L‘Elysée doit trouver une porte de sortie honorable pour l’armée française engagée en Afrique alors que les groupes armés djihadistes sont en train d’embraser les pays du Sahel et de réduire comme peau de chagrin l’influence de la France dans ce qui était, hier encore, son pré carré. L’avancée des forces islamistes est telle que la diplomatie française semble confrontée aux mêmes choix dramatiques que l’armée américaine a connu en Afgnanistan
Le Président français, Emmanuel Macron, avait salué en septembre par deux tweets victorieux la mort d’ Adnan Abou Walid Al-Sahraoui, chef du groupe « État Islamique au Grand Sahara » (EIGS), qui est responsable de nombreux attentats terroristes dans la zone dite des trois frontières entre le Niger, le Mali et le Burkina »Il s’agit d’un nouveau succès majeur dans le combat que nous menons contre les groupes terroristes du Sahel ». Avant de se féliciter par deux tweets successifs, dès jeudi matin, d’avoir obtenu le scalp d’un des chefs de la mouvance terroriste sahélienne, Emmanuel Macro aurait du se souvenir du revers total des positions françaises dans cette région du monde. Sur fond de montée d’un sentiment anti français auprès de franges grandissantes de l’opinion publique africaine.
Un peu de retenue aurait évité demain au candidat Macron, en pleine campagne de l’élection présidentielle, d’essuyer de sérieux revers de volée de la part de ses concurrents qui auront beau jeu de dénoncer les écrans de fumée de l’Élysée dans l’affaire sahélienne
Le scénario afghan
Depuis l’évacuation américaine peu glorieuse de la ville de Kaboul, un certain nombre de commentateurs, dont le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, s’interrogent sur le bilan de neuf années d’intervention française au Sahel et sur la possibilité d’un scénario afghan au Mali. « Les groupes terroristes peuvent se sentir enthousiasmés avec ce qui s’est passé en Afghanistan, a déclaré Guterres à l’AFP le 9 septembre, et avoir au Sahel des ambitions au delà de ce qu’ils pensaient ».
Une vaste recomposition politique est en train en effet de se dessiner entre la junte militaire ayu pouvoir au Mali et les forces djihadistes. Ce qui constitue un formidable désaveu pour l’Élysée dans un pays où l’armée française est intervenue justement pour enrayer la progression des forces extrémistes et rétablir la démocratie, selon le mot bien imprudent du ministre des Affaires Étrangères de François Hollande, Laurent Fabius.
Le retrait annoncé de la force militaire Barkhane aura été la réponse trouvée par Emmanuel Macron pour répondre à un désastre annoncé. D’autant plus que les militaires désormais au pouvoir à Bamako ne semblent plus guère sensibles aux oukases de la diplomatie française et de la communauté internationale qui les pressent de mettre fin à la période de transition. Dans la crainte de voir le Mali notamment basculer dans une sorte de République islamique qui signerait l’échec d ela France aux yeux du monde, le Président français a décidé de retirer ses troupes par étapes. Histoire de laisser au Mali comme au Tchad et au Burkina des forces spéciales qui veillent au grain.
Le climat est devenu tellement malsain entre les forces françaises restées à Bamako et les militaires maliens qu’en début de semaine l’agence Reuters a annoncé qu’un contingent d’un millier de mercenaires russes de l’agence privée Wagner allient débarquer à Bamako pour assurer la sécurité du nouveau régime. Quand on connait l’hostilité de la diplomatie française à la politique expansionniste de la Russie de Poutine, on comprend à quel point cette dernière annonce a pu constituer un sérieux affront pour Paris.
Des « ennemis publics » à la pelle
Dans ces conditions, le président français aurait pu éviter de se précipiter sur ses tweets pour se féliciter, dans la nuit de mercredi à jeudi de la mort du chef du Groupe Islamique au Sahara, franchisé de Daech, qui face à un repli certain au Moyen Orient, cherche à se redéployer en Afrique. Ce qui serait concasse si la situation n’était pas dramatique au Sahel, c’est la façon dont les autorités françaises présentent le chef djihadiste abattu comme « l’ennemi prioritaire », un qualificatif dont il bénéficiait depuis 2020.
Seulement voila, ce n’est pas Abou Walid Al-Sahraoui, désormais neutralisé et bientôt remplacé, mais bien Iyad Ag Ghali, le chef du « Groupe de Soutien de l’Islam et des Musulmans » (GSIM), cette antenne d’Al Qaida particulièrement influente au Mali, qu’Emmanuel Macron a désigné au Tchad en février dernier, lors d’une rencontre des chefs d’état du G5 Sahel, comme « l’ennemi public numéro un ». Ce qu’a confirmé le chef des forces françaises au Sahel, le général Marc Conruyt, en désignant ce dernier comme « l’ennemi le plus dangereux ».
C’est bien ce chef touareg du Nord Mali qui aura été l’opposant le plus constant et le plus sophistique de la France. C’est lui qui, en faisant mine en 2013, de descendre vers Bamako pour d’en emparer avec quelques centaines d’hommes, provoqua l’opération militaire de Barkhane en 2013. Lui aussi qui, depuis lors, a su s’imposer au Mali comme le patron du principal mouvement armé, au détriment justement de son frère ennemi, » l’État Islamique au Grand Sahara » d’Al-Sahraoui . Lui encore qui, grâce au soutien algérien et par ses connections avec la junte militaire à Bamakp, s’impose comme une personnalité incontournable. Lui enfin qui parce qu’il détient le dernier otage français de la région, le journaliste français Olivier Dubois, détient une sérieuse monnaie d’échange avec les diplomates français et se révèle sans doute intouchable.
Voici la situation réelle du Sahel et du Mali qu’Emmanuel Macron connait parfaitement, mais qu’il cherche à enfouir en imposant des bulletins de victoire aussi indécents qu’inopérants.
Best of Mali (10/10), Emmanuel Macron impute l’échec de Barkhane aux Africains
L’Afrique, surtout francophone a besoin que jamais de nouveaux leaderships comme ces jeux officiers decomplexés pour sortir l’Afrique du bourbier que la France l’a enfoncée depuis plus de 60 ans. Tout processus est la bienvenue pour arriver au but. Le peuple en a marre de la domination néocoloniale sans fin, il réclame le changement radical du système qui l’appauvrit et se perpétue.
Entièrement d’accord avec votre analyse. En effet, Macron doit tirer les leçons des derniers événements survenus en Afghanistan.
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