.

À l’heure où les plateformes de streaming deviennent les nouvelles vitrines culturelles de la planète, Meet the Khumalos rappelle que l’Afrique a des histoires à raconter qui ne passent ni par la tragédie ni par l’exception. Elle peut, comme toute autre région du monde, parler d’amour, de voisinage, de rivalité entre mères et de jeunes couples maladroits. Et elle peut le faire avec légèreté, intelligence et sincérité.

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Le 18 avril, le duo togolais Toofan enflamme Paris https://mondafrique.com/international/le-18-avril-le-duo-togolais-toofan-enflamme-paris/ https://mondafrique.com/international/le-18-avril-le-duo-togolais-toofan-enflamme-paris/#respond Fri, 18 Apr 2025 01:34:42 +0000 https://mondafrique.com/?p=132051   Le 18 avril, Toofan célèbre ses vingt ans de carrière au Zénith de Paris. Entre afropop, coupé-décalé et sonorités urbaines, le duo togolais offre un concert anniversaire vibrant, reflet d’un parcours unique entre ancrage africain et ouverture mondiale. Le 18 avril 2025, les murs du Zénith de Paris vibreront aux sons de l’Afrique de l’Ouest. À […]

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Le 18 avril, Toofan célèbre ses vingt ans de carrière au Zénith de Paris. Entre afropop, coupé-décalé et sonorités urbaines, le duo togolais offre un concert anniversaire vibrant, reflet d’un parcours unique entre ancrage africain et ouverture mondiale.

Le 18 avril 2025, les murs du Zénith de Paris vibreront aux sons de l’Afrique de l’Ouest. À l’affiche : Toofan, le duo togolais qui a su, en vingt ans de carrière, transformer ses pulsations locales en un langage musical universel. Pour ce concert anniversaire exceptionnel, le groupe promet un voyage sonore à travers deux décennies de tubes, de collaborations, de danses et d’émotions partagées.

Formé au début des années 2000 à Lomé, Toofan – composé de Barabas et Master Just – s’est imposé comme l’un des fers de lance de la musique contemporaine africaine. Leur style, surnommé le « Cool Catché », mélange habilement afropop, coupé-décalé, rythmes traditionnels togolais et influences urbaines globales. Dès leurs premiers succès locaux, le duo a très vite compris la puissance des images et des danses virales, associant chacun de leurs titres à un mouvement chorégraphique distinctif qui a conquis l’Afrique, puis le monde entier.

Leur ascension n’a rien d’un hasard. Toofan a su capter l’air du temps, en ancrant ses sons dans les réalités africaines tout en dialoguant avec les influences extérieures, du hip-hop américain à l’électro européenne. Cette capacité d’adaptation, alliée à une authenticité jamais reniée, leur a permis de traverser les modes, les frontières, et de devenir un véritable symbole de la jeunesse africaine moderne : créative, résiliente, festive et ouverte.

Le concert du Zénith sera bien plus qu’un simple best of. Il sera la célébration vivante d’un parcours jalonné de morceaux phares, de rencontres artistiques et de défis relevés. De « Eledji » à « Téré Téré », de « Ma Girl » à « Affairage », chaque titre raconte une époque, une énergie, une envie de rassembler au-delà des langues et des barrières géographiques. Portés par une mise en scène soignée, des musiciens live et une équipe chorégraphique de haut vol, Barabas et Master Just entendent offrir au public parisien une soirée à leur image : généreuse, explosive et fédératrice.

Au-delà de leur talent musical, Toofan incarne aussi un modèle d’entrepreneuriat culturel africain. Producteurs de leurs propres albums, créateurs de concepts scéniques novateurs, ils ont toujours revendiqué leur indépendance artistique. Leur succès international n’a jamais occulté leur volonté de rester connectés à leurs racines : leurs clips, souvent tournés au Togo ou dans d’autres pays africains, célèbrent les paysages, les cultures et les réalités sociales du continent. À travers leur musique, Toofan construit depuis vingt ans une passerelle entre l’Afrique et le reste du monde, avec la conviction que la fierté culturelle peut rimer avec modernité et universalité.

