Burkina Faso : Les atrocités des combattants djihadistes se multiplient


Exécutions sommaires, pillages et incendies criminels sont commis en toute impunité



(Nairobi, le 15 juin 2023) – Des groupes armés islamistes au Burkina Faso ont tué des dizaines de civils, pillé et incendié des biens, et forcé des milliers de personnes à fuir lors d’attaques menées à travers le pays depuis la fin de l’année 2022, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui. Les groupes armés ont également assiégé plusieurs villes, privant les habitants de nourriture, de services essentiels et d’aide humanitaire.

En avril 2023, le gouvernement militaire de transition du Burkina Faso, formé en octobre 2022, a annoncé une « mobilisation générale » dans le cadre d’un plan de reconquête des territoires saisis par les groupes armés islamistes.

« Les groupes armés islamistes font des ravages au Burkina Faso en attaquant des villages et des villes et en commettant des atrocités contre les civils », a déclaré Carine Kaneza Nantulya, Directrice adjointe de la division Afrique de Human Rights Watch. « Les autorités de transition devraient travailler avec les organismes régionaux et les gouvernements préoccupés pour fournir une meilleure protection et une assistance renforcée aux personnes en danger. »

Depuis 2015, les gouvernements qui se sont succédé au Burkina Faso luttent contre une insurrection islamiste qui se propage depuis le Mali voisin, et qui a fait des milliers de morts et provoqué le déplacement forcé de près de deux millions de personnes. Les combats se sont intensifiés ces dernières années, au point que le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM), lié à Al-Qaïda, et, dans une moindre mesure, l’État islamique dans le Grand Sahara (EIGS) contrôlent désormais jusqu’à 40 % du territoire du Burkina Faso, selon la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). L’augmentation du nombre de victimes civiles et militaires et la perte de territoires tenus par le gouvernement ont provoqué deux coups d’État militaires au Burkina Faso depuis 2022.

Entre janvier et mai, Human Rights Watch a menée des entretiens en personne ou par téléphone avec 36 personnes, au sujet d’abus qui auraient été commis par des groupes armés islamistes dans les régions du Centre-Ouest, du Centre-Nord et du Sahel depuis le mois de novembre 2022. Il s’agissait notamment de 19 témoins d’abus, 4 membres de familles de victimes, 6 membres d’organisations de la société civile burkinabè et 7 représentants d’organisations internationales.

Aucun groupe armé n’a revendiqué ces attaques. Plusieurs témoins pensent néanmoins que les assaillants étaient des membres de groupes armés islamistes en raison de leurs méthodes d’attaque, du choix de leurs cibles, de leurs vêtements et de leurs turbans. Les personnes interrogées ont également fait état de déclarations de plusieurs assaillants, qui ont notamment ordonné aux habitants de quitter la zone. Ces dernières années, les groupes armés islamistes ont utilisé le déplacement de populations comme stratégie pour asseoir leur pouvoir et leur autorité, et infliger des punitions collectives aux habitants des villages et des villes qui collaborent avec les autorités gouvernementales et les forces de sécurité.

Les autorités militaires se sont fortement appuyées sur les milices locales pour contrer ces attaques. En octobre 2022, elles ont lancé une campagne pour renforcer ces milices en recrutant 50 000 supplétifs civils, appelés Volontaires pour la défense de la patrie (VDP). En réponse, des groupes armés islamistes ont attaqué des villages qu’ils accusent de soutenir les milices.