Le samedi 27 août, des élections présidentielles ont eu lieu dans mon pays, le Gabon, en Afrique de l’Ouest, et je fus le candidat qui a gagné par une marge de vote substantielle. Près d’une semaine plus tard, je me serais attendu à m’adresser au monde en tant que président élu du Gabon, prêt et disposé à travailler avec les États-Unis et tous nos partenaires internationaux pour lutter contre le terrorisme, renforcer nos économies et d’améliorer la vie de nos citoyens grâce à un meilleur développement et coopération.
Au lieu de cela, j’espère que le peuple américain, et tous ceux qui se soucient de la démocratie, aideront mon pays à sortir d’une crise pour notre démocratie. Je suis au Gabon où l’actuel président, Ali Bongo Ondimba, utilise nos forces de sécurité nationales – armés des équipements militaires précieux fournis par les Etats-Unis pour lutter contre le terrorisme – contre notre propre peuple. Dans les rapports que je l’ai entendu, au moins une douzaine sont morts – probablement plus – et des centaines de blessés; des milliers de personnes ont été arrêtées, dont 23 de mes travailleurs de campagne.
Coupures à répétition d’Internet
Afin d’empêchera les gens de témoigner de leur propre récit, M. Bongo a fait couper Internet pendant de longues périodes. Mais grâce aux réseaux sociaux et aux citoyens gabonais courageux, l’histoire sera racontée. En ligne, il est facile de trouver des images de l’horreur et de la violence que la répression dont s’est livré Ali Bongo au cours de la dernière semaine. Au moment même où j’écris, ce jeudi matin, les hélicoptères de la garde présidentielle de M. Bongo sont en train de bruyamment tournoyer au-dessus de mon siège de campagne, et les rues sont pleines de manifestants affrontant les forces de sécurité de M. Bongo.
Pourquoi M. Bongo est en train de faire tout cela? Eh bien, quand les gens du Gabon ont voté pour leur leader, c’est moi qu’ils ont choisi. Ils ont choisi un changement par rapport au régime dynastique qui a gouverné notre pays depuis 1967. Le père de M. Bongo, Omar Bongo Ondimba, a dirigé le Gabon de 1967 à 2009, avant que le fils ne prenne le relais. Maintenant, M. Bongo fait une crise dangereuse parce que les populations du Gabon lui ont dit qu’il est temps pour lui de s’en aller.
Plus précisément, après le vote de samedi – qui était pacifique, ordonné et ouvert aux observateurs internationaux – les travailleurs électoraux, les gouverneurs des provinces et les témoins internationaux pouvaient voir que j’avais une avance à deux chiffres à travers le pays, et Ali Bongo devint inquiet.
Ces résultats ne sont pas surprenants, car les deux autres challengers majeurs se sont retirés de la course avant l’élection et m’ont soutenu en tant que candidat de l’opposition unifie contre M. Bongo. Les votes – 373,310 au total – ont été collectés, et les résultats préliminaires de huit des neuf provinces m’ont présenté avec une solide avance jusqu’à mardi soir.
Mais mercredi, lorsque ministre de l’Intérieur de M. Bongo a annoncé les «résultats officiels», y compris ceux de la neuvième province – la base de M. Bongo – il nous a tous choqués en annonçant que le taux de participation des électeurs dans cette province avait été de 99,9 pour cent (par opposition à un participation nationale ailleurs de 59 pour cent) et que 95 pour cent de la province avaient voté pour le titulaire. Curieusement, le nombre total d’électeurs dans cette province dépassait de plusieurs milliers de personne le nombre de personnes qui vivent réellement dans la province.
C’est sur cette base, que M. Bongo a remporté la victoire par 1,57 pour cent du vote national et se déclara président jusqu’en 2025.
Simulacres d’élections
Nous avons déjà vu des «résultats» comme ceux-ci auparavant, mais seulement dans des simulacres d’élections, le plus souvent dans les dictatures. Les citoyens du Gabon avaient pacifiquement et respectueusement exercé leur droit de choisir librement et équitablement le prochain président de notre pays. M. Bongo n’a pas approuvé leur choix, donc il a substitué sa volonté à la leur. Même si nous sommes déçus, nous ne sommes pas surpris. M. Bongo a fait la même chose en 2009; il a voulu utiliser les mêmes méthodes.
Nous, le peuple du Gabon, exigeons que M. Bongo mette fin à la violence et cesser d’ordonner que nos frères, sœurs et enfants qui sont dans les forces de sécurité, nous attaquent. Nous exigeons qu’il cesse de rechercher des représailles contre ses adversaires politiques et leurs partisans. Nous exigeons qu’il publie les résultats des élections bureau de vote par bureau de vote, afin que des observateurs indépendants puissent vérifier un recomptage de tous les votes et confirmer la volonté de notre peuple.
Comme je l’ai dit dans un appel public au monde entier mercredi dernier, nous voulons aussi que les États-Unis n’acceptent rien de moins que la vraie démocratie au Gabon, comme le Canada, la France et toute l’Union européenne se sont déjà engagés à faire. Et nous espérons que les citoyens Américains, leurs dirigeants et décideurs politiques vont envoyer un message clair à M. Bongo qu’il ne peut pas voler une élection.
J’ai déjà appelé mes concitoyens gabonais à protester pacifiquement jusqu’à ce que nos demandes soient satisfaites. Je vais continuer ce combat jusqu’à ce que notre voix et notre volonté soient respectées et acceptées.
Jean Ping, économiste et ancien ministre des Affaires étrangères du Gabon, est également un ancien président de l’Union africaine et a été président de la 59ème session de l’Assemblée générale des Nations Unies, en 2004 et 2005.