La date du 18 avril 2025 n’a pas été choisie au hasard. Elle symbolise pour le groupe une étape charnière : le moment de jeter un regard rétrospectif sur un chemin parcouru avec ténacité, mais aussi de se projeter vers l’avenir. De nouveaux projets sont d’ailleurs annoncés dans la foulée du concert, dont un album anniversaire réunissant des collaborations inédites avec des artistes africains, caribéens et européens, témoignant de leur volonté d’élargir encore leur univers musical.

À Paris, ville cosmopolite et carrefour des diasporas africaines, ce concert prend une dimension particulière. La capitale française a toujours été un lieu d’expression privilégié pour les artistes du continent, un espace où les musiques africaines rencontrent de nouveaux publics, se métissent, se réinventent. Toofan y retrouve un public fidèle, composé autant de fans de la première heure que de nouvelles générations séduites par leur énergie communicative et leurs messages positifs.

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Burna Boy au Stade de France le 18 avril: la consécration de l’Afrobeat https://mondafrique.com/loisirs-culture/burna-boy-au-stade-de-france-lafrobeat-au-sommet-de-sa-gloire/ https://mondafrique.com/loisirs-culture/burna-boy-au-stade-de-france-lafrobeat-au-sommet-de-sa-gloire/#respond Thu, 17 Apr 2025 05:01:00 +0000 https://mondafrique.com/?p=131823 Le 18 avril 2025, Burna Boy, le prince de lAfrobeat, gravira une marche historique, celle de la première tête d’affiche africaine à se produire en solo au Stade de France. Une consécration musicale, mais surtout une victoire culturelle. À Saint-Denis, dans la plus grande enceinte du pays, 80 000 spectateurs vibreront au son de l’Afrobeat, genre […]

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Le 18 avril 2025, Burna Boy, le prince de lAfrobeat, gravira une marche historique, celle de la première tête d’affiche africaine à se produire en solo au Stade de France. Une consécration musicale, mais surtout une victoire culturelle.

À Saint-Denis, dans la plus grande enceinte du pays, 80 000 spectateurs vibreront au son de l’Afrobeat, genre longtemps relégué aux marges de l’industrie musicale occidentale. Ce soir-là, c’est l’Afrique qui prend le centre de la scène, et avec elle, toute une jeunesse diasporique, créative, fière, exigeante. Il y a dans cette date une forme de réparation douce, un retournement d’axe. Car l’histoire musicale, comme l’histoire tout court, a longtemps ignoré la voix du continent. Burna Boy la fait entendre jusqu’aux gradins les plus éloignés.

Ce concert est plus qu’une date dans une tournée. C’est une déclaration. Le Stade de France, lieu des finales de Coupe du monde, des shows de Beyoncé, des tournées de U2 ou des Rolling Stones, accueillera pour la première fois un artiste africain comme tête d’affiche unique. Burna Boy n’est pas simplement « invité » ou « programmation spéciale » d’un festival mondial. Il est le centre du dispositif, l’événement lui-même.

L’annonce, faite il y a plusieurs mois sur ses réseaux sociaux, a déclenché une vague d’enthousiasme sans précédent. Les billets, mis en vente à des prix oscillant entre 63 et 437 euros, se sont arrachés à grande vitesse. Le public attendu sera à l’image de son rayonnement : européen, africain, diasporique, multilingue. Dans les tribunes, on parlera anglais, français, yoruba, pidgin. Ce sera un carrefour, un manifeste en sons et en corps.

Un roi sans frontières

Mais qui est donc Burna Boy, celui que l’on acclame désormais aux quatre coins du monde ? Né à Port Harcourt, au Nigeria, en 1991, Damini Ebunoluwa Ogulu a grandi dans un univers où la musique était omniprésente. Sa mère, Bose Ogulu, aujourd’hui sa manager, lui transmet l’héritage linguistique et intellectuel d’une lignée panafricaniste. Son grand-père, Benson Idonije, fut le manager de Fela Kuti, père fondateur de l’Afrobeat. Le lien est là, direct, assumé.

Burna Boy n’est pas un héritier passif. Il est un bâtisseur. À partir de la base afrobeat, il ajoute les couches sonores de son époque : hip-hop américain, dancehall jamaïcain, R&B, musique électronique, trap. Une hybridation sans complexes, qui séduit les grandes majors et les plateformes mais sans jamais trahir son identité. Il chante en anglais, en pidgin, parfois en yoruba. Ses textes parlent d’amour, de déceptions, de rêves brisés, mais aussi de pillage colonial, de violences policières, de spiritualité yoruba, de mémoire africaine.

De Lagos à Paris : une trajectoire fulgurante

Après plusieurs albums confidentiels, Burna Boy explose sur la scène mondiale avec Outside (2018), puis African Giant (2019), album manifeste, radical et visionnaire. Suivront Twice As Tall (2020), récompensé d’un Grammy Award, puis Love, Damini (2022), qui confirme sa place parmi les voix majeures de la scène mondiale.

Sa collaboration avec des artistes comme Stormzy, Ed Sheeran, Jorja Smith, Justin Bieber ou Beyoncé n’est jamais opportuniste : c’est Burna Boy qui impose sa patte, pas l’inverse. Il est partout, mais toujours à sa façon. Il ne quémande pas l’attention, il la mérite.

Le concert du 18 avril s’annonce comme un moment générationnel. Chorégraphies millimétrées, scénographie grand format, effets visuels spectaculaires, invités surprises… tout est réuni pour marquer les esprits. Mais c’est dans la parole, dans le souffle de ses textes, que réside le cœur de l’événement.

Burna Boy ne se contente pas de faire danser. Il politise la fête. Il met en récit les fractures postcoloniales, les traumatismes de l’exil, les violences d’un monde qui marginalise l’Afrique tout en exploitant ses ressources et ses rythmes. Ce soir-là, ses mots résonneront dans l’un des lieux les plus emblématiques d’une France post-impériale, dans une ville marquée par l’histoire de l’immigration africaine. Rien de plus logique, au fond, que ce concert ait lieu à Saint-Denis.

Notre entretien video avec Jojo Sk, pionnier de l’Afrobeats

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L’Institut du Monde Arabe dévoile le Liban disparu https://mondafrique.com/loisirs-culture/lima-devoile-le-liban-disparu/ https://mondafrique.com/loisirs-culture/lima-devoile-le-liban-disparu/#respond Tue, 15 Apr 2025 16:00:11 +0000 https://mondafrique.com/?p=131925 Le musée de l’Institut du monde arabe dévoile une sélection inédite de photographies anciennes du Liban issues de la Bibliothèque orientale de Beyrouth, aux côtés d’une sculpture de Chaouki Choukini créée après l’explosion du port de Beyrouth en 2020. Ce dialogue entre images d’archives et art contemporain met en lumière un patrimoine fragilisé par les […]

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Le musée de l’Institut du monde arabe dévoile une sélection inédite de photographies anciennes du Liban issues de la Bibliothèque orientale de Beyrouth, aux côtés d’une sculpture de Chaouki Choukini créée après l’explosion du port de Beyrouth en 2020. Ce dialogue entre images d’archives et art contemporain met en lumière un patrimoine fragilisé par les conflits et célèbre la résilience culturelle libanaise.

Du 3 avril 2025 au 4 janvier 2026, l’Institut du monde arabe (IMA) invite le public à découvrir le Liban d’antan à travers « Photographier le patrimoine du Liban, 1864-1970 », une exposition réunissant des clichés historiques exceptionnels. Pour la première fois en France, ces photographies issues des archives de l’Université Saint-Joseph de Beyrouth dévoilent une douzaine de sites et monuments emblématiques – Byblos, Baalbek, Tyr, Saïda, entre autres – ainsi que les paysages variés du pays, des montagnes du Chouf aux plaines de la Béqaa . Réalisées entre 1864 et 1970, elles témoignent de l’architecture et de la vie quotidienne au Liban sur plus d’un siècle, offrant un aperçu visuel d’une richesse culturelle souvent méconnue.

Beaucoup de ces images n’avaient jamais été montrées hors du Liban jusqu’alors. Leur qualité impressionne tant par la maîtrise technique des premiers photographes que par leur valeur documentaire : on y voit par exemple des temples antiques avant les restaurations modernes, ou des scènes de marché et de port immortalisées il y a des décennies. Ces photographies ont été prises pour la plupart par des pères jésuites pionniers de l’archéologie, qui parcouraient le pays au début du XXᵉ siècle pour illustrer leurs cours et publications scientifiques. Au fil du temps, leur collection s’est enrichie de milliers de clichés, dont certains réalisés par de grands photographes du Levant de l’époque. Actuellement en cours de numérisation avec le soutien de partenaires français, ce fonds photographique constitue un trésor patrimonial inestimable, désormais partagé avec le public parisien.

Patrimoine menacé et sensibilisation en France

L’originalité de cette exposition est de mettre en lumière un patrimoine libanais dont l’existence même a été menacée par les tumultes de l’histoire. Les sites historiques visibles sur ces images ont traversé guerres et catastrophes naturelles, et bon nombre ont été « grandement mis en péril par les bombardements de l’armée israélienne » lors des conflits qui ont secoué le Liban . Voir ces photographies aujourd’hui, à Paris, donne une résonance particulière : elles montrent la splendeur d’un héritage culturel dans son état originel, avant qu’il ne soit endommagé ou altéré par les événements. En les admirant, les visiteurs en France prennent conscience de la fragilité de ce patrimoine moyen-oriental et de l’urgence de sa préservation.

Cette prise de conscience s’inscrit d’ailleurs dans une démarche plus large de l’IMA. En parallèle de l’exposition libanaise, le musée présente « Trésors sauvés de Gaza – 5000 ans d’histoire », une autre exposition dédiée aux vestiges archéologiques palestiniens récemment sauvés des destructions. Ce double programme, consacré à des trésors culturels menacés, souligne l’engagement de l’IMA à sauvegarder la mémoire des peuples en zone de conflit et à la partager avec le public occidental. L’initiative fait également écho aux liens historiques unissant la France et le Liban : Paris, souvent qualifiée de « seconde patrie » pour de nombreux intellectuels libanais, se fait ici le relais de leur histoire et de leur patrimoine. L’accueil enthousiaste réservé à ces images inédites témoigne de l’impact fort de cette présentation en France, autant auprès de la diaspora libanaise émue de retrouver des fragments de son passé, que du public français découvrant sous un nouveau jour un Liban au-delà des clichés habituels.

« Li Bayrut », une ville meurtrie

 

Le sculpteur libanais Chaouki Choukini
Chaouki Choukini, « Li Bayrut » (2020), bronze, 153 × 65 × 30 cm, exposé pour la première fois à l’IMA. L’œuvre rend hommage à Beyrouth après l’explosion du 4 août 2020

En écho aux photographies d’autrefois, l’IMA expose également une œuvre contemporaine chargée d’émotion. « Li Bayrut », grande sculpture en bronze du sculpteur libanais Chaouki Choukini, accueille les visiteurs à l’entrée du parcours. Réalisée au lendemain de la double explosion dévastatrice du port de Beyrouth le 4 août 2020, cette pièce inédite constitue un vibrant hommage à la capitale libanaise ravagée. Son titre, Li Bayrut (qui signifie « Pour Beyrouth » en arabe), est emprunté à une célèbre chanson de la diva Fairouz, symbole d’amour et de douleur pour la ville. Choukini, né au Liban en 1946 et formé aux Beaux-Arts de Paris, est reconnu pour ses sculptures abstraites mêlant influences orientales et occidentales. Ici, il a imaginé une forme verticale évoquant à la fois une silhouette architecturale et un totem brisé. Au centre de la masse de bronze sombre s’ouvre un vide circulaire – une béance qui suggère autant la bombe qui a éventré Beyrouth que la lumière pouvant filtrer à travers les ruines. Créée à l’initiative du collectionneur Claude Lemand, qui a encouragé l’artiste à réagir à la tragédie, la sculpture a été offerte au musée de l’IMA en 2024 (donation Claude et France Lemand). Présentée pour la toute première fois au public à l’occasion de cette exposition, elle se dresse comme un symbole de résilience. L’IMA précise qu’elle est exposée « en hommage à la créativité des artistes du Liban et de sa diaspora, et au pouvoir de résistance de l’œuvre d’art ».

 

Entre héritage et renaissance culturelle

En réunissant ces photographies séculaires et cette sculpture contemporaine, le parcours propose un dialogue saisissant entre le passé et le présent du Liban – sans toutefois tomber dans la nostalgie ou le discours convenu. Au contraire, l’exposition célèbre la permanence de l’esprit libanais à travers les épreuves. Les images d’archives préservent la beauté d’un patrimoine qui a survécu aux tempêtes de l’histoire, tandis que la création de Choukini témoigne de la vitalité artistique qui émerge des décombres. L’ensemble offre aux visiteurs français une immersion à la fois érudite et émouvante dans l’âme du Liban. Ce faisant, l’IMA transforme son musée en un pont entre les cultures et les époques, où l’on découvre, au détour d’un couloir, la cour d’un temple antique à Baalbek, et quelques pas plus loin, la silhouette tragique mais résiliente de Beyrouth en bronze. « Photographier le patrimoine du Liban, 1864-1970 » et « Li Bayrut » se répondent ainsi, l’un apportant le contexte historique et l’autre la profondeur humaine de l’actualité récente. Cette alliance inédite entre archives photographiques et art contemporain amplifie le message de l’exposition. Malgré les destructions, l’héritage culturel libanais perdure et continue de rayonner. À la fois leçon d’histoire et acte de foi en l’avenir, ce rendez-vous culturel parisien fait sortir des trésors oubliés de l’ombre et ravive, chez chaque visiteur, l’attachement à la préservation de la mémoire et la croyance en la renaissance d’un patrimoine vivant.

 

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Un entretien avec Marc Petitjean, réalisateur de « Dakar-Djibouti 1931 ». https://mondafrique.com/loisirs-culture/un-entretien-avec-marc-petitjean-realisateur-de-dakar-djibouti-1931-le-butin-du-musee-de-lhomme/ https://mondafrique.com/loisirs-culture/un-entretien-avec-marc-petitjean-realisateur-de-dakar-djibouti-1931-le-butin-du-musee-de-lhomme/#respond Tue, 15 Apr 2025 14:10:00 +0000 https://mondafrique.com/?p=74392 Mondafrique a publié en 2022 un entretien avec Marc Petitjean qui avait  réalisé le documentaire  Dakar Djibouti 1931. Nous publions à nouveau ce texte alors que ce documentaire devrait être projeté au printemps au Musée du quai Branly, comme le réalisateur l’avait publiquement demandé, voici deux ans, en répondant  à nos questions La projection du film […]

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Mondafrique a publié en 2022 un entretien avec Marc Petitjean qui avait  réalisé le documentaire  Dakar Djibouti 1931. Nous publions à nouveau ce texte alors que ce documentaire devrait être projeté au printemps au Musée du quai Branly, comme le réalisateur l’avait publiquement demandé, voici deux ans, en répondant  à nos questions
La projection du film Dakar Djibouti « le butin du Musée de l’Homme »,
un film de Marc Petitjean, aura lieu le dimanche 22 juin 2025 de 17:00 à 19:00
au Musée du quai Branly, en présence du réalisateur.
Un entretien avec Alexandre Vanautgaerden.

Paris était encore écrasé sous le soleil quand je rencontrai le réalisateur Marc Petitjean pour parler de son film sur La mission Dakar-Djibouti. Le butin du musée de l’Homme. La lumière paraissait plus éclatante à cause du bruit des voitures qui tournaient telles des mouches sur la place, nos oreilles bourdonnaient comme si nous étions à l’intérieur d’une calebasse. Nous nous réfugiâmes dans la brasserie qui jouxte le Théâtre du Châtelet, où Abderrahmane Sissako avait monté son spectacle sur Le vol du boli, quelques mois auparavant.[1] Cet objet rituel « prélevé » contre quelques francs par Michel Leiris sous les ordres de Marcel Griaule dans un sanctuaire à Kéméni, où ils n’auraient jamais dû pénétrer sans être initiés.

Marc Petitjean est un grand échalas que le sourire ne quitte jamais, bien qu’il boive du jus de citron sans sucre. J’ai visionné son film deux fois avant de le rencontrer. Il se regarde comme l’on part en voyage. Le narrateur, Damien Bonnard, a la voix chaude, il nous prend par la main et nous raconte l’expérience de la mission mois après mois, pays après pays. On assiste aux préparatifs, à la recherche de financement, on dirait aujourd’hui au fund-raising. C’était une époque où les missions scientifiques pouvaient faire appel à un boxeur, Al Brown, pour récolter des fonds. Organiser un combat de boxe, avant de partir en Afrique « sauver » la culture de peuples qui ignoraient qu’ils étaient en train de la perdre. Ils étaient trois au départ : l’ethnologue Marcel Griaule, formé à l’école de Marcel Mauss ; un dandy, conservateur de musée et ami de Joséphine Baker, Georges-Henri Rivière, et, enfin, un jeune écrivain surréaliste en psychanalyse, Michel Leiris, en quête d’un continent sauvage intérieur. Belle équipe. Georges-Henri Rivière organise la mission avec les autres mais reste à Paris.

Michel Leiris, Marcel Griaule, Georges-Henri Rivière.

Marc Petitjean me raconte que la famille de son père avait une pharmacie Boulevard de l’Hôpital, près du Jardin des plantes, et les chercheurs du Jardin des Plantes s’y rendaient. Son grand-père était très ami avec le directeur du musée d’ethnographie du Trocadéro de l’époque, Paul Rivet. Et à un moment donné, son père devait avoir 17-18 ans, le directeur lui demande s’il ne veut pas venir travailler comme bénévole.  Il rencontre de nombreuses personnes, dont Robert Desnos qui venait lui aussi étiqueter des objets de manière bénévole. Il y régnait une ambiance très chaleureuse. On propose même à son père de partir avec la mission Dakar-Djibouti. Il refuse, comme bien d’autres à l’époque. Ces gens étaient jeunes, y compris Griaule. Il y avait un petit côté improvisé dans cette mission. Si son père ne part pas en Afrique, il continue néanmoins à fréquenter le musée d’ethnographie. Il assiste, mois après mois, à l’ouverture des caisses que Griaule envoyait d’Afrique et qui naviguait jusqu’au port du Havre, avant d’arriver à Paris. Son père lui racontait quand il était enfant l’émerveillement devant ces objets inconnus. C’est certainement ces récits, pense-t-il, qui lui ont donné envie de voyager tout au long de sa vie.

Michel Leiris, L’Afrique fantôme, Paris, Gallimard, 1934.

Marcel Griaule en revenant de sa mission en Abyssinie avait très envie d’écrire, il a des ambitions littéraires assez marquées, rencontre Georges Bataille, et collabore à la revue Documents. C’est là qu’il rencontre Michel Leiris, qui avait une longueur d’avance sur le plan littéraire, car il avait déjà publié. C’est à partir de L’Afrique fantôme et de la figure de Michel Leiris qu’il rédige un premier scénario sur la mission au début des années 2000. Il le propose à Arte, mais cela n’intéressait pas grand monde à l’époque, il doit remiser son projet. C’est sa productrice après le discours du prsident Emmanuel Macron à Ouagadougou qui représente le projet en 2019. Arte l’accepte tout de suite.

Il s’interrompt alors dans son récit pour me commander un jus de citron, que je me sens obligé moi aussi de boire sans sucre. Les lumières sont tamisées. Je me concentre sur sa voix. Douce.

Finalement, quand il reprend le projet, il décide de s’intéresser davantage à la question de l’activité scientifique dans les territoires colonisés, car l’ethnographie existe grâce au pouvoir colonial. C’est ce qui rend leur aventure paradoxale, dit-il. Marcel Griaule et les autres partent pleins de bonnes intentions, pour montrer que ces peuples ont une culture différente, que les cultures se valent. Mais, au bout du compte, on apprend aux colons comment les peuples africains vivent pour mieux les maîtriser, rendre plus efficace l’entreprise coloniale. On protège la culture de ces peuples pour mieux les exploiter. C’est, selon lui, le problème aujourd’hui de nombreux discours visant à « décoloniser » les collections de musées. Si on reste au niveau des objets, on ne dit pas grand-chose.

Au départ, les héritiers de Marcel Griaule sont assez opposés à l’idée qu’on réalise un film sur la mission. Ils exigent des garanties, veulent s’assurer qu’il ne va pas dire trop de mal de Griaule, en privilégiant la figure de Michel Leiris. Ce n’est pas évident, il doit faire des concessions. Il tente d’être le plus objectif possible, et va travailler à la Bibliothèque Jacques Doucet où Michel Leiris a déposé ses fonds manuscrits. Mais il y a plein de choses qu’il ne peut mettre dans le film. Il est obligé pour pouvoir réaliser le document de parler du soutien de Griaule à l’empereur Hailé Séliassé au moment de l’invasion italienne. Cela le contrarie encore un peu aujourd’hui, car cela rompt le fil chronologique auquel il tenait, et cela l’empêche d’évoquer en détail la première rencontre entre le Négus et Griaule, dont on a conservé une trace dans une lettre d’Henri de Monfreid. Il promet de m’envoyer la lettre trouvée au Muséum d’Histoire naturelle, quelques jours plus tard je reçois la lettre qu’il a photographiée au Muséum. Elle est assez édifiante, même si Henri de Monfreid n’a pas toujours été un enfant de chœur. Quand on s’intéresse en détail à la Mission Dakar-Djibouti, on ne peut qu’être impressionné néanmoins par la capacité de travail de Griaule.

Au moment où je viens de terminer ce travail sur l’Abyssinie, par une interview avec l’Empereur, j’ai eu la très désagréable surprise d’apprendre les gaffes majuscules de Griaule couronnées hier par son attitude presque insolente au cours de l’audience que Sa Majesté lui avait accordée, dans l’espoir de clore aimablement une affaire si désagréable à notre amour propre français. J’ai entendu les deux sons de cloche et je dois avouer que notre compatriote s’est conduit aussi maladroitement qu’il était possible. Il a agit en Abyssinie comme il venait de le faire, sans doute, chez les nègres du Centre Afrique où il pouvait échanger ses documents ethnographiques contre des bibelots de verroterie. Il a traîté ces gens là avec une sorte de mépris un peu trop apparent pour une supériorité dont il ne leur donne pas l’impression.

Lettre d’Henri de Monfreid à Paul Rivert, directeur du musée d’Ethnographie, 6 février 1933. Paris, Muséum d’Histoire naturelle.

Marc Petitjean a relu Terre d’ébène d’Albert Londres, paru en 1929, il dit combien on demeure choqué par la brutalité de la réalité coloniale. Et, malheureusement, malgré leur volonté humaniste, Griaule et Leiris sont embourbés dans la machinerie coloniale. L’intendance énorme de la mission, l’envoi des caisses, ne peut s’imaginer sans cette organisation qui broie des millions d’êtres. Ils boivent chaque soir leur bouteille de vin, font porter leurs caisses par les noirs. Et quand l’on garde cela en tête, cela devient un cauchemar de faire ce film, dit-il. Leiris peut critiquer ce système colonial, mais il en profite pleinement.

Il me raconte que même s’il s’est beaucoup basé sur L’Afrique fantôme pour réaliser son film, il a utilisé également le gros volume d’Éric Jolly, Cahier Dakar-Djibouti, un peu fastidieux à lire, mais important. Après avoir bu la dernière gorgée de son jus de citron sans sucre, il ajoute : « quand on fait un film, on a des intuitions, mais c’est important de pouvoir les valider, pour ne pas dire trop de conneries. »

Mission Dakar-Djibouti, 1931-1933.

Ce qu’il a essayé de montrer aussi dans ce film c’est la nature judiciaire de ces enquêtes ethnographiques, dont les scientifiques sont les premiers à avoir conscience. Cela finira par indisposer Michel Leiris. Les enquêtes aussi structurées soient-elles, finalement, en disent plus sur nous et la façon dont nous imaginons notre relation aux autres, que sur les personnes que nous voulons interroger, et prétendons vouloir connaître. C’est d’ailleurs pour cela que Griaule et Leiris ne cessent de penser que leurs informateurs leur cachent des choses. Ils ont parfaitement conscience que la nature de leur enquête, entraîne les interviewés à biaiser, à échapper au carcan dans lequel on les enferme avec ce questionnaire préétabli : où, qui, comment, pourquoi, quand une chose advient-elle ?, quel est cet objet ?, etc.

Quand je l’interroge sur le cheminement étrange de Leiris, qui finit par fuir la mission pour aller vivre dans une case en Éthiopie, ne supportant plus l’aspect administratif et judiciaire de l’enquête ethnographique, puis rentre à Paris et devient… ethnologue. Il me répond que, pour lui aussi, cela demeure un mystère.

La difficulté de réaliser ce film, c’est la beauté qui émane des photographies. Il voulait faire un film essentiellement avec des images d’archives, pour rendre compte d’une certaine image de l’Afrique au début des années 1930. Comme nous l’avons raconté lundi en évoquant la contre-enquête de Daouda Keïta au musée du quai Branly sur la mission Dakar-Djibouti, on a quasiment perdu l’ensemble des documents filmiques (à l’exception de la fameuse scène où Marcel Griaule filme le rituel de la cérémonie d’initiation du zar en Éthiopie) et audio. Il a dû combler les trous, en insérant des images d’époque, mais tournées hors du contexte de la mission ethnographique. Ces images animées,  paraissent anecdotiques à côté des photographies de Marcel Griaule. Celles-ci donnent une richesse au film qui ne manque pas d’ambiguïté.

Nous parlons de cette frontière ténue entre l’observation scientifique, la beauté des prises de vues, la dénonciation du discours colonial et la fascination d’une Afrique « sauvage », rêvée. Comme il l’écrit dans le commentaire, en parlant du séjour de Marcel Leiris en Éthiopie quand il quitte la mission fascinée par une femme et avec l’envie de se livrer à corps perdu dans ce monde plein de mystères. Ce grand plongeon est un mixte de trivialité, de mystique, d’érotisme et d’amitié.

Il insiste sur la vitesse avec laquelle la Mission traverse le continent, c’est pour cela qu’il y a cette sensation qu’ils « arrachent » les informations ou les objets. Ils voyagent trop vite.

Pour terminer, il me raconte que les responsables du Muséum d’Histoire naturelle ont refusé pendant un an de lui permettre de filmer les collections de la Mission Dakar-Djibouti qu’ils conservent. . Mais avant tout, il aimerait que le film soit montré en Afrique.

On se quitte sur la place, le soleil mange tout. Je me dis que ce serait bien de tirer son portrait. Je regarde autour de nous, l’avenue Victoria, je vois une porte rouge, qui correspond bien à cette énergie chaleureuse qui émane de sa personne. On continue à parler, il se met devant la porte. Je sors mon téléphone, je fais la photo, je le range. Il me dit : « c’est tout ? » Je lui montre la photo : « c’est bien moi ».

Marc Petitjean, réalisateur du documentaire ‘La Mission Dakar-Djibouti 1931. Le butin du Musée de l’Homme. Paris, 30 août 2022..

 

Réalisation : Marc Petitjean
Production : Delphine Morel
Image : Olivier Petitjean
Montage : Isabelle Poudevigne
Musique : Camille Petitjean
Animation : Romain Renault
Voix : Damien Bonnard

PRODUCTION
TS productions
Arte France, TV5

DIFFUSION
Arte France, TV5, 5 avril 2022.

FESTIVALS
Selection au Festival Visions d’Afrique à Montréal. Mention spéciale du jury. Avril 2022.

 

Notes

[1] Créé en octobre 2020, Le vol du Boli est né des multiples voyages de Damon Albarn en Afrique et de sa rencontre avec le metteur en scène Abderrahmane Sissako. Porté par les voix et l’énergie des chanteurs, comédiens, danseurs et musiciens africains et européens, ce spectacle est un hommage et un chant d’amour envers le continent africain et son Histoire. La pièce est reprise du 15 avril au 8 mai 2022.


 

